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Le Monde de Poetika
Site & Revue de poésie en ligne
N° ISSN : 2802-1797
Dans le ciel panaché de laiteuses marbrures,
Soleil s’élève au loin, là-haut derrière la haie.
L’éblouissant reflet d’argent et de dorure
Prend une forme arquée sur le brun des halliers.
Toute une gelée blanche endimanche les près.
Et la voûte bleutée, adornée de moirure,
Donne à notre campagne une ambiance de paix
Qui s’anime de joie sous cette enluminure.
Le soleil, maintenant, a surgi au côteau
Et le matin se pare, et la voûte s’azure.
De partout, l’on entend des rhapsodies d’oiseaux.
La fraîcheur qui surprend tout mon être endormi,
Alliée du jour naissant, avive la nature.
Et me voici alors dans la gaieté, ravie.
© Monique DEVEZ VALLIENNE
Monique Devez-Vallienne
(1955-aujourd'hui)
D'origine cantalienne et retraitée de l'enseignement public, Monique Devez Vallienne a toujours aimé écrire. Elle est poétesse, romancière et nouvelliste. Elle aime les mots et la nature ; elle les réunit dans ses poèmes, qui lui viennent souvent alors qu’elle est installée au cœur d'un majestueux paysage. À travers ses rimes et ses rythmes, elle vous fait découvrir des sites indomptés dont le charme coupe le souffle, si on sait les savourer. Au fil de ses recueils, on peut réapprendre à voir, écouter, sentir et respirer dans un monde où cela s'oublie.
Elle a déjà publié plusieurs recueils ainsi que plusieurs romans dont le dernier Les silences de Rochecombe - Léonie au détour de l'amitié, est le premier tome d'une saga, publié fin août 2022.
Autres textes :
Volutes de brume sur la route du Cantal
Fleurs de printemps
Coucher de soleil sur la Marche
Son site :
→ moniquedevezvallienne.com
Connaissez-vous ce vert vallon
Qu’une source cachée arrose,
Une humble source dont le nom
Est la fontaine Mary-Rose ?
Ici, tout le jour je peux voir
Dans ce mystérieux miroir
Entouré de figuiers sauvages,
Le ciel changeant et ses nuages,
Et l’araignée au fil d’argent,
Et les papillons voltigeant
Près des joncs où les demoiselles
Sèchent leurs transparentes ailes.
Ici, je vois les moucherons
Essaimer sur les liserons ;
Ici, les troncs noueux des saules,
Les rochers baignés d’ombres molles
Prennent des formes de couleurs
Qui me ravissent jusqu’aux pleurs ;
Ici, ma lyre plus touchante
S’accorde d’elle-même et chante
La beauté, l’amitié, l’amour
Aux solitudes d’alentour ;
Ici, mon âme se repose ;
Ici, l’ombre de Mary-Rose,
Blanche, au milieu de l’herbe en fleur
Me regarde, comme une soeur.
A une âme,
Une fontaine simplement
Du nom de Mary-Rose ornée,
Et par des muses couronnée,
Où j’ai dès le commencement
Cueilli pour toi des fleurs de gloire,
Vierge, tel est le monument
Que je consacre à ta mémoire !
© Auguste SAUREL
Auguste Saurel
(1892-1976)
Ami de Frédéric Mistral, Auguste Saurel rencontre la belle Mary-Rose Carias le 15 août 1910 sur le parvis de l'église de Grans (à deux pas de Salon-de-Provence). Les deux jeunes gens ont le coup de foudre. Leur amour fut intense et platonique. Mais la belle, de santé fragile, mourut d'une méningite foudroyante quelques mois plus tard. Elle n'avait pas 16 ans. Inconsolable, Auguste lui dédia de nombreux poèmes et ne se maria jamais.
Il est l'auteur de plusieurs recueils. De cet amour est né la fontaine Mary-Rose que l'on peut voir à Grans.
Parc et fontaine Mary-Rose à découvrir ici :
→ Dans la bulle de Manou
Elle est bien vivante notre Terre.
Elle montre parfois son mauvais caractère,
Propulsant des laves de ses cratères,
Faisant disparaître des îles sous la mer,
Soulevant tout, tornade, courant d’air
S’installant là où elle était hier,
Détruisant des immeubles dont nous étions fiers,
Faisant souffrir des familles toutes entières
Les abandonnant à leur triste misère.
Elle brûle avec fureur ces forêts de conifères…
Et nous osons entamer un bras de fer
Avec notre Terre, notre mère nourricière ?
Soyons plutôt complices, mettons-y la manière
Retroussons-nous les manches, n’entrons pas en guerre
Soyons actifs, acteurs, enclenchons la première
Ne creusons pas notre demeure dernière.
Protégeons la, qu’elle soit moins meurtrière.
Chacun fait une action, apporte sa petite pierre…
Laissons à nos enfants un esprit solidaire
Qu’il fasse encore bon vivre sur notre Terre.
© Antoine QUESSON
Antoine Quesson
(1950-aujourd'hui)
Enseignant à la retraite, Antoine Quesson prend plaisir à s’exprimer avec des mots qui soignent nos maux, des mots qu'il triture, des mots qui lui parlent, des mots qu'il déforme… Que la langue française est riche de mots qui ont du sens, aussi, il est pour l’augmentation des sens, du bon sens... Il a publié plusieurs ouvrages chez TheBookEdition.
Autres textes :
Pourquoi ?
Barbare
→ Son blog
Au ciel de nuit d'un temps fraîcheur
Emportés par les vents soufflets,
A l'aube d'un matin douleur
Les parfums des instants secrets
Ravivent les chagrins regrets.
Fuyez vos blessures dérives,
Naïade des jours chapelets
Chantez l'amour, soyez eaux vives.
