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Le Monde de Poetika
Site & Revue de poésie en ligne
N° ISSN : 2802-1797
La feuille des forêts
Qui tourne dans la bise
Là-bas, par les guérets,
La feuille des forêts
Qui tourne dans la bise,
Va-t-elle revenir
Verdir - la même tige ?
© Jean MORÉAS
Jean Moréas
(1856-1910)
De son vrai nom d'origine grecque Ioánnis Adamántiou Papadiamantópoulos, Jean Moréas est un poète symboliste grec d'expression française, naturalisé français en 1910. Il a publié de nombreux poèmes dans des revues et magazines tels que Lutèce et Le Chat noir et a réuni ses poèmes dans deux recueils Les Syrtes et Cantilènes. Il écrit le Manifeste symboliste en 1886, qu'il publie dans le journal Le Figaro, et fonde en même temps la revue Le Symboliste avec Paul Adam et Gustave Kahn.
En 1891, le symbolisme devenant plus ouvertement associé à l'anarchisme, il publie Le Pèlerin passionné qui reçoit un accueil mitigé. En 1892, il se détourne du symbolisme et fonde L'Ecole romane. Mais tout comme il s'était rapidement détourné du symbolisme après l'avoir créé, Moréas délaisse le romanisme pour le néo-classicisme. Son recueil le plus célèbre, Stances (1899), illustre cette nouvelle ambition avec plus de bonheur que les œuvres antérieures, dans une langue d'une pureté classique qui rappelle André Chénier.
Si les anges n’existent pas
qui donc fait ce doux bruit
par terre dans nos chambres
et là-haut sur le toit ?
J’entends leurs voix , j’entends leurs pas
à l’heure où la nuit va descendre...
Je me demande si Papa
les écoute aussi parfois ?
Si les anges n’existent pas,
qui nous expliquera
d’où viennent les cheveux de soie
qui flottent le soir dans les bois ?
© Madeleine LEY
Extrait de Petites voix
Madeleine Ley (1901-1981)
Femme de lettres belge, Madeleine Ley accède à la notoriété en 1930, avec la publication de son premier recueil de poésies destinées aux enfants, Petites voix, dont plusieurs seront mises en musique par divers compositeurs, dont Francis Poulenc. Entrée dans l'univers littéraire, elle côtoie notamment Colette, Charles Vildrac, André Gide et Roger Martin du Gard. Elle publie aussi des contes, nouvelles et romans. Sa santé mentale s'étant dégradée au cours de la Seconde Guerre mondiale, elle cesse définitivement d’écrire. Dès lors, son état nécessite des soins psychiatriques constants.
Autre texte :
Odelette à l'araignée
Mes bras se sont ouverts et se sont refermés,
J'ai bu tous les poisons aux coupes exaltantes,
Et si c'est un péché d'avoir beaucoup aimé,
Je veux le premier rang parmi les pénitentes !
Les plaisirs de la chair, se sont sur moi, posés,
La lèvre m'a meurtrie et la dent m'a blessée,
Je porte avec orgueil la trace des baisers,
Je n'ai rien désiré que d'être caressée.
Je ne regrette pas les beaux soirs innocents,
La calme pureté des coeurs de jeunes filles,
Moi qui ne peux calmer la fièvre de mon sang,
Ni l'éclair de mes yeux, quand la volupté brille.
De l'amour prodigué le long des jours passés,
Des baisers pénétrants, sur les lèvres que j'aime,
De ces morceaux de fleurs, entre mes doigts froissés,
J'ai fait un pur collier de perles et de gemmes.
Je porte fièrement ce mystique joyau,
Dont l'éternel éclat me brûle jusqu'à l'âme ;
Moi que l'amour aura marquée à mon berceau,
J'entraîne vers sa loi, le cortège des femmes.
© Émilienne d'ALENÇON
Extrait de Sous le masque (1918)
Émilienne d'Alencon (1869-1945)
Comédienne, danseuse de cabaret, célèbre courtisane et poétesse française de la Belle Époque, Émilienne d'Alençon est fille d'une concierge de la rue des Martyrs à Paris. Elle fait ses débuts dans un numéro de dresseuse de lapins au Cirque d'été en 1889, avant de devenir danseuse au Casino de Paris, aux Menus-Plaisirs, aux Folies Bergère, à la Scala puis aux Variétés. Surnommée l'une des Trois Grâces de la Belle Époque, avec Liane de Pougy et Caroline Otero, elle défraie la chronique avec ses liaisons : le duc d’Uzès, le roi des Belges Léopold II, le futur Edouard VII d’Angleterre, le Kaiser Guillaume II, Liane de Pougy, la Goulue, la poétesse Renée Vivien… Elle se fait connaître à l'international par de nombreuses photographies et cartes postales. En 1918, elle se passionne pour la littérature et écrit un recueil de poèmes Sous le masque. A la fin de la Belle Époque, elle n'est plus à la mode et ne se remet pas du décès de son mari. Elle plonge dans l'alcool et la drogue et s'endette. Elle s'installe à Nice et parvient à éponger ses dettes en vendant ses biens. Elle meurt à Monaco le 14 février 1945 et par la suit est inhumée au cimetière des Batignolles à Paris.
