Ecrire des vers à vingt ans, c'est avoir vingt ans.
En écrire à quarante, c'est être poète.
Francis Carco

La poésie voit rouge !
Indignation, révolte & révolution...



Quand France rime avec violence
Jacky COURALET

y
Ô pays que Trenet appelait douce France,
Tu es défiguré par des mois de violence,
Des règlements de compte aux manifestations,
La douceur a donné chez toi sa démission.
A Paris et ailleurs tout un peuple défile,
Contre une loi qu’il juge injuste et inutile,
Mais sa lutte est gâchée par quelques trublions,
Qu’anime seulement l’instinct de destruction ;
Venus de nulle part quatre ou cinq jeunes hommes,
Se prennent pour Néron mettant le feu à Rome,
Mais à l’heure où le sang s’unit avec le feu,
Dans la rue déambule un couple incestueux.
Grenades et pavés s’échangent et injures,
Puis l’on compte les points, surtout ceux de suture,
Ô foule disparate où se mêlent voyous
Et gens de bien venus pour vivre jusqu’au bout.
Parfois c’est bon enfant, c’est Paris promenade,
Gavroche d’aujourd’hui chante entre les grenades,
La marche, d’aucuns croient, ne finira jamais,
Qui rappelle aux anciens un certain mois de mai.
Un jeune est éborgné, une fliquette tombe,
L’hôpital d’aujourd’hui demain sera la tombe ;
Mais gronde le public entre bruit et fureur,
Et débris d’abribus qu’ont brisé les casseurs.
Et concomitamment c’est la guerre sauvage,
De la drogue qui fait de terribles ravages ;
A Marseille Al Capone a remplacé Pagnol,
Les balles de fusil, les ballons de football.
La guerre des quartiers a trait aux territoires,
On se croit revenu aux temps de préhistoire ;
On s’empare d’un lieu par la loi du plus fort,
Celui qui s’interpose est condamné à mort ;
Malheur a qui a dit que la guerre est jolie !
Quand l’argent est en cause on frise la folie ;
Quand le gain est en jeu on tue sans état d’âme,
Dans ces lieux chaque jour on redoute le drame,
On a pris récemment pour cible des gamins,
Un jour qui n’aura pas pour eux de lendemain ;
Ils étaient de ceux qui dans les coins sombres guettent,
Et travaillent le soir pour quelques cacahuètes ;
Pour les pauvres la faim justifie les moyens,
Et servir les caïds est un mal pour un bien ;
Des balles sont perdues comme l’est la jeunesse,
Qui n’est plus dans ces lieux le temps de la promesse.
Mais leurs aînés aussi connaissent le trépas,
Leurs rivaux sont de ceux qui ne pardonnent pas ;
Et le sort leur soumet l’étrange loterie :
Ils remplissent leur bourse ou ils perdent leur vie.
La violence est partout ; puisse-t-elle cesser !
Que le futur nous fasse oublier le passé !
On disait être heureux comme Dieu l’est en France,
Que renaisse un printemps où se lit l’espérance !


© Jacky COURALET


Jacky Couralet (1953-aujourd'hui)
Retraité de la Fonction Publique Territoriale, Jacky Couralet est un passionné de poésie. Eclectique, il écrit dans tous les registres : de la veine austère à la veine satirique, voire loufoque ! Il adore aussi le scrabble et a une approche ludique des activités cérébrales.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa page Facebook



Sainte-Soline
Philippe SALORT

y

Laissant ses gosses et son boulot
Aux premiers Lilas
Elle est venue là
Y’a du gaz dans l’eau 


Elle est venue faire le ménage
De sa voix cassée
Slogans ressassés
Et ça déménage 


Elle est venue avec ses phrases
En touffes en bouquet
Insolent roquet
Qui mord qui écrase 


On est au début on voit pas la fin
Et ses mille bouches chantent le refrain
De la terre à sec que l’on assassine
Et du chant de l’eau que l’on embassine 


Elle est venue avec ses seaux
Et ses arrosoirs
Armes dérisoires
Pour donner l’assaut


Elle est venue haute en couleur
À la foire d’empoigne
Prête à la castagne
Rouleau compresseur 