Le futur d'un passé menteur
Promesse des demains reflets
Sourit à l'avenir saveur.
Il est dans les instants valets,
Vassal des pétales bouquets.
Sirène des aubes natives,
Entonnez les refrains couplets,
Chantez l'amour, soyez eaux vives.
Sur la mer aux vagues couleur,
L'écume blanche des œillets
Oublie la tempête fureur.
Où mènent les chemins sommets ?
Où vont les promesses projets ?
Nymphe amante des douces rives,
A l'ombre des saules bosquets,
Chantez l'amour, soyez eaux vives.
Reine sur vos routes trajets,
Se perdent les larmes furtives.
Ondine des transes ballets,
Chantez l'amour, soyez eaux vives.
© Arnaud MATTEÏ
Arnaud Matteï
(1962-aujourd'hui)
Les poèmes sont cent, ils sont mille, ils sont uniques. Ils sont de toutes les cultures, de toutes les civilisations. Ils sont odes, ils sont sonnets, ils sont ballades. Ils sont vers, ils sont rimes, ils sont proses. Ils sont le moi, ils sont l’émoi. Ils chantent l’amour, ils disent nos peines, ils décrivent nos joies. Ils ont la force de nos certitudes, ils accompagnent nos doutes. Ils sont ceux de l’enfance, ils traversent le temps, car ils sont le temps. Ils ont la pudeur de la plume, la force d’un battement d’ailes. Ils sont ceux qui restent, ils prennent la couleur de l’encre sur le papier, sombres clairs, multicolores. Alors ces quelques mots pour la souffrance de les écrire, pour le bonheur de les dire et aussi pour la joie de les partager. Des quelques poésies de son adolescence retrouvées dans un cahier aux pages jaunies à l'aube de ses soixante ans, il se sera passé un long moment de silence. Une absence que le vide du temps ne saurait combler. Arnaud Mattéï a fait de sa vie, une vie simple et belle avec ceux qu'il aime.
Insolites
Désoeuvrées
Sous les friches
Elles se sont tues
Pour les hommes
Mais un totem
Leur intime
De parler
Sans tabou
Les failles à nu
Des forges en ruines
Se découvrent une voix
Mon oeil entend les signes
Traquent les lignes de la fuite
Les reflets dans les liquides
Je prête un sens aux revers
Aux gravats dans l'ombre
Aux hurlements muets
A la rage contenue
Des sanctuaires
Pointes et croches
Sous la peau du lierre
Dans le ciment paressent
Les masques de nos pères
© Emmanuelle RABU
Emmanuelle Rabu
(1965-aujourd'hui)
De formation littéraire et artistique, Emmanuelle Rabu enseigne un temps puis assouvit sa passion des voyages durant plusieurs années. À nouveau sédentaire, elle s’essaie à de nombreux métiers avant de renouer avec la création. Plusieurs revues littéraires relaient ses textes, dessins et peintures (FPM, Méninge, Lichen, Cabaret, The Outlaw Poetry, Litt’Orale). Ses tableaux, photo-poèmes et installations s’exposent régulièrement. 1492 – Amphores poétiques est un premier recueil de calligrammes qui mêlent intimement le dessin à l’écriture.
Son blog :
→ emmanuellerabu.wordpress.com
→ Sa page Facebook
La nuit, nous ne savons plus
si la mer est bleue ou verte,
si les algues ont froid ou chaud
dans leur maison de silence.
La nuit, nous savons seulement,
la respiration des vagues,
le sable devenu frais, comme au désert
et le ciel pareil à celui des savanes.
La nuit, nous ne saurons jamais,
le murmure des épaves
pour une étoile pressée,
quand, au-delà des dunes,
le grand forgeron déchaîne ses comètes,
quand, au-delà du temps et des eaux,
la terre s’arrondit
pour deviner le jour.
© Christian DA SILVA
Christian Da Silva
(1937-1994)
D'origine portugaise, Christian Da Silva est né à Decazeville en Aveyron. Il a exercé comme professeur de français avec un goût prononcé pour la poésie. Il a milité pour que la poésie soit étudiée en milieu scolaire. Il a fondé et animé la revue Verticales 12. Il a reçu le Prix Jean Malrieu en 1990.
Autres textes :
Un poème
L'algue
Source :
→ Le Printemps des Poètes
Le temps de saisir dans son œil
Le chat l’oiseau la rose l’abeille
Et le regard perdu d’une fille de rue
Le temps de saisir dans son nez
L’odeur puissante du goudron
Et le parfum porteur d’un nom de reine
Le temps d’orner l’oreille
D’un cri d’enfant
D’un crissement de roue
Le temps de respirer six fois
De rêver d’espérer
Et de rouler comme un galet
Dans le torrent sauvage de la vie
© Edmond DUNE
Edmond Dune
(1914-1988)
Ecrivain, poète et auteur dramatique luxembourgeois, Edmond Dune a été un écrivain aux multiples facettes, pourtant complémentaires : poésie, théâtre aphorismes, prose et traduction (de l’allemand et de l’italien). Il s'est adonné à la peinture dans les dernières années de sa vie. Il a collaboré à de nombreuses revues littéraires au Luxembourg et à l’étranger.
Association Les Amis d'Edmond Dune :
→ https://edmond-dune.lu/
→ Sa biographie sur Wikipédia
Je t’ouvre des pays qui n’ont pas de frontières
Je te présente à Dieu
Tu prends fleur dans le vent
L’oiseau bâtit son nid au creux de ton épaule
Je te poursuis encor sur la mer
C’est pour toi
Que cette main devient étoile et primevère
Et c’est pour toi
L’envol inquiétant des fenêtres
En ce moment tu viens de m’apparaître
À la place que j’occupais
A celle que j’occuperai
Pendant bien des années encor
Tu es le lierre de mon corps
Je ne veux plus te voir effrayée
Mais dormante
Et la poitrine nue
Comme un pays neigeux
Je te destine au frais tumulte de ma bouche.