Petite, mince et menue au regard de charbon
Grande, blonde, élancée aux yeux d’azur tressés
Brune, veuve éplorée, enveloppée de noir
Blonde encapuchonnée d’un voile de tristesse
Rousse parcheminée de tâches orangées
Elles sont toutes belles à me voiler les yeux
Je les vois de mes mains par touches exploratrices.
Leurs écharpes de brume sont brodées de langueur
Tissées au dur métier de leurs doigts dégourdis
Éros et les siens se damneraient pour elles
Les flèches de son arc sont en papier mâché
Telle Amphitrite elles savent oublier quelquefois
Mais d’autre fois s’entêtent à réclamer justice
N’en déplaise à Scylla maîtresse abusive.
Femmes de haut lignage, femmes dévergondées
Femmes de bas étage, princesses de quartier
Vous êtes toutes blanches en robe de mariée
Mais tigresses méchantes aux griffes acérées
Quand le danger s’égare dans votre pré-carré.
Vous qui êtes la mère, vous qui êtes l’amante
Vous qui êtes la sœur ou la fiancée de cœur
Ne laissez pas les dogmes enlaidir votre vie
Ne lapidaient plus les femmes adultères
Aveugle, je vous dis : « Jouissez sans merci ».
© Claude DUSSERT
Claude Dussert
(1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations. Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité 9 recueils de poèmes sur plus de 22 écrits, une pièce de théâtre et deux recueils de pamphlets non édités.
Son dernier recueil Par des Chemins de Traverse est libre de lecture ou de téléchargement sur le site 'MonBestSeller.com'. Il a reçu de nombreux prix dont 2024 : Médaillé aux Jeux Floraux de Toulouse pour le 700ème anniversaire - Prix Jean Michel Renautour AIEL - 2ème Prix Jeux Floraux du Béarn et en 2025 : 2ème Prix aux Jeux Floraux de Sartrouville - 3ème Prix au Concours International de la SPAF Occitanie - Grand Prix International du Conseil Départemental du Loir et Cher décerné par AIEL (Académie de l'École de la Loire). Sans oublier en 2023 le Prix Spécial du Jury au concours Poetika.
Oh dans les alcools d’un bar de la rive gauche
Attendre attendre encor la même voyageuse
Celle au baiser de feu et qui fera tourner
Sa robe de cyclone autour de mes naufrages
Du côté de Shangaï ou alors dans les bruines
D’un soir de Copenhague au large de l’automne
Un violon de mirage emporte la mémoire
Et les chambres d’hôtel ruissellent sur la mer
Quelque part dans le soir la rumeur d’une écluse
Un air de blues et tournent tournent les méduses
Suinte sur les trottoirs le sang des anciens crimes
Et ma vie se rallume aux songes de la brume
Du côté de Shangaï de Prague ou d’Amsterdam
Odeur d’amour malade et de neige tzigane
Quelque part et suivant le hasard des nuages
Attendre attendre encor la même voyageuse
Le cri d’un autorail me barre la mémoire.
© Christian BACHELIN
Christian Bachelin (1933-2014)
Poète et écrivain français, Christian Bachelin s'engage à l'école militaire et ses professeurs remarquent ses dons littéraires. Adolescent, il découvre le surréalisme et rédige ses premiers poèmes. De retour à la vie civile, il reçoit en 1953 le prix Marie-Bonheur pour son recueil Stances à la neige. Pendant dix ans, il exerce une multitude de petits métiers et se remet à l'écriture en publiant plusieurs recueils. En 1973, il obtient un poste d'employé aux écritures à la Société des gens de lettres. En 1975, il décroche le prix Charles-Vildrac pour Ballade transmentale.
Autres textes :
Il neige sur le terrain vague
Je suis n'importe qui
Je la vois encore assise dans le sofa,
Un rite bien installé, sa sieste après le repas.
Une fois la vaisselle faite au robinet de l’évier
Et le bois coupé pour recharger le foyer,
Elle s’octroyait une pause, ma foi bien méritée
Avant de remettre ça pour préparer le goûter.
