Le printemps à ma porte
Ephémère
Il est passé le grand Présent
Dans son costume en préambules
Coiffé de rubans, de bidules
De toutes sortes d'ornements
Vous voulez croire au printemps
Aux fleurs jaunes et passagères
Aux moutons confiés aux bergères
A ceux du ciel en mouvements
Les yeux ouverts sur chaque instant
Les mots nous servent de viatique
Parés de leurs tenues ludiques
Lorsque la vie flanche et se tend
Coiffé de plumes et de turbans
Le grand Présent se joue de nous
Il n'y aura pas de rendez-vous
Car rien n'arrêtera le temps !
© Marine DUSSARRAT
Marine Dussarrat (1936-aujourd'hui)
D'origine landaise, Marine Dussarrat vit en Béarn. Elle a écrit plusieurs recueils de poésie et participe régulièrement dans la revue Lichen et sur le blog de L'Herbier de poésie. Elle a également remporté plusieurs prix de poésie.
Son blog : → https://emprises-de-brises.over-blog.com/
Le cueilleur de muguet
Empreintes d'avril
Quand de temps à autre, un mot se retourne
Pour chasser les ronces du vent glacé,
Les touffes de soleil que je contourne
Éloignent l’hiver déjà défroqué.
…
Et avril qui secoue chaque ligne
Laisse ses empreintes au soir couchant.
Au ciel, le silence devient plus digne,
Car il comble les astres de son chant.
…
A peine si les rameaux des voyelles
Fertilisent un printemps attendu.
Sur nos chemins herbeux, des ribambelles
De fleurs se serrent, de jaune vêtu.
…
Vers l’océan, où le ressac défroisse
Nos cœurs engourdis, j’entends le fracas
Du clocher qui appelle en sa paroisse
L’odeur suave du futur lilas.
…
Le matin fardé de mauve tricote
Des rêves que je suspends à ta peau.
Tes doigts se parfument de bergamote
Quand tes lèvres deviennent mon radeau.
…
A la saison qui égoutte ses branches,
Les rosiers sauvages offrent l’espoir.
La lune neuve retrousse ses manches,
Et l’amour est au bout de ce couloir.
C'est le joli printemps
C’est le joli printemps
Qui fait sortir les filles,
C’est le joli printemps
Qui fait briller le temps.
J’y vais à la fontaine,
C’est le joli printemps,
Trouver celle qui m’aime,
Celle que j’aime tant.
C’est dans le mois d’avril
Qu’on promet pour longtemps,
C’est le joli printemps,
Qui fait sortir les filles.
La fille et le galant,
Pour danser le quadrille.
C’est le joli printemps
Qui fait briller le temps.
Aussi, profitez-en,
Jeunes gens, jeunes filles ;
C’est le joli printemps
Qui fait briller le temps
Car le joli printemps,
C’est le temps d’une aiguille.
Car le joli printemps
Ne dure pas longtemps.
Printemps
Tout s'éclaire et tout s'illumine,
L'aube devient purpurine ;
Quand apparaît sur l'horizon
Le disque d'or et son dos rond !
Tout s'éveille dans la ramure,
Le silence devient murmure ;
Au sol, les perles de rosée
Prennent leurs couleurs diaprées !
Dans un coin sur l'herbe posée,
La dentelle d'une toile d'araignée ;
Ondule mystérieusement
Sous la douce brise du vent !
De l'arbre qui reverdit,
S'élève une pleine harmonie ;
Où merle moqueur et oiseaux
Chantent le printemps nouveau !
La trémière sous le soleil,
Découvre ses boutons vermeils ;
Sur l'un d'entr'eux, ouvrant ses ailes
S'envole une coccinelle !
L'air est joyeux, l'azur résonne,
Tout frissonne et tout reverdit ;
Dans le ciel le soleil rayonne
Quand la lune s'est assoupie !
Tout revit et s'éveille avec grâce,
L'hiver repart silencieusement ;
Encore une saison qui passe
Pour accueillir le gai printemps !
Dans la prairie pousse la pâquerette,
Le bouton d'or s'est réveillé ;
Dans le lilas chante la fauvette
Sur le joli muguet de mai !
La plaine résonne de mille bruits,
Les oiseaux chantent, le ciel sourit ;
Tout est bien plus gai, plus charmant
Lorsque nous revient le printemps !
Au retour de zéphire
Un beau jour s’aventure à la buée blême
Des hautes fenêtres fermées sur l’extérieur
Qui a mis la vêture d’hiver, gelant de flemme
Nos ardeurs désarmées d’enfants par trop rieurs.