© René-Guy CADOU
René-Guy Cadou
(1920-1951)
Poète français qui grandit dans une ambiance de préaux d’écoles, de rentrées des classes, de beauté des automnes, de scènes de chasse et de vie paysanne qui deviendront plus tard une source majeure de son inspiration poétique. Fils d'instituteurs, il devient lui aussi instituteur et rencontre Hélène, le grand amour de sa vie qui fut aussi l'inspiratrice de nombreux recueils. Durant l'Occupation allemande, il témoigne de son soutien à la Résistance par ses écrits et son désir de dénoncer la barbarie nazie. Il composera un nombre considérable de poèmes avant que la maladie ne l'emporte prématurément à l'âge de 31 ans.
Autres textes :
Je t'attendais
Automne
La saison de Sainte-Reine
La maison d'Hélène
Site officiel Hélène et René-Guy Cadou :
→ http://www.cadou-poesie.net/
→ Sa biographie sur Wikipédia
© Philippe FORCIOLI
Philippe Forcioli (1953-2023)
Auteur-compositeur-interprète d'origine corse, Philippe Forcioli a été élevé entre le midi de la France et Paris. Il reste attaché aux valeurs de son enfance dont les plus fortes sont justice et solidarité. Ses études scientifiques s'inscrivent dans l'évolution souhaitée par ses parents, et son sens de la famille ne s'est jamais démenti. Ce barbu à l'accent du sud n'est pas tout à fait ordinaire puisqu'en poète des temps modernes, il a déclamé Delteil, Brassens, Cadou. Amoureux de la nature, il a organisé des randos-lectures-chansons et sillonné la Corse, l'Angleterre ou l'Irlande. Son livre-testament, Les Impromptus de la Sauvegarde, rédigé sur son lit d'hôpital alors qu'il est soigné pour un cancer,
témoigne sur son expérience en milieu médical et des moments-clés de sa vie.
Guetteur mélancolique
Utopique voyageur sous le pont Mirabeau
Il regarde couler la Seine et ses amours éphémères
L’enchanteur pourrissant écrit, compose
La chanson du mal aimé… Lui voudrait être, le mâle aimé.
Annie, à son amour se déroba pour un autre quidam.
Un éclat d’obus est fiché dans cette peau trouée, il soupire ;
Madeleine ne viendra ni ce soir ni jamais
Elle attend un amant de cœur intransigeant.
Alcools, à la santé pour rien, infâme destinée
Poète assassiné, rêveur obstiné, d’amours désincarnés
Ombre de mon amour écrira-t-il un jour de grande peine
Louise ne me laisse pas seul, j’ai peur dans la tranchée
Lou, ne joue pas, j’ai peur du loup-garou
Installe-moi au berceau de tes bras
Non le chemin des dames n’est pas semé d’amour.
A Blaise qui ne peut plus faire de bras d’honneur il dit :
‘Il faut aimer l’étincelle de vie d’un coup de foudre’.
Rescapé de l’horreur. Il finira par prendre en grippe une
Espagnole tueuse de mille et cent poètes.
© Claude DUSSERT
Claude Dussert
(1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations.
Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité à compte d’auteur cinq recueils de poésie et un recueil de nouvelles. Il a également remporté de nombreux prix de poésie.
Voir aussi :
→ Anecdotes sur Guillaume Apollinaire
→ Site officiel Guillaume Apollinaire
© Laurence VIELLE
Laurence Vielle
(1968-aujourd'hui)
Actrice, metteuse en scène et écrivaine belge, Laurence Vielle aime dire les mots, surtout les écritures d’aujourd’hui. Résidant dans sa ville natale, à Bruxelles, elle a joué dans plusieurs pièces, écrit également pour le théâtre, des scénarios pour le cinéma et de la poésie. Elle a reçu de nombreux prix dont celui de la meilleure comédienne au Festival de Clermont en 1999.
© Mokhtar EL AMRAOUI
Mokhtar El Amraoui (1955-aujourd'hui)
Poète d’expression française né à Mateur, en Tunisie, Mokhtar El Amraoui a enseigné la littérature et la civilisation françaises pendant plus de trois décennies, dans diverses villes de la Tunisie. Il est passionné de poésie depuis son enfance. Il a publié quatre recueils de poésie et plusieurs de ses poèmes ont été publiés sur Internet et en revues-papier.
Aux femmes-colibris avec la force d’un aigle.
Dans un monde où l’habit fait le moine
et où l’apparence fait loi,
la douceur et le charme
passent souvent pour fragilité.
On a l’impression
que la bise va les emporter,
ces silhouettes d’oiseaux-femmes
aussi fines que le plus fin des roseaux.
On guette leurs pas hésitants,
les moindres failles dans leur voix.
Mais là, dans leurs frêles thorax,
sous leurs côtes,
c’est un volcan qui se déploie.
Le vent pourra souffler,
la tempête pourra se déchaîner,
rien ne déracinera
leurs âmes de roseaux plantées dans les nuages,
rien ne pourra porter atteinte
à leur joie, à leur force, à leur liberté,
à la puissance née de leur fragilité
d’oiseaux-femmes Amazones
d’oiseaux-flammes libérées.
Carpe Diem ! À la vie ! À la liberté !