Elle n’était pas grande, le visage tout rond,
Ses cheveux neigeux dégageaient bien son front.
De ses petits yeux malicieux de couleur marron,
Elle aimait la vie et de son chat le ronron.
Tous les jours de la semaine se succédaient pareils
Affairée à ses tâches, après un matinal réveil :
Il fallait s’assurer que tout brille nickel
Pour quand les voisines passaient donner des nouvelles.
De Paul, Jacques et Germaine, et de leurs enfants :
Les tout derniers potins ravissaient ses tympans.
Sans oublier la cousine Berthe et ses nombreux amants.
Elle écoutait, ravie de ne rater aucun cancan.
Sa porte était toujours ouverte : chacun disait « c’est moi ! ,
Empruntait le couloir qui menait à la cuisine tout droit,
Pour prendre place autour de la toile cirée à pois.
Ça riait, se gaussait sans malice toutefois.
L’avant de la maison donnait sur l’entrée du stade.
Le jour du match, toutes au salon aux murs moutarde.
Le jeu c’était de de scruter les visages : « Regarde »,
Disait l’une, « ils ont gagné ! Ils ont l’humeur bavarde ! »
Le dimanche après-midi à quinze heures tapantes,
Place à la famille, surtout aux petits-enfants.
Tartes au riz et aux abricots immanquablement,
Suivies d’un jeu de table : agréables moments !
Quand elle est partie, la chaîne s’est cassée.
Elle a laissé un vide, celle qu’on appelait « Mamée »…
© Michel KEUKENS
Michel Keukens (1948-aujourd'hui)
Né en Belgique, Michel Keukens a 75 ans et travaille toujours à titre de traducteur de brevets européens depuis plus de 30 ans, après avoir effectué une carrière partielle d'enseignant en langues germaniques dans le secondaire.
Les mots croisés et l'écriture sont ses dérivatifs favoris qui le changent radicalement de son activité professionnelle éminemment technique !
Ni sa pensée, en vol vers moi par tant de lieues,
Ni le rayon qui court sur son front de lumière,
Ni sa beauté de jeune dieu qui la première
Me tenta, ni ses yeux - ces deux caresses bleues ;
Ni son cou ni ses bras, ni rien de ce qu'on touche,
Ni rien de ce qu'on voit de lui ne vaut sa bouche
Où l'on meurt de plaisir et qui s'acharne à mordre,
Sa bouche de fraîcheur, de délices, de flamme,
Fleur de volupté, de luxure et de désordre,
Qui vous vide le cceur et vous boit jusqu'à l'âme...
© Marie NIZET
Marie Nizet (1859-1922)
Marie Nizet est une poétesse et femme de lettres belge. Pour son recueil Pour Axel, sa sensualité et son ardeur quasi mystique, elle est considérée comme l'une des premières poétesses modernes. Son œuvre est présente dans quelques anthologies poétiques.
Après avoir publié plusieurs ouvrages (recueils, essais et nouvelles), Marie Nizet rédige Pour Axel (de Missie), dédié à son amant Cecil-Axel Veneglia. Ne souhaitant pas la publication de ces poèmes avant sa mort, elle remet le manuscrit à son amie Cécile Gilson. Georges Rency se charge de le faire publier en 1923 aux Éditions de la Vie intellectuelle. Ce recueil posthume, publié à un peu plus de mille exemplaires, se révèle audacieux et affranchi de la morale. Une telle franchise dans l'expression d'un amour sensuel est rare chez les écrivaines du XIXe siècle et rompt avec la pudeur habituelle des épanchements féminins.
Le bruit du train use la nuit,
La terre doucement gémit sous le voyage,
Sur les visages le bruit
Plaque le bleu de l’agonie.
Cette rumeur,
C’est le vent,
Sur les chemins qui fuient l’ombre des cathédrales.
Le train se roule dans la nuit
Où se tait tout le blé.
Et nous sommes les voyageurs :
Sous les paupières de l’homme écrasé en face,
Sous le pli gonflé de nos fraternités
Et dans ce carrefour de nos stupidités,
Cette rumeur,
C’est le cri des voisinages
Et des noms effacés.
Le train prie en hurlant
Pour ses abandonnés ;
Le bruit dans sa furie,
Contre toute maison,
Garde ses égarés.