Timides et jeunes fleurs, tendres et frêles bourgeons
S’invitent ici ou là comme douces prémices
Au retour des chaleurs qui verront, sans malice,
Nos corps venir las de jeux fous de sauvageons.
Il va finir le temps de l’hiver qui grésille :
Alors qu’un vert printemps plante ses banderilles,
Qu’arbre remet ses hardes, Borée encor’ trompe.
Si de folles pensées tardent à fleurir le sol,
L’air se fait de miel et les nuages s’estompent
Dans le bleu du ciel sillonné de vols…
Printemps de Bretagne
Une aube de douceur s'éveille sur la lande :
Le printemps de Bretagne a fleuri les talus.
Les cloches de Ker-Is l'ont dit jusqu'en Islande
Aux pâles « En-Allés » qui ne reviendront plus.
Nous aussi qui vivons et qui mourrons loin d'elle,
Loin de la douce fée aux cheveux de genêt,
Que notre cœur au moins lui demeure fidèle :
Renaissons avec elle à l'heure où tout renaît.
Ô printemps de Bretagne, enchantement du monde !
Sourire virginal de la terre et des eaux !
C'est comme un miel épars dans la lumière blonde :
Viviane éveillée a repris ses fuseaux.
File, file l'argent des aubes aprilines !
File pour les landiers ta quenouille d'or fin !
De tes rubis. Charmeuse, habille les collines ;
Ne fais qu'une émeraude avec la mer sans fin.
C'est assez qu'un reflet pris à tes doigts de flamme,
Une lueur ravie à ton ciel enchanté,
Descende jusqu'à nous pour rattacher notre âme
A l'âme du pays qu'a fleuri ta beauté !
Le moulin au printemps
Le chaume et la mousse
Verdissent les toits ;
La colombe y glousse,
L'hirondelle y boit ;
Le bras d'un platane
Et le lierre épais
Couvrent la cabane
D'une ombre de paix.
La rosée en pluie
Brille à tout rameau ;
Le rayon essuie
La poussière d'eau ;
Le vent qui secoue
Les vergers flottants,
Fait sur notre joue
Neiger le printemps.
Printemps du Nord
Linotte
Qui frigotte,
Dis, que veux-tu de moi ?
Ta note,
Qui tremblote,
Me met tout en émoi.
Journée
Illuminée,
Soleil riant d'avril,
En quel songe
Se plonge
Mon cœur, et que veut-il ?
Sur la haie,
Où s'égaie
Le folâtre printemps,
La rosée,
Irisée,
Sème ses diamants.
Violette
Discrète,
Devant Dieu tu fleuris ;
Primevère,
A la terre,
Bouche d'or, tu souris.
Petite
Marguerite,
Conseillère du cœur,
Ta couronne
Mignonne
Epèle mon bonheur.
Blanche et fine
Aubépine,
A tes pieds, la fourmi
Déjà teille
Et réveille
Son brin d'herbe endormi.
La mousse
Qui repousse
Attend l'or du grillon ;
La rose,
Fraîche éclose,
Rêve au bleu papillon.
Mais, fidèle
Hirondelle,
Au nid toi qui reviens,
La tristesse
M'oppresse...
Où donc sont tous les miens ?
L'eau sans ride
Et limpide
Ouvre de ses palais,
Où tout brille
Et frétille,
Les réduits les plus frais.
Sur la branche
Qui penche,
Vif, l'écureuil bondit ;
La fauvette
Coquette
Se lustre dans son nid.
La grue
En l'étendue
A glissé, trait d'argent ;
Dans l'anse
Se balance
Le cygne négligent.
La follette
Alouette,
Gai chantre des beaux jours,
Dans l'azur libre
Vibre,
Appelant les amours.
Journée
Illuminée,
Soleil riant d'avril,
En quel songe
Se plonge
Mon cœur, et que veut-il ?
Dans l'onde
Vagabonde,
Aux prés, sur les buissons,
Sous la ramée
Aimée,
Aux airs, dans les sillons,
Tout tressaille
Et travaille,
Germe, respire et vit,
Tout palpite
Et s'agite,
Va, chante, aime et bénit.
Mais mon âme
Est sans flamme...
Beaux jours en vain donnés,
Nature
Calme et pure,
Ô printemps, pardonnez !
Linotte
Qui frigotte,
Dis, que veux-tu de moi ?
Ta note
Qui tremblote
Met mon cœur en émoi.