© Parme CERISET
Parme Ceriset
Passionnée de poésie et membre de la Société des Poètes Français, rédactrice à La Cause littéraire, surnommée « la plume Amazone » pour son tempérament très indépendant et son attachement suprême à la liberté. Parme Ceriset navigue entre Lyon et le Vercors où elle puise son inspiration. Son roman autobiographique Le serment de l'espoir - Que la vie souffle encore demain paru chez L'Harmattan, fait écho à son parcours totalement atypique. Elle a grandi avec une maladie rare, a exercé en tant que médecin puis a été sauvée par une greffe des poumons après avoir passé quatre ans sous oxygène. Dans ce roman qui est une ode à la Vie, à l'Espoir, à la Nature, à la Passion, à l'Amour et à la Liberté, elle défend une conception artistique de l'existence en déroulant le récit par petites touches, comme une fresque impressionniste. Parme Ceriset est également dessinatrice. Elle est fascinée par la vie sauvage et le monde animal, par la spiritualité et son expression artistique depuis l'aube immémoriale du monde et de l'humanité. Sur le plan philosophique, elle considère la poésie, selon ses propres mots, comme "un acte de résistance contre le non-sens et la mort". Son Graal absolu est la "liberté libre" de Rimbaud, qu'elle poursuit elle aussi, parfois jusque dans les ténèbres, éclairée par le flambeau inextinguible de sa foi en la vie et en l'Amour universel. Elle se définit comme humaniste, écologiste, féministe et pacifiste. Sa devise : "N'appartiens qu'à toi-même et au souffle du vent." (Extrait de son recueil "N'oublie jamais la saveur de l'aube", 2019). Son dernier recueil Femme d'eau et d'étoiles a été publié en 2021 et vient d'être couronné du Prix Marceline Desbordes-Valmore 2021 par la Société des Poètes Français.
Entre force et lumière son geste est auguste
De ses mains de graveur il caresse le buste
Dans un piètre meublé ou dans une simple piaule
Qu’il dessine ou pétrisse la courbe d’une épaule
La cambrure d’un dos, la fermeté d’un sein
La perception d’un œil au regard sibyllin
L’amant tumultueux exorcise sa passion.
Sensuel, jouisseur, amoureux, polisson
Camille sera pour lui qu’une simple passion
La pierre devient sa muse, le marbre son pygmalion.
L’Académie des arts, trois fois le refoula
La sculpture, mon ami, n’est pas faite pour toi
Et bien que couronné comme "le bouc sacré"
C’est vers les bons pères qu’il croit trouver la paix.
Mais la nature bientôt reprend vite ses droits
Volage et infidèle il cumule à la fois
Aventures amoureuses et études de l’art
Dans l’Italie de Dante il se plait et s’égare.
Il est reconnu maître de l’art "in finito"
Il peaufine ses œuvres tel un peintre ses tableaux.
Les commandes affluent, les expos le réclament
Ses œuvres respirent la vie, on les dirait moulées
A même l’académie des corps fins, sculptés
La cabale n’est pas loin qui honnit ceux qui gagnent
Ses détracteurs seront les dindons de la farce.
Son art est au zénith il modèle les corps
Et leur confère une âme, une vie en accord
Il n’aime qu’en pointillé, ah ! Le bouc sacré.
C’en est dit, il épouse sa première conquête
Qui à chaque retour ne lui fait pas la tête
Elle meurt dans ces bras, il en est tout pantois
Il ne lui survivra à peine plus de six mois.
© Claude DUSSERT
Claude Dussert
(1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations.
Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité à compte d’auteur cinq recueils de poésie et un recueil de nouvelles. Il a également remporté de nombreux prix de poésie.
© Maurice ROLLINAT
Maurice Rollinat
(1946-1903)
Poète, musicien et interprète français, Maurice Rollinat a écrit ses premiers poèmes en 1870, encouragé par George Sand. Ses textes, allant du pastoral au macabre en passant par le fantastique, lui valent une brève consécration en 1883. Tourmenté, souffrant de névralgies, il se retire dans la Creuse où il continuera son oeuvre littéraire. Au décès de sa compagne, il tente plusieurs fois de se suicider. Malade (probablement d'un cancer), il est hospitalisé à Ivry où il meurt à l'âge de 56 ans.
Jamais je n'oublierai
Tes mots
Semés sur mes paupières heureuses
Dans ce nid à l'orée de ton bois
Dans ce lit qui n'en était pas un
Ce lit où le sommeil était une évidence
Après l'amour souvent
Jamais je n'oublierai
Ton regard d'océan au milieu des feuilles d'arbres
Ton sourire contagieux
Ta simplicité qui
Bien souvent s'énervait
Sur de simples broutilles
Et pourtant toujours là dans le creux de nos bras
© Flora DELALANDE
Flora Delalande
Auteure et animatrice spécialisée en
écriture et plantes sauvages comestibles et médicinales, Flora Delalande est tombée en amour avec la poésie.
Après avoir publié son premier recueil de poèmes en 2011, elle crée avec de jeunes poètes l’association Le Temps des Rêves.
Dès ses débuts, elle cherche à mêler les arts entre eux. En 2013, attirée par l’oralité et désireuse de partager le plus intimement possible son art avec le public, elle se lance dans la création de spectacles. Naissent alors des duos poétiques et musicaux, des pièces collectives et des performances totales faisant intervenir la peinture, la danse, la musique et le chant autour de ses poèmes.
En parallèle, elle continue à publier des livres et arpente les contrées nouvelles du livre pauvre et du livre d'artiste.
J’ai demandé souvent
Ecoutant la Clameur
D’où venait l’âpre chant
Le doux chant des Rameurs.
Un soir, j’ai demandé aux jacassants corbeaux
Où allait l’âpre chant, le doux chant des Bozos,
Ils m’ont dit que le Vent, messager infidèle
Le déposait tout près dans les rides de l’Eau ;
Mais que l’eau désirant demeurer toujours belle
Efface à chaque instant les replis de sa peau.