Elle est venue patibulaire
Elle a canardé
Et elle a grondé
Sombre justicière 


On est au début on voit pas la fin
Et ses mille bouches chantent le refrain
De la terre à sec que l’on assassine
Et du chant de l’eau que l’on embassine 


Elle est venue bête aux abois
Elle s’est déchaînée
S’est hérissonnée
En Robin des bois 


Elle est venue sonner l’alarme
Avec sa folie
Foutre la chienlit
Cogner du gendarme 


Et cette foule reviendra
Face aux profiteurs
Face aux spectateurs
Collant sparadrap


© Michel SALORT


Philippe Salort
Moi j'aime cet auteur qui débute à 60 ans !! Qui se sent plus artisan qu'artiste, plus potache que poète... Qui se dit davantage les doigts pleins d'encre que la tête dans les étoiles !
Autre texte :
Entre parenthèses

→ Son profil sur short-edition.com



Insurgé
Michel BUNEL

y

À l'heure du quoi qu'il en coûte
Madame la préfète boute
Hors frontières le noir malien
Pour mieux accueillir l'ukrainien


Il est vrai qu'un peuple en déroute
Déraciné quoi qu'il en coûte
S'intègre mieux couleur locale
S'il a comme nous le teint pâle


C'est la guerre et quoi qu'il en coûte
On va se ruiner en mazout
Vu qu'on extrait plus de charbon
L'atome au contraire c'est bon


Quand ça pétera, aucun doute
La guerre il faut bien que ça coûte
La bombette bilan carbone
Cette solution qu'elle est bonne


Débarrassé quoi qu'il en coûte
Des gilets jaunes sur sa route
V'là Macron réélu monarque
Copain avec les oligarques


Il le sait bien ce qu'il en coûte
Le peuple qui miséreux broute
Les cailloux au bord du chemin
De son futur sans lendemain


On obère pour nos enfants
Leur avenir, c'est énervant
Déboussolé je n'y vois goutte
Et m'insurge quoi qu'il en coûte.


© Michel BUNEL


Michel Bunel (1952-aujourd'hui)
Depuis toujours, Michel Bunel écrit des poèmes, mais il lui a fallu arriver à 70 ans pour oser en publier. Auparavant, il s'est contenté de les collecter dans des cahiers puis de les poster sur des groupes de poésie, sur Yahoo Groupes, puis sur Facebook. Son écriture doit beaucoup à Georges Brassens - qu'il a aimé chanter - pour l'humour, la provocation ou la dérision, pour la versification aussi.
→ Sa page Facebook



Tout à fait Thierry !
Laurent ORSUCCI

y

Tout à fait Thierry !
Aujourd'hui manifestation des vieux,
et des futurs vieux...
encore !
Résultat de la rencontre :
Gouvernement 49. Peuple 3.
Au football quand, après des semaines de championnat, les résultats ne s'améliorent pas, on change d'entraîneur... !

Équipe G,
Emmanuel dispose d'un(e) avant-centre extraordinaire en la personne d'Élisabeth qui depuis son entrée en jeu a planté 11 fois l'article...
- Et oui mon p'tit Jean Mimi... De quoi faire passer Killian M'Bappe pour une ballerine acnéique des terrains verts !
-Tout à fait Thierry... mais n'oublions pas ce gardien exceptionnel qu'est Éric le justicier...
Seulement 3 pions encaissés !
- Oh oui mon p'tit Jean Mimi, bon malgré quelques casseroles... notre petit Éric sait parfaitement passer entre les mailles du filet...
de but... !

- Oh la Thierry, doucement je n'irai pas jusque-là et surtout cela ne nous... regarde pas !

- Oh mon p'tit Jean Mimi un peu quand même, mais vous avez raison parlons football, n'oublions pas ce merveilleux ailier Olivier et ses dribbles masqués, et que dire de ce petit défenseur intérieur central Gérald et sa fameuse tactique flashball.
- Ah mon p'tit Jean Mimi, si Guy Roux avait eu cet effectif élevé au Cassegrain, Auxerre aurait été champion d'Europe... !
- Tout à fait Thierry, un dernier mot quand-même sur la richesse du banc d'Emmanuel entre les Bruno, Sébastien, Amélie, Pap, Olivier, Gabriel, Rima, Sylvie... pas étonnant qu'avec de telles pépites...
- Ah là je vous arrête mon p'tit Jean Mimi, moi et le foot féminin... j'y comprends rien.

