Tout au long de ma vie j’ai connu tant d’automnes,
Qui, tout bien réfléchi, ne se ressemblaient pas,
Et dont le souvenir dans ma tête résonne,
Quand le sol du passé est foulé par mes pas.
L’automne au ciel clément, au climat de cocagne
Car il était tombé amoureux de l’été,
Quand le vent m’apportait des parfums de l’Espagne,
Et qu’on croyait, naïfs, à son éternité.
Celui des jours de pluie, de l’hiver les prémices,
Qui chassait l’hirondelle à l’instar du beau temps,
Qui faisait choir les fruits avant qu’ils ne mûrissent,
Dont la bise effaçait jusqu’au nom du printemps.
Celui dont la saison s’accordait à mon âme,
A l’âge où mes amours s’étiolaient peu à peu,
Où seul mon âtre, hélas, entretenait sa flamme,
Où les cieux de mon cœur avaient perdu leur bleu.
Celui où la Toussaint n’était pas jour de fête,
Car un proche venait de partir pour l’ailleurs,
Et que j’allais priant, courbé sur les fleurettes,
En ce temps où encor je croyais au Seigneur.
Celui de l’âge tendre et des maîtres rigides
Qui surveillaient les points comme les déliés,
Automne des regards apeurés et timides,
Entre plume hésitante et antique encrier.
Automne d’aujourd’hui où la vie est étrange,
Car un virus sournois vient, s’en va et revient,
Où glosent les médias sur le sexe des anges,
Voulant parler de tout, qui ne parlent de rien.