© Robert ANTELME
Robert Antelme
(1917-1990)
Poète, écrivain et résistant français Robert Antelme a survécu aux camps de Buchenwald et Dachau. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont un livre de référence sur les camps de concentration nazie : L'Espèce humaine paru en 1947. En 1939, il épouse Marguerite Duras, qui travaille alors pour une maison d'édition. Pendant l'Occupation, Marguerite Duras et Robert Antelme sont membres de la Résistance. Leur groupe tombe dans un guet-apens, Marguerite Duras réussit à s'échapper aidée par Jacques Morland (nom de guerre de François Mitterrand), mais Robert Antelme est arrêté et envoyé dans un camp le 1er juin 1944. A la fin de la guerre, François Miterrand retrouve Robert Antelme et organise son retour à Paris. Il fonde, en 1945, avec Marguerite Duras, une maison d'édition, “La cité universelle”. Le couple divorce mais travaille ensemble. Il milite au Parti communiste français dont il ext exclu en 1956. Immobilisé à partir de 1983 par un accident cérébro-vasculaire, Robert Antelme meurt le 26 octobre 1990.
Mon cœur bredouille en ma poitrine
Comme une vieille horloge.
Où est
Le clair tic-tac sonnant matines
Des premiers échos ? De ton lait
O tendresse ma très humaine,
Allons, me suis-je assez gavé ?
Sans doute est-il temps que je freine
Ma vorace perversité.
Car il est mauvais de s’étendre
Sur ton corps au sable mouvant,
Belle existence, cher néant.
Tu n’auras de moi que la cendre.
Hélas, comme note saigneux,
J’aurais voulu te donner mieux.
© Georges PERROS
Georges Perros (1923-1978)
Ecrivain et comédien français, il a d'abord étudié le piano et l'art dramatique avant d'entrer à la Comédie Française. Perros emploie tour à tour l'humour et la distance au quotidien, dans des aphorismes ou des développements de quelques pages, au fil d'une langue à la fois dense et dépouillée.
Autres textes :
Il y a cent façons de mourir
Ainsi soit elle
Je n’ai pas de frères de race,
j’ai des frères de condition,
des frères de fortune et d’infortune,
de même fragilité, de même trouble
et pareillement promis à la poussière
et pareillement entêtés à servir
si possible à quelque chose,
à quelqu’un, même d’inconnu,
à quelque frère de même portée,
de même siècle, ou d’avenir…
Je n’ai pas de frères de race,
ni de religion, ni de communauté,
pas de frères de couleur,
pas de frères de guerre ou de combat,
je n’ai que des frères de Terre
secoués dans la galère
des espoirs et désespoirs
des mortels embarqués,
des frères de rêve partagés
er de peurs trop communes.
Je n’ai pas de frères de race,
j’ai des frères de condition,
bien différents et très semblables,
d’ailleurs terriblement
interchangeables
dans l’égoïsme
ou dans la compassion…
Des frères tout pétris de l’envie
de partager leur solitude avec le pain
et parfois le bonheur insigne
d’apprendre ensemble à dire non…
Je n’ai pas de frères de race,
mais des frères dans le refus
de n’être qu’un passant,
des frères par l’art et par le chant,
et l’énergie déployée chaque jour
à tenir tête au néant.
Des frères à travers les âges,
la géographie et les frontières,
- et qui sait même, au-delà de l’espèce,
peut-être un frère en tout vivant…
© Michel BAGLIN
Extrait de Un présent qui s'absente, Editions Bruno Doucey, 2013
Michel Baglin
(1950-2019)
Poète, nouvelliste, essayiste, romancier, Michel Baglin a été journaliste pendant plus de 30 ans. Il est l'auteur de plus d'une trentaine d'ouvrages publiés chez divers éditeurs. Il a également publié sous le titre Les Chants du regard un album de 40 photos deJean Dieuzaide qu’il a accompagnées de proses poétiques (éditions Privat). Parmi ses thèmes récurrents, le voyage et les faux-départs, l’univers ferroviaire, la quête du paysage, l’amour du réel malgré la difficulté à l’habiter et à être présent au monde, la recherche de l’échange avec autrui par le langage poétique, les petits bonheurs qui font la nique à la déréliction, comme « l’éclair d’un sourire dans une file d’attente ».
Autre texte :
Emblème
Je rêvais de toucher la tristesse du monde
au bord désenchanté d’un étrange marais
je rêvais d’une eau lourde où je retrouverais
les chemins égarés de ta bouche profonde
j’ai senti dans mes mains un animal immonde
échappé à la nuit d’une affreuse forêt
et je vis que c’était le mal dont tu mourais
que j’appelle en riant la tristesse du monde
une lumière folle un éclat de tonnerre
un rire libérant ta longue nudité
une immense splendeur enfin m’illuminèrent
et je vis ta douleur comme une charité
rayonnant dans la nuit la longue forme claire
et le cri de tombeau de ton infinité.