J’ai demandé souvent
Ecoutant la Clameur
D’où venait l’âpre chant
Le doux chant des Rameurs.
Un soir, j’ai demandé aux verts Palétuviers
Où allait l’âpre chant des Rudes Piroguiers ;
Ils m’ont dit que le Vent, messager infidèle
Le déposait très loin, au sommet des palmiers ;
Mais que tous les palmiers ont les cheveux rebelles
Et doivent tout le temps peigner leurs beaux cimiers.
J’ai demandé souvent
Ecoutant la Clameur
D’où venait l’âpre chant
Le doux chant des Rameurs.
Un soir, j’ai demandé aux complaisant Roseaux
Où allait l’âpre chant, le doux chant des Bozos,
Ils m’ont dit que le Vent, messager infidèle
Le confiait là-haut, à un petit oiseau ;
Mais que l’Oiseau, fuyant dans un furtif coup d’ailes,
L’oubliait quelquefois dans le ciel indigo.
Et depuis, je comprends
Ecoutant la Clameur
D’où venait l’âpre chant
Le doux chant des Rameurs.
© Birago DIOP
Extrait du recueil Leurres et lueurs, Editions Présence Africaine, 1960
Birago Diop
(1906-1989)
Poète et conteur sénégalais, Birago Diop avait restauré l'intérêt général pour les contes africains et avait été promu au rang des plus grands écrivains africains francophones. Vétérinaire de formation, diplomate et porte-parole du mouvement littéraire de l'Afrique Noire, Diop est un exemple de "l'homme de la Renaissance africaine".
Mes nuits sont tressées de rêves
Doux comme le vin nouveau
J’ai rêvé que les fleurs des arbres tombaient
M’enveloppaient, me recouvraient.
Et toutes ces fleurs devenaient des baisers
Brûlants comme le vin rouge
Et tristes comme des papillons de nuit qui savent
Qu’ils devront s’éteindre dans le faux-semblant de la mort
Mes nuits sont tressées de rêves
Lourds comme le sable fatigué
J’ai rêvé que, des arbres mourants,
Les feuilles tombaient dans ma main.
Et toutes ces feuilles devenaient des mains
Qui caressaient comme un sable mouvant
Et étaient fatiguées comme des papillons qui savent
Qu’ils finiront avant le rayon du soleil
Mes nuits sont tressées de rêves
Bleus comme le mal d’amour
J’ai rêvé que de tous les arbres tombaient
Des flocons de neige qui tintinabulaient
Et tous ces flocons devenaient des larmes
Que j’ai pleurées chaudement –
Comprends mes rêves, mon amant,
Ils sont tous pleins de désir pour toi.
8 novembre 1941
© Selma MEERBAUM-EISINGER
Traduit de l'allemand par Marc Sagnol
Selma Meerbaum-Eisinger
(1924-1942)
Poétesse germanophone, cousine germaine de Paul Celan, Selma Meerbaum-Eisinger est décédée le 16 décembre 1942 dans le camp de travaux forcés de Michailowka en Ukraine qui, en tant que juive victime de persécutions, mourut du typhus à dix-huit ans. Son œuvre est souvent classée parmi la Littérature-monde. L’œuvre de Selma Merbaum est composée de 58 poèmes, qu'elle a écrits soigneusement au stylo chacun sur une page puis reliés en un album intitulé Blütenlese [Anthologie]. Les poèmes de Selma Merbaum qui ont pu être sauvés traitent avant tout de romances impressionnistes, d'élégie à la nature d'une maîtrise stylistique remarquable, imprégnée de mélancolie.
Le vent,
dans les terres sans eau de l’été, nous
quitte sur une lame,
ce qui subsiste du ciel.
En plusieurs fractures, la terre se précise. La terre demeure stable dans le souffle qui nous dénude.
Ici, dans le monde immobile et bleu, j’ai presque atteint ce mur.
Le fond du jour est encore devant nous.
Le fond embrasé de la terre.
Le fond et la surface du front,
aplani par le même souffle,
ce froid.
Je me recompose au pied de la façade comme l’air bleu au pied des labours.
Rien ne désaltère mon pas.
© André du BOUCHET
Extrait de " Dans la chaleur vacante ", Editions Mercure de France, 1959
André du Bouchet
(1924-2001)
Poète français, André du Bouchet passe son enfance en France jusqu'à la débâcle qui le jette sur les routes avec sa famille puis s'exile aux Etats-Unis, et devient professeur. De retour en France en 1948, il publie des textes critiques et ses premiers écrits poétiques paraissent en 1950. Sa poésie exigeante, réfractaire à tout embrigadement, s’inscrit dans le sillage de Stéphane Mallarmé et voisine avec celle de Pierre Reverdy ou René Char ; elle ouvre sur un paysage dans lequel erre l’homme, hiératique et pourtant central. Il est le cofondateur en 1967, avec Yves Bonnefoy et Jacques Dupin de la revue L’Éphémère, qui accueille des poètes comme Philippe Jaccottet ou Paul Celan.
© Giampiero NERI
Giampiero Neri
(1927-2023)
[Vrai nom : Giampiero Pontiggia]
Poète italien, Giampiero Neri était connu pour son style roman ; son œuvre est connue pour son style concis, sec et sans fioritures, et veiné de mélancolie et d'humour. Son œuvre était souvent écrite en prose. En 2019, il a reçu le prix de poésie du Cilento pour sa brillante carrière.
Assise, la fileuse au bleu de la croisée
Où le jardin mélodieux se dodeline ;
Le rouet ancien qui ronfle l'a grisée.
Lasse, ayant bu l'azur, de filer la câline
Chevelure, à ses doigts si faibles évasive,
Elle songe, et sa tête petite s'incline.