Équipe P,
Cette équipe dispose d'un effectif sans cesse renouvelé de millions de personnes !
De tous âges, tous bords... toutes origines...
L'entraîneur s'appelle CGT, CFDT, FSU, UNSA etc... etc...
Dire qu'il serait grand temps de changer d'entraîneur serait une gageure.
Alors intéressons plutôt aux slogans de l'équipe type !
"Métro, boulot, tombeau"
"Réformes d'heureux traîtres"
"La retraite avant l'arthrite"
"On ne battra pas en retraite"
"Manu, tu dépasses les bornes"
"Pour nos enfants, liberté"
Ainsi que bien d'autres, vous n'avez qu'à chercher...
Cher duo, un commentaire ?
- Oulah, nous la prose... c'est pas trop ça, on a plutôt la rhétorique footballistique...et question balistique ça vaut pas un ballon... !
C'est avec ça que vous voulez marquer, contrer ? Faites entrer Nabila sur le terrain, vous aurez plus de chances d'en mettre un... non mais allô quoi !
- Doucement Thierry doucement, certes c'est pas du Verlaine, Ronsard mais c'est pas ça qu'ils demandent...
- Ah mais mon p'tit Jean Mimi, quand on veut se faire entendre faut du slogan qui pète, quand on veut gagner on s'en donne les moyens.
Regarde Bernard, il a fait tapis, et l'OM a fait all in... !

- Tout à fait Thierry, tout à fait... peut-être les slogans devraient-ils être plus percutants en attaque...
Faites écrire Renaud, Lalanne, Sardou, Angèle, Bigard...
même les Vian, Balavoine, Béranger, Coluche...
Oui ils sont hors-jeu, mais pas hors course...
Après tout en politique on fait bien voter les morts, n'est-ce pas Thierry ?
- Oh oui, mon p'tit Jean Mimi, et de là où je suis, je vous l'avais dit après avoir vu la France championne du Monde on peut mourir tranquille... !
Et comme vous avez rajouté une étoile, pour vous remercier voici le slogan qui dit tout... de la défense.

Paris 19 janvier 2023,
"Grève générale, 49.3 du peuple"
-Tout à... comment ça Thierry ?
- Ah mon p'tit Jean Mimi, faut tout vous expliquer, être mort ça a des avantages !
On voit les choses de plus haut.
Jean Michel, c'est pas l'entraîneur qu'il faut virer... ni les membres de l'équipe P.
Non, le souci... c'est l'arbitre !
Y'a eu un film avec Eddy Mitchell...
Mais là faut changer le prénom en Marianne !
le titre...
                                                        ... à mort l'arbitre !


© Laurent ORSUCCI


Laurent Orsucci (1969-aujourd'hui)
Résidant à Brest depuis peu, Laurent Orsucci est aide-soignant, auteur et poète, engagé depuis une prise de conscience suite à la crise du Covid. Partenaire de plume (et d'humour !) de Gaëlle-Bernadette Lavisse depuis sa participation au Festival épistolaire en hommage à la nature. Deux écritures complices pour un même but.
Autres textes :
Le prestige
Pluton en Verseau
Club Dorlothée
La lettre
(avec Gaëlle-Bernadette Lavisse)
→ Sa page Facebook



Vox populi
Catherine DESTREPAN

y

C’est dans un premier cri que l’homme vient au monde
Car la révolte en lui explose à la seconde
Où le souffle de vie inspire à l’être humain
L’esprit de liberté et l’instinct de se battre.
Quand le feu du combat se lamente dans l’âtre
Il se ranime avec la peur du lendemain.


La peur du lendemain alors se fait entendre
Par la vox populi qui renait de sa cendre.
Et partout dans les airs le tumulte s’accroît
Car chuchoter en vain ne vaut pas le vacarme.
Dès que le verbe est né la parole fut une arme
Qui permit à chacun de réclamer son droit.


Et réclamer son droit provoque la révolte
De ceux qui ne croient plus en la bonne récolte.
L’arène est dans la rue où là se réunit
Un flot d’individus que la colère exhorte.
Le non-respect des lois maintenant peu importe
Car l’illusion porte un espoir infini.


