HOMMAGES A ALAN KURDI
Le corps d’un enfant mort vomi comme un bois mort, on ne peut pas dire qu’il dort. Il ne se relève pas. C’est fini l’essai, des mollets en feu aux déluges de rire, les jeux, les câlins, la jetée devant soi.
Les réfugiés forment un autre monde. Qui les veut à sa porte, à sa table ? Pas de pleurs de crocodiles, c’est insulter les crocodiles, dont les mâchoires, d’un ahan de stentor, broieraient tout alentour.
Une larme à ce père, survivant d’une tragédie que le monde abandonne. Il n’est qu’une Antigone, morte, et nos mémoires s’en allègent. Le rideau tiré, qui torche le cul de la ville ? Les éboueurs : des réfugiés.
Le silence est un cri, belle parole, bras ballants ! Rien ne change, ni le fric assassin, roulé par les flots. C’est à peine si chacun, à galvauder ses déplaisirs, un instant, lève haut un enfant mort en mer.
06 septembre 2015
Né en 1950, Pierre Perrin est un poète français qui réside à Chassagne dans le Doubs. Il collabore à plusieurs revues de poésie et a publié plusieurs recueils. Il est critique littéraire et dirige la nouvelle revue littéraire Possibles.
La mer berceau de l'humanité
A pris l'habitude de rouler
Des cadavres avec les galets
Elle devient patrie pour milliers
De migrants qui fuient l'atrocité
Mer sois douce à ces désespérés
L'homme flambeau de l'humanité
A pris l'habitude d'oublier
Des images aussi des forfaits
Il devient complice pour ces faits
Défiant tout fraternité
Homme tends la main aux oubliés
Aylan terreau de l'humanité
D'habitude ne peut attraper
Dans la jungle de l'iniquité
Il devient par son corps échoué
La honte pour l'homme aux yeux fermés
Aylan petit ange révélé
Aylan petit ange sacrifié
Septembre 2015
Ecrit en hommage aux migrants et tout particulièrement au petit Aylan KURDI.
Qui avez fertilisé la géhenne par votre regard de spadassin et par vos armées envoyées.
Cet enfant que les vagues auront été les dernières à bercer, il est un.parmi les milliers d'invisibles déchiquetés, brûlés, rejetés. Il est un parmi les horribles fruits de la guerre. Votre guerre. Notre guerre.
Ces morts sont nos morts.
Ce malheur est notre malheur.
Cette inhumanité est notre inhumanité.
Ce sont nos bombes qui tuent. Ce sont nos obus qui perforent. C’est notre fric qui domine et écrase. C’est notre regard qui impose. Oui nous sommes pères de Daesh et autres barbares parce que nous les avons enfantés. Nos interventions humanitaires armées ont été bien fécondes, bien prolifiques. Nous, les intelligents, les modèles à suivre, les valeurs à prendre, avons été bien moyenâgeux ! Revenir à la guerre pour solution ! Sombres crétins ! Kant, Jaurès, Hessel sont piétinés sur les plages ensanglantées. Et maintenant cet enfant au souffle des vagues, cet enfant qu’il est si horrible d’admettre qu’il est mort… La mer, plus humaine que nous, tente de lui insuffler les dernières souplesses de son corps. Et elle nous le rend.
Nous avions été des millions à clamer qu’il ne fallait pas. Il ne fallait pas en Irak. Il ne fallait pas. Ils l’ont fait, et encore, et encore. Partout, notre monde s’embrase. Le couvercle de la boite de Pandore a été ouvert, pulvérisé.
La guerre se propage, les éclaboussures de sang entrent dans nos trains, nos musées, nos journaux…
Nous allons « accueillir » 100 000, 200 000… migrants et continuer la guerre, continuer à dominer, continuer à imposer.
Nos valeurs sont si grandes. Nos valeurs sont si belles.
Mais nos valeurs n’imaginent même pas comment refermer le couvercle de la boite de Pandore.
Nos valeurs puent le fric et ne sont rien d’autre.
Pour que nos enfants ne s’ajoutent à cet enfant des flots bleus, il serait grand temps que nous regardions dans les yeux ces valeurs qui sont les nôtres.
Publié dans le Journal 20minutes du 03/09/2015
Après qu'on m'ait donné la vie
Celle-ci se décide aujourd'hui
Que le voyage s'arrête ici
Mais jamais tout de nous
N'oublie
Mais jamais tout de nous
N'oublie
Vous devez être courageux
Je ne veux pas de larmes dans vos yeux
Même si envie même si vouloir
Malgré mes efforts
Moi pas pouvoir
Moi pas pouvoir
Je pars je vous laisse
Je rigole
Cette année
Pour moi plus d'école
Je pars je vous laisse
Je décolle
Retrouver les oiéseaux qui volent
La vie l'amour ont leurs secrets
Ces toubibs à nos grands regrets
N'ont pas pu trouver le moindre accès
Autour de moi tout le monde se tait
Autour de moi le monde se tait
Le bip s'arrête et la machine
Plonge mon coeur dans les abîmes
Mon corps à moi lui dans le vent
Pousser ici son dernier cri
Exhaler son dernier souffle
Je pars je vous laisse
Je rigole
Cette année
Pour moi plus d'école
Je pars je vous laisse
Je décolle
Retrouver les oiéseaux qui volent
Pour moi ce soir il est trop tard
Je suis maintenant sur le départ
Petit malade vous dire au revoir
Rendez-vous sur autre quai de gare
Vidéo avec deux chansons interprétées par Glenn Gibson (français et anglais) ainsi qu'un poème "Trois ans"
Lien youtube :
https://youtu.be/HnBSBMM_QMI
« Je lui dirai ce que vous m’avez fait subir !
Je lui demanderai pourquoi vous ne m’avez pas laisser grandir ?
Je lui raconterai les souffrances de ma mère sans sommeil !
Je lui parlerai du désarroi de mon père impuissant, et sans travail.
Je lui demanderai pourquoi vous avez perturbé mon sommeil ?
Je lui dirai que vous avez détruit ma maison !
Je lui dirai aussi que vous avez détruit l’école de mes frères.
Je lui demanderai pourquoi le monde est resté sourd à mes pleurs ?
Je lui demanderai où sont passés les Hommes dignes et les valeurs ?
Échoué sur une plage, Je quitte ce monde et je vous laisse à votre conscience !! Et surtout pas de pleurs ! »
Dr Lahna, depuis Alep (Syrie) au petit matin.
Le Dr Zouhaïr Lahna est chirurgien obstétricien marocain et acteur associatif. Ancien Chef de clinique des Universités de Paris VII et membre de Médecins Sans Frontières.
Il a participé à plusieurs opérations humanitaires à travers le monde : Afghanistan en 2001, Congo 2004, Jénine en 2006 et les guerres de Gaza de 2009 et de 2014.
Les pleurs du monde
comme un linceul de vagues
plage de Bodrum