Un arbuste et l'air pur font une source vive
Qui, suspendue au jour, délicieuse arrose
De ses pertes de fleurs le jardin de l'oisive.
Une tige, où le vent vagabond se repose,
Courbe le salut vain de sa grâce étoilée,
Dédiant magnifique, au vieux rouet sa rose.
Mais la dormeuse file une laine isolée ;
Mystérieusement l'ombre frêle se tresse
Au fil de ses doigts longs et qui dorment, filée.
Le songe se dévide avec une paresse
Angélique, et sans cesse, aux doux fuseaux crédule,
La chevelure ondule au gré de la caresse...
Derrière tant de fleurs, l'azur se dissimule,
Fileuse de feuillage et de lumière ceinte :
Tout le ciel vert se meurt. Le dernier arbre brûle.
Ta sœur, la grande rose où sourit une sainte,
Parfume ton front vague au vent de son haleine
Innocente, et tu crois languir... Tu es éteinte
Au bleu de la croisée où tu filais la laine.
© Paul VALÉRY
Paul Valéry
(1871-1945)
Ecrivain, poète et philosophe français, Paul Valéry effectue un début de carrière dans l'ombre, secrétaire particulier d'Edouard Lebey, fonction qui lui laisse le loisir de l'étude, la recherche et des rencontres avec le milieu artistique et littéraire de l'époque. Ce n'est qu'au sortir de la Première guerre mondiale, à l'abord de la cinquantaine, que sa célébrité éclate en tant que poète avec la publication de La Jeune Parque. Il devient dès lors immensément célèbre en tant qu'intellectuel et homme de lettres.
© Louis ARAGON
Louis Aragon
(1873-1914)
Poète et romancier français, il participe au mouvement dadaïste et surréaliste aux côtés d'André Breton. En 1928, sa rencontre avec Elsa Triolet, l'amour de sa vie, lui inspirera de nombreux poèmes. Bon nombre de ses textes ont été mis en musique par Léo Ferré ou Jean Ferrat.
© Charles PÉGUY
Charles Péguy
(1873-1914)
Ecrivain, poète et essayiste, Charles Péguy est mort pour la France le 5 septembre 1914, le premier jour de la première bataille de l'Ourcq. Son œuvre, multiple, comprend des mystères d'inspiration médiévale en vers libres et des recueils de poèmes en vers réguliers. Intellectuel engagé, après avoir été militant socialiste libertaire, anticlérical, puis dreyfusard au cours de ses études, il se rapproche à partir de 1908 du catholicisme et du nationalisme. Le noyau central et incandescent de toute son œuvre réside dans une profonde foi chrétienne qui ne se satisfaisait pas des conventions sociales de son époque.
© Renan LUCE
Extrait de l'album "Repenti"
Renan Luce
(1980-aujourd'hui)
Auteur-compositeur-interprète, il rencontre le succès en France avec son Album Repenti en 2006 et sa chanson La Lettre.
Moi aussi, je chante l’Amérique.
Je suis le frère à la peau sombre.
Ils m’envoient manger à la cuisine
Quand vient du monde.
Mais je ris,
Et je mange bien,
Et je prends des forces.
Demain,
Je serai à la table
Quand viendra du monde.
Personne,
Alors,
N’osera me dire
« Va manger à la cuisine ».
De plus,
Ils verront comme je suis beau
Et ils auront honte —
Moi, aussi, je suis l’Amérique.
© Langston HUGHES
Langston Hughes
(1902-1967)
Poète, nouvelliste et écrivain américain, Langston Hughes participera au journal étudiant de son école de Cleveland (Ohio) et écrira ses premières nouvelles, poésies et pièces de théâtre. Sorti de son université à Columbia, en 1922, il privilégiera les joies de la rue d'Harlem à sa scolarité. Pour vivre, il cumule les petits boulots. Ses études à l'université de Lincoln lui permettent d'obtenir un doctorat en littérature en 1943. Il effectue ses premiers travaux d'écriture en tant que journaliste et publie ses premiers recueils. Sa renommée est due en grande partie à son implication dans le mouvement culturel communément appelé Renaissance de Harlem qui a secoué Harlem dans les années 1920.
Sans même se retourner partir pour oublier
Les instants d’une vie et les tracas aussi.
Partir pour éviter que le train qui nous mène
D’un seul coup nous amène les valises à la main
Vers un autre destin.
D’un coucher de soleil
Où rien n’est plus pareil
Sur une plage d’écume bercée par un éclat de lune
Partir et oublier.
Partir
Les yeux vers l’horizon rivés sur le néant
Une pluie d’étincelles illuminant le ciel.
Partir mais sans partir
Comme la vague au rocher caressante à souhait
Dans les plus beaux soupirs des moments de faiblesse
À l’ivresse des caresses un élan qui s’arrête puis soudain recommence
Comme les pas d’une danse.
Partir et revenir sans jamais le trahir.
Partir sans toi ne serait pas partir
C’est comme un peu partir sans moi
Mon cœur entre tes doigts.
D’un coucher de soleil où rien n’est pareil
D’un rayon de lune sur le lit d’une dune
Que ces éclats dérivent et soudain nous enivrent
T’amenant jusqu’à moi dans un divin désir
Partager avec toi des moments de plaisir.
© Tony RICHARD
Tony Richard (1950-aujourd'hui)
Né à Coblence d'un père militaire et d'une mère bretonne, Tony Richard a d'abord exercé le métier de pâtissier pendant une vingtaine d'années puis a été enseignant pendant 30 ans. Une carrière bien remplie pour ce voyageur qui a sillonné la France, de Paris à Cagnes-sur-Mer en passant par Boulogne, Limoges et bien d'autres contrées. Il a également voyagé en Chine et au Japon. Ecrivain sur le tard et passionné de poésie, il a publié plusieurs recueils, à découvrir sur son blog.