L’espoir est infini quand on conçoit un rêve
D’égalité pour tous et d’un bonheur sans trêve.
Mais la fièvre de l’or a gâté les esprits,
A Instillé le doute et propagé la haine.
A force de régner par la loi souveraine
La démesure enchaîne aux fers les cœurs meurtris.


Alors les cœurs meurtris refaçonnent l’Histoire,
Comme en quatre-vingt-neuf, le jour de la victoire ;
La révolution avait le goût du sang,
La saveur de la mort et l’odeur de la poudre !
La violence est-elle un atout pour résoudre
Les maux de l’être humain qui se sent impuissant ?


© Catherine DESTREPAN


Catherine Destrepan (1956-aujourd'hui)
Comptable, Catherine Destrepan a jonglé toute sa vie active avec les chiffres avant de s'intéresser de plus près à la poésie, qui occupe aujourd'hui une grande place dans ses activités culturelles. Elle prête également sa voix de contre-alto au sein de plusieurs ensembles vocaux.
Autres textes :
Le chagrin de Déméter
Pile ou face
Accord de gamme
Beauté simple
L'aube incertaine

→ Sa page Facebook



Gill’&Jaune ?
Alhas FONEAN

y

Ô Peuples descendus
de vos champs sans vos pioches
les poings ronds dans vos poches
réclamer l’é(cot/cho) dû !


Humbles et simples gens
vus comme « Gill’ en jaune »
aux yeux d’un grand béjaune
sourd et condé-sang-dents !


Dans vos gilets « 3 piastres »
fluo comme des astres
vous ex(h)au/(c/ssez) la voi(x/e),


des sujets qui (dé/en)caissent
les c(oûts/oups) complets « 3 pièces »
des sei/sai(gneurs)… de nos Rois !


© Alhas FONEAN

Alhas Fonean (1964-aujourd'hui)
Partisan d’une poésie accessible à tous, cet « artisan poète » ou « poète-armateur » comme il se plaît à se définir lui-même, est à la croisée des principales écoles et influences poétiques. Poésies à déclamer ou poèmes à « dé-slamer » en vers libres ou vers classiques, passant d’une comptine à un sonnet, d’un rondeau à un triolet, évoquant des sujets graves ou plus légers, la poésie de Fonean se veut être une poésie vivante à l’écoute du monde contemporain. Pour lui, le poète doit s’affirmer dans notre société en tant que vecteur de l’actualité. Il se doit d’être le visionnaire, le garant de la mémoire des choses. Quand l’homme oublie, il doit être l’alerte, le pôle de résistance face à la menace qui guette et toujours s’efforcer de réapprendre au monde à aimer, à rêver la beauté des choses. Il a participé à de nombreuses revues poétiques, festivals de poésie, et son travail d’écriture a souvent été récompensé lors de sa participation à des concours de poésie. Au cours du festival du poète et de l’expression en juin 1989 à Mougins, il rencontre le poète Norge, avec qui il entretiendra une relation épistolaire jusqu’à la disparition de ce dernier.
Son blog : → http://jcmedit.eklablog.com/
Sa page Facebook : → https://www.facebook.com/alhas.fonean



Résistance
Renée VIRLOGEUX BORON

y

Ils avaient à peine dix huit ans
Ils étaient ouvriers, étudiants
Ils n'aimaient pas les nazis
Et fuyaient la barbarie, la tyrannie
Alors ils l'ont dit à leur manière.


Dans leur beau pays, pas de place
Pour ces intrépides Français
Qui, dans les rues, passent
En chantant et parlant en anglais
Suivis par des yeux en colère.


On leur a tout pris : leur jeunesse
Leur folle audace, leur insouciance
Ces gosses croyaient en leur chance
Les uns allaient à la confesse
Les autres aux réunions interdites.


Ils riaient comme on rit à leur âge
Au nez de ceux qui nous ont envahis
Et à la barbe de ceux qui n'ont pas compris.
Vraiment ces gamins n'étaient pas sages.
Ils ont été arrêtés en zones maudites.


Dans les camps, ils ont été envoyés.
Ils avaient tout juste dix huit ans.
Certains sont revenus, vieillis
D'autres, enfin, se sont envolés
Dans les étoiles loin du monde en folie.