© Georges BATAILLE
Extrait de L'Archangélique et autres poèmes, 1967
Georges Bataille (1897-1962)
Ecrivain, philosophe, romancier, poète, essayiste et bibliothécaire, l'oeuvre de Georges Bataille se compose d'ouvrages de littérature, mais aussi d'anthropologie, de philosophie, d'économie, de sociologie et d'histoire de l'art. À 20 ans, il se convertit au catholicisme, et envisage de devenir prêtre. Sa passion pour l'histoire l'emporte : il rejoint finalement la capitale et entre à l'Ecole nationale des chartes.
Il fréquente alors les milieux artistiques et intellectuels parisiens. Il devient bibliothécaire à la Bibliothèque nationale de France. Souffrant de tuberculose, il n'exerce plus mais obtient un poste de conservateur à la bibliothèque de Carpentras. Là, il fonde une nouvelle revue avec Albert Camus et René Char. Bien que sa santé se détériore de plus en plus, il parvient à publier Le bleu du ciel dans lequel il décrit ses tendances nécrophiles, ainsi que La littérature et le mal et L'Erotisme. Après avoir été taxé de poète maudit, rejeté, violemment attaqué de son vivant, puis soutenu vers la fin de sa vie par un petit groupe d'intellectuels, Bataille est désormais un penseur reconnu dans le monde entier.
Et lentement l’amoureuse
Distribua ses dons :
Ici son bouquet d’extases
Et de souffles vainqueurs,
Là son antique sagesse
Et ses rumeurs d’ailes fauves.
Prenez et jouissez-en tous
Dans le tumulte des ans
Cousus sur vos épaules frêles.
Prenez et mourrez-en tous
Dans le vagissement des chairs
Qu’oblige la pointe vive du présent.
Et lentement l’amoureuse
Referma la porte lourde du tombeau,
Une pierre noire sur les yeux,
Une pierre blanche sur la bouche,
Et dans le sommeil des sexes
Enroulés sur eux mêmes
La tige du sureau tendue
Jusqu’à la clôture des temps.
Et puis son encre précieuse,
Son noir inépuisable,
Comme une semence de ténèbres
Dans le sillage des cieux.
© Jean-Luc ARIBAUD
Extraits du recueil Là où la parole se tient posée, éditions Abordo, 2019
Jean-Luc
Aribaud
(1961-aujourd'hui)
Poète et photographe, Jean-Luc Aribaud a publié chez différents éditeurs plusieurs ouvrages à travers lesquels ces deux disciplines dialoguent et se répondent suivant des sujets d’étude qui lui sont chers, comme le sacré et le profane ou la perception du réel et de la réalité dans nos sociétés modernes. Il obtenu le prix Louis Guillaume de la poésie en prose (Editions de l’Arrière Pays) et le prix international de poésie Max-Pol Fouchet (Editions du Castor Astral).
Sans feu ni lieu
Sans foi ni toit
Il erre de ville en ville
Sans papier sans aveu
Il n’a pas de frontières
Il est celui qui marche
Sans jamais perdre haleine.
Chemineau, pérégrin
Routard et sans attache
Parfois trimardeur
Mais souvent philosophe
Parfois homme de rien
Homme de cœur ou de corde
Ce n’est pas un oyseux.
Il vit de tout, de rien
Il mange ce qu’il gagne
Il trime sans relâche
Pour mériter sa croûte
Il ne tend pas la main
Car elle est trop calleuse.
Il niche sous un pont
Ou à la belle étoile.
Il s’appelle François
Il écrit des poèmes
Il se nomme charlot
Et c’est le Juif errant
C’est l’homme de la Mancha
Héros de Cervantès
Réfugié, immigré,
Parfois même un peu fou
C’est un preux chevalier
Gandhi était l’un d’eux.
© Claude DUSSERT
Claude Dussert
(1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations. Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité 9 recueils de poèmes sur plus de 22 écrits, une pièce de théâtre et deux recueils de pamphlets non édités.
Son dernier recueil Par des Chemins de Traverse est libre de lecture ou de téléchargement sur le site 'MonBestSeller.com'. Il a reçu de nombreux prix dont 2024 : Médaillé aux Jeux Floraux de Toulouse pour le 700ème anniversaire - Prix Jean Michel Renautour AIEL - 2ème Prix Jeux Floraux du Béarn et en 2025 : 2ème Prix aux Jeux Floraux de Sartrouville - 3ème Prix au Concours International de la SPAF Occitanie - Grand Prix International du Conseil Départemental du Loir et Cher décerné par AIEL (Académie de l'École de la Loire). Sans oublier en 2023 le Prix Spécial du Jury au concours Poetika.