Marcel
Michel
Marcel Michel a toujours voyagé en écriture. Depuis 2013, il couche sur le papier son monde intérieur foisonnant. Son dernier recueil est rempli des sons d’une nature vivante, de réflexions sur l’homme et sur les choses qui nous entourent et que l’on ne perçoit plus. Ouvrage où la beauté, de poème en poème, pose sa touche délicate.
Oud : luth à cordes pincées très répandu dans les pays du Maghreb, en Turquie, en Grèce et en Arménie
© Mokhtar EL AMRAOUI
Extrait de "Le souffle des ressacs"
Mokhtar El Amraoui (1955-aujourd'hui)
Poète d’expression française né à Mateur, en Tunisie, Mokhtar El Amraoui a enseigné la littérature et la civilisation françaises pendant plus de trois décennies, dans diverses villes de la Tunisie. Il est passionné de poésie depuis son enfance. Il a publié quatre recueils de poésie et plusieurs de ses poèmes ont été publiés sur Internet et en revues-papier.
Dans cette chienne de vie
j'ai préféré tirer la chasse,
tirer la langue
et le diable par la queue
que de tirer du gun
ou de tirer des chèques
sur le malheur des autres.
J'ai préféré passer l'éponge,
passer mon tour,
passer les bornes,
passer pour fou
que de passer tout droit.
Mais cette chienne de vie
est parfois si jolie
(merci Prévert)
sans collier sans licou,
les deux pieds dans la vase
et le poil au soleil.
Quand on m'aura dompté,
dressé, salarié,
je ne serai plus
qu'un masque sans visage,
une ride sans voix,
un habit sans personne,
un corps en location,
un coeur à la consigne,
une âme en peine.
Je veux rester sans nom
au milieu de la foule
et faire l'accolade
à tous ceux qui s'égarent.
Je veux rester rebelle
et me refaire une vie
hors des sentiers battus,
Je veux planter ma tente
au milieu de l'orage
et faire d'un volcan
un oasis de paix,
de la peur une armure
et de l'angoisse un feu
pour réchauffer la vie.
Je veux rester debout
pour une femme qui passe
mettant le feu au cul
et la main à la pâte.
Je veux rester vivant
pour une femme qui chante
et rallume à ma queue
le désir des voyous.
© Jean-Marc LA FRENIÈRE
Jean-Marc
La Frenière
(1948-2023)
Né au Québec dans la vallée du Richelieu, Jean-Marc La Frenière, poète de rue, a distribué sa poésie par l’intermédiaire des itinérants. Puis sur Internet, il a participé à des groupes d'écriture collective puis a publié dans des revues.
Sous la brise du large, au déclin du soleil,
Les cocotiers géants bercent leurs chevelures ;
Leurs palmes doucement vibrent au soir vermeil
Ainsi qu’en haut des mâts de chantantes voilures.
Le refrain de la mer, à leur chanson, pareil
Glisse sur le rivage aux blanches dentelures
Un soupir doux et frais qui hante le sommeil
Des sables endormis à l’ombre des ramures…
Mais qu’elle est, tout à coup, cette voix dans la nuit
Qui livre ses accents au murmure des palmes
Et qui semble, à la mer, dire un profond ennui ?
Est-ce de l’au-delà un faible écho qui meurt
Avec la blanche lame au pied des rives calmes
Ou la tristesse en moi qui fait pleurer mon cœur ?
© Alcide BARET
Alcide Baret
(1914-1959)
Poète et écrivain réunionnais, Alcide Baret était instituteur à la Rivière Saint-Louis. Il obtient plusieurs prix de poésie et fréquente les poètes de l'île. Il est fondateur de la revue Trait d'union, et édite son premier recueil Primes accords en 1949. Il devient membre de l'Académie de la Réunion et fait partie de la Société des poètes français à Paris. Ne survivant pas au décès brutal de son épouse, il décède à l'âge de 45 ans et laisse une oeuvre poétique inachevée.
La pluie
au creux de ta main
songe s’ouvre
l’oiseau
que flèche le vent
tient debout
le mot qui de loin t’inspire l’étoile caravelle
pleure pas tes esclavages
âge ancien
© Boris GAMALEYA
Boris Gamaleya
(1930-2019)
Né à Saint-Louis de La Réunion, Boris Gamaleya est un poète, écrivain et dramaturge français. Enseignant dans différents collèges de l'île, il milite dans le Parti communiste réunionnais et se passionne pour la culture populaire. L'ordonnance Debré le contraint avec son épouse et d'autres fonctionnaires d'Etat, à quitter l'île et il devient enseignant en région parisienne. Durant cet exil de douze années, il commence l’écriture de ses poèmes d’exil et de combat qui seront publiés plus tard. Après une grève de la faim, il parvient à rejoindre l'île et y sera enseignant jusqu'à 1985. Il publie son premier livre Vali pour une reine morte en 1973, long poème épique à la fois lyrique et dramatique. De retour en France en 2012 avec son épouse, il s'installe à Barbizon.
Ton regard couleur de fleuve
Est l'eau docile et qui change
Avec le jour qu'elle abreuve.
Petit matin, Robe d'ange
Un pan du manteau céleste
Sous tes cils, entre les rives
S'est pris. Coule, coule eau vive.
La nuit part, mais l'amour reste
Et ma main sent battre un cœur.
L'aube a voulu parer nos corps de sa candeur.
Fête-Dieu.
Le désir matinal a repris nos corps nus
Pour sculpter une chair que nous avions cru lasse.
Sur les fleuves au loin déjà les bateaux passent.