Loin des  imbéciles et des malfaisants.
Ils riaient comme on rit à leur âge
Mains tendues face à l'occupant
Avec au cœur la volonté sauvage
De vivre en criant : résistance, résistance


© Renée VIRLOGEUX BORON


Renée Virlogeux Boron (1939-aujourd'hui)
Renée Virlogeux Boron s'adonne à la poésie pour son plaisir et écrit aussi des nouvelles. Elle travaille la terre aux Ateliers d'Art de Château-Thierry. Elle aime également peindre et a pris quelques cours de calligraphie. Elle a ouvert une petite bibliothèque dans sa commune qui compte 83 habitants. C'est avant tout le plaisir de se rencontrer, d'échanger et... de jouer aux cartes.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa page Facebook



J'ai obéi
Philip KIE

y

Mes maîtres je les sers, en bon toutou fidèle,
Sans haine, quels qu'ils soient, et toujours avec zèle.


Ils m'ont dit d'obéir, je leur ai obéi,
Au saint nom de la Loi, pour l'amour du pays,
Pour la grandeur des dieux, pour des mots, pour la gloire.
Aveuglément j'ai cru que je devais les croire ;
Ils m'ont dit d'obéir, je leur ai obéi,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.


J'ai, de leurs camps, été le scrupuleux maton,
Jouant servilement mon rôle de Ladon
De la pensée unique, ornière où l'ostracisme,
Y semant des ghettos, féconde le racisme.
J'ai, de leurs camps, été le scrupuleux maton,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.


J'ai dénoncé, j'ai torturé, j'ai fusillé,
J'ai ri du paria lorsqu'il m'a supplié.
Jamais je ne conteste, en ouaille exemplaire,
Quel que soit mon pasteur, je m'oblige à lui plaire ;
J'ai dénoncé, j'ai torturé, j'ai fusillé,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.


Stalinien ou nazi, démocrate souvent,
J'épouse le rivage où me pousse le vent.
En servant, tour à tour, tantôt l'un, tantôt l'autre,
J'entonne avec entrain la même patenôtre ;
Stalinien ou nazi, démocrate souvent,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.

J'ai vu, j'ai entendu, je n'ai jamais rien dit,
On ne doit pas savoir, puisqu'ils l'ont interdit,
Aussi ne sais-je pas, ma vie est un modèle.
Chaque fois qu'on m'enjoint de le faire, je bêle ;
J'ai vu, j'ai entendu, je n'ai jamais rien dit,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.


J'obéis sans relâche, aujourd'hui comme hier,
Je le ferai demain, jusqu'au fond de l'enfer,
Je suis né comme ça, ma nature est ovine,
J'exerce avec talent l'art de ployer l'échine ;
J'obéis sans relâche, aujourd'hui comme hier,
En bon toutou fidèle,
Et toujours avec zèle.


Sous limmense plafond des temples de la haine,
Hydre au souffle profond dort la bêtise humaine.


Hors du troupeau je sais qu'il n'est pas de salut.
Je crains pour mon emploi, je tremble d'être exclu,
Pour payer la maison il faut bien que je bosse,
Je dois gagner mon pain et celui de mes gosses ;
Hors du troupeau je sais qu'il n'est pas de salut.


Que dis-tu ? Cette larme ? Il faut que je l'essuie ?
Mais je ne pleure pas, c'est seulement la pluie.


© Philip KIE

Philip Kie (1953-aujourd'hui)
Auteur vivant dans la Drôme, fan de poésie et de Stéphane Mallarmé, en particulier. Il a publié un recueil de poésie « Trip mogigraphique » aux Editions Sydney Laurent en 2018. Plusieurs de ses textes sont en version audio (consulter sa page Facebook).
Autres textes :
L'enfant des fées
Icare
Sa page Facebook : → https://www.facebook.com/KiePhilip



Oser la Résistance
Jean-Charles PAILLET

y

Piégée par la cinquième constitution
piégée par les cinq blocs politiques
piégée par la 5G


la masse moutonnière continue
à s’engouffrer aveuglément
dans cette nasse de malheur


Étranger aux cinq éléments
chacun d’entre-eux rêve t’il d’être
un mouton à cinq pattes ?


**


Ici l’aube déambule à pas lents
ailleurs à marche forcée les violences policières


Ici le silence féconde l’esprit
ailleurs frappent les insultes policières


Ici les collines sont un refuge sûr
ailleurs se déchaînent les matraques policières


Ici la vie souveraine en voyage de noce
ailleurs divorce consommé face aux dérives policières


**

 

Les déferlements totalitaires
avec leurs cortèges de violences
d’absurdités et de mensonges
n’en finissent pas de revenir


La souveraineté en chacun de nous
doit vaillamment résister au jour le jour
et pour toutes les saisons à venir


Il y aura toujours quelque part
de la Lumière pour défier l’obscurité
des remblais pour contenir l’ennemi
et des neurones pour dire ce qui est


© Jean-Charles PAILLET

Jean-Charles Paillet
Jean-Charles Paillet est animé par l’instant présent et les belles valeurs qui élèvent le coeur et l’âme... Sa poésie se retrouve dans ses dessins, ses photographies et ses chansons. Sa rencontre avec Yves Broussard est un tournant dans sa vie de poète.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa page Facebook



Mouvement perpétuel
Didier COLPIN

y

Une indignation
Génère une révolte
Quelquefois se récolte
La révolution…


Dans le passage à l’acte
Survient le revolver
Dans une main de fer
Qui souvent se contracte…


Un autre cauchemar
Sait étouffer le rêve
Violente relève...
-Eternel ‘traquenard’ ?-


En fruit d’une souffrance
Une ‘bonne’ raison
Assombrit l’horizon
-Cruelle résonance-...

 

© Didier COLPIN


Didier Colpin (1954-aujourd'hui)
Didier Colpin est né en 1954 à Laval, petite ville de l’Ouest de la France. Il a découvert l’écriture et la poésie « sur le tard », en 2010. Depuis elle est devenue sa compagne de tous les jours… La poésie est pour lui le contraire de Twitter et de sa rapidité. Elle est un arrêt sur image… Sur un émoi sur un trouble sur la Beauté sur la laideur. Le tout vu, ressenti à travers le prisme qu’est son regard où deux plus deux ne font pas toujours quatre…
Autre texte :
24 février 2022 / 24 février 2023
→ Sa page Facebook




Pluton en Verseau
Laurent ORSUCCI

y

Sonne réveil souriceaux
de ce monde Ganymède
le porteur nouveau sceau,
dans l'unité remède.

Les paroles Jupiter
vérités des nantis
pour toi leurre du petit,
de ces jours bien amers.

De ces peuples vendus
pour un rhume superflu
les enfants sacrifices,
sur l'autel de leurs vices.

Se révèle l'échiquier
de ces banquiers faux dieux,
l'illusion démasquée 
leur verser l'encre adieux.

De ces vrais magiciens
qui détournent attention
avançant tous leurs pions,
les souris leur dessein.

La portée qui a faim
de ce blé quotidien
d'aller premier du mois,
Trente et un, toi et moi.

Où nos vies sont jouées
dans les parts de marché
Son essence contrôlée,
ton énergie drainée.

Les pensées divisées
dans les minorités,
que pourront les slogans ?
face aux canons, ses chants !

Nous sommes tous des Django 
dans la foi, dans la peau
devenir verseurs d'eau,
et choisir renouveau.

Quand la bête soubresauts
les pouvoirs seigneuriaux 
nous verrons le ciel bleu,
sa promesse du feu.

Viendra l'heure saison
dans l'hiver où l'été ?
De s'asseoir unifiés
et ne plus abreuver
la machine oraison
d'un savoir dire non !

                   Sans tirer le canon.

 

© Laurent ORSUCCI


Laurent Orsucci (1969-aujourd'hui)
Résidant à Brest depuis peu, Laurent Orsucci est aide-soignant, auteur et poète, engagé depuis une prise de conscience suite à la crise du Covid. Partenaire de plume de Gaëlle-Bernadette Lavisse depuis sa participation au Festival épistolaire en hommage à la nature. Deux écritures complices pour un même but.
Autres textes :
Le prestige
Club Dorlothée
La lettre
(avec Gaëlle-Bernadette Lavisse)
→ Sa page Facebook