Nos peaux après l'amour ont l'odeur du pain chaud.
Si l'eau des fleuves est pour nos membres,
Tes yeux laveront mon âme ;
Mais ton regard liquide au midi que je crains
Deviendra-t-il de plomb ?
J'ai peur du jour, du jour trop long
Du jour qu'abreuve ton regard couleur de fleuve
Or dans un soir pavé pour de jumeaux triomphes
Si la victoire crie la volupté des anges,
Que se révèle en lui la Majesté d'un Gange.
© René CREVEL
René Crevel
(1900-1935)
Ecrivain et poète surréaliste, René Crevel a fait des études de lettres et de droit à la Sorbonne mais délaisse les cours pour la lecture ou les discussions avec des artistes. Son père se suicide alors qu'il a 14 ans : cet évènement marquera profondément sa vie. Il fait la connaissance d'André Breton en 1921 et rejoint les surréalistes. Exclu du mouvement en 1925, il se tourne vers le dadaïsme. En 1926, il est atteint de tuberculose. Il s'investit beaucoup dans l'organisation du "Congrès international des écrivains pour la défense de la culture" de 1935, mais suite à une altercation, il est exclu du congrès. Apprenant qu'il souffre d'une tuberculose rénale alors qu'il se croyait guéri, il se suicide au gaz dans son appartement, après avoir griffonné sur un papier « Prière de m'incinérer. Dégoût ».
J'aurai encore laissé passer l'hiver
Sans refaire la charpente mangée aux vers
Et ni enfin écrire cette lettre
Sur l'amour, sur le vide rongeant l'être
J'aurai aimé mal, très, toutes mes femmes
Mal entretenu tous mes feux et flammes
Je n'aurai pas vu le mot sous la porte
Mais j'aurai hurlé dans des sonos mortes
J'aurai mal parlé pour mes espérances
Dépensé tout le bien de mes parents
Dans toutes les danses perdu mon pas
Fait le coup de poing où il fallait pas
J'aurai convoqué les mots et les dieux
Sans retenir l'eau crevant le barrage
Ni les poissons d'or sautant dans tes yeux
Ni la silhouette avec son bagage
J'aurai attendu longtemps l'aube et l'homme
Puis je me serai endormi trop tôt
Quand j'étais peut-être l'aube et cet homme
J'ai froid dans mon manteau
La nuit se dévide et le soleil fond
Et j'aurai laissé courir sur son aire
Le beau bateau. Il est échoué sur les hauts-fonds
De tes yeux, ton silence, ton désert !
J'aurai laissé mon fils comme un voleur
Fuir par la porte étroite sous mon cœur
S'en alla chercher une balle au front
Mon petit combattant, ma ressemblance…
J'aurai toujours pris la vie de très haut
Et sans avoir pas trahi père et mère
J'aurai laissé par le carreau cassé entrer l'hiver
J'aurai laissé mourir de froid tous mes oiseaux
© Jacques BERTIN
Jacques Bertin (1946-aujourd'hui)
Chanteur, poète et journaliste français, Jacques Bertin est un artiste à contre-courant de la variété à partir de la seconde moitié des années 1960 et son œuvre n'aura jamais les faveurs des médias ni du grand public. Artiste sans compromissions, ses chansons sont partagées entre une inspiration politique et une autre éminemment poétique. Il a obtenu deux fois le Grand Prix du Disque de l'Académie Charles-Cros durant sa carrière.
La tribu prophétique aux prunelles ardentes
Hier s’est mise en route, emportant ses petits
Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits
Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes.
Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes
Le long des chariots où les leurs sont blottis,
Promenant sur le ciel des yeux appesantis
Par le morne regret des chimères absentes.
Du fond de son réduit sablonneux le grillon,
Les regardant passer, redouble sa chanson ;
Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,
Fait couler le rocher et fleurir le désert
Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert
L’empire familier des ténèbres futures.
© Charles BAUDELAIRE
Charles Baudelaire
(1821-1867)
Connu pour sa vie de bohême et poète torturé, il ne publia de son vivant qu'une seule oeuvre "Les Fleurs du Mal", recueil qui fut condamné et censuré dès sa sortie en 1857 car trop choquant pour la morale bourgeoise avant de passer à la postérité. Criblé de dettes, il séjournera durant deux ans en Belgique (1864-1866) pour y donner des conférences mais sa santé se dégrade. Il revient à Paris où il meurt un an plus tard à l'âge de 46 ans des suites de la syphilis, d'abus d'alcool et autres drogues.
Où a-t-on trouvé le corps mort ?
Qui a trouvé le corps mort ?
Le corps était-il mort quand on l’a trouvé ?
Comment a-t-on trouvé le corps mort ?
Qui était le corps mort ?
Qui était le père ou la fille ou le frère
Ou l’oncle ou la sœur ou la mère ou le fils
Du corps mort et abandonné ?
Le corps était-il mort quand on l’a abandonné ?
Le corps était-il abandonné ?
Par qui a-t-il été abandonné ?
Le corps mort était-il nu ou en costume de voyage ?
Quelle raison aviez-vous de déclarer le décès du corps mort ?
Avez-vous déclaré la mort du corps mort ?
Quels étaient les liens avec le corps mort ?
Comment avez-vous su la mort du corps mort ?
Avez-vous lavé le corps mort
Lui avez-vous fermé les deux yeux
Avez-vous enterré le corps
L’avez- vous laissé abandonné
Avez-vous embrassé le corps mort
© Harold PINTER
Harold Pinter
(1930-2008)
Ecrivain, dramaturge, scénariste et metteur en scène britannique, Harold Pinter était aussi un grand voyageur. Il a écrit pour le théâtre, la radio, la télévision et pour le cinéma. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 2005.