Tirade de la Covid 19
Claude DUSSERT


y

Ô rage, Ô désespoir, Ô Covid ennemie
N’ai-je donc tant vécu que pour finir au lit
Et ne suis-je blanchi dans des travaux taxés
Que pour voir en un jour qu’je suis toujours fauché ?
Ma main qui tant de fois a écrit des poèmes
Des odes, des pamphlets sans jeter d’anathème
Ma main au cœur rongé par crampe des poètes
Maltraitée tant de fois par de faux adjupètes
Qui ont trahit l’espoir, se moquant de ma foi
Quand j’étais dans la merde et parfois aux abois.
Ô cruel souvenir de ma jeunesse passée
Œuvre de tant de jours en un jour balayée
Nouvelle décrépitude par les Chinois créée
Pour vaincre la planète, nous empapaouter.
Fâcheuse destinée fatale à mon bonheur
Précipice sans fond où tombe mon honneur.
Faut-il toujours que vainquent les pervers de tout poil
Et mourir décati, décrépit et à poil.
Diafoirus maudits, de mon corps contemplaient
Les effets pervers que m’inflige vot’ Santé.
Et vous de mes exploits glorieuses roupettes
Vit jadis orgueilleux expulsé de la fête
Qui dans cet’ déchéance fait souvent tête basse
Va, laisse la Covid à ses plaisirs salaces.
Débranche la machine laisse aller la vapeur
Que je découvre enfin qui est mon créateur.


© Claude DUSSERT


Claude Dussert (1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations. Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité à compte d’auteur cinq recueils de poésie et un recueil de nouvelles. Il a également remporté de nombreux prix de poésie.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa page Facebook



Fragile société d'aujourd'hui
Gaëlle-Bernadette LAVISSE

y

Elle est fragile notre société d’aujourd’hui
Où l’on rencontre toutes formes de racisme
Rejet de l’autre, et terrorisme
Ne soyons plus aveugles à une possible tragédie

 

D’une nouvelle guerre sourde qui résonne
Mais osons rêver qu’ensemble un jour
Liberté, égalité, fraternité respirent l’amour
Pour que partout dans le monde fanfaronne

 

Des générations de plus en plus conscientes
Des dangers de l’exclusion, et se montrent vigilantes
Qu’en souvenir des victimes de l’histoire
Jeunes enfants ayez soif de respecter et transmettre la mémoire
Répondre aux cortèges d’images et d’actualités tragiques
Et qu’alors vous devenez héritiers de paix héroïques


© Gaëlle-Bernadette LAVISSE


Gaëlle-Bernadette Lavisse (1974-aujourd'hui)
Résidant dans le Pas-de-Calais, Gaëlle-Bernadette Lavisse est écrivaine-biographe, auteure et poète, militante et engagée. Elle anime des ateliers d'écriture depuis plusieurs années. Elle a organisé le Festival des lettres d'amour et d'amitié d'ici et d'ailleurs  depuis 2018, avec anthologie publiée à chaque fin de festival. Cette année, elle a lancé le Festival épistolaire en hommage à la nature qui fera également l'objet d'une anthologie, où il y a eu plus de 500 lettres, poèmes, et témoignages, deux collèges ont participé, ainsi que trois écoles primaires et maternelles, deux associations, et de nombreux particuliers de partout en France et dans le Monde. La catégorie Art Postal sur le thème de la nature, a remporté lui aussi un vif succès, avec prochainement des expositions dans les réseaux médiathèques du Pas de Calais.
Autres textes sur le site :
Souris à la solitude...
La lettre (avec Laurent Orsucci)
→ Sa page Facebook



Liberté, où es-tu ?
André LAUDE

y

Liberté où es-tu ?
Dans le casque du guerrier,
Le ventre de la femme en train d’accoucher
Dans le cri de terreur de l’aveugle
cogné par les salauds de loubards
Station Barbès–Rochechouart ?


Liberté où es-tu ?
Dans la paume du mystique à genoux,
du côté du soleil couchant
Dans le songe du poète au « moi » éclaté
Dans le caillou jeté contre le carreau
par un ivrogne de minuit ?


Liberté où es-tu ?
Dans la craie de la comptine de l’écolier
Dans la fuite du lièvre à travers champs
Dans la sève des arbres torturés de Van Gogh
Dans le passage muet du schooner ?


Liberté où es-tu ?
Dans la musique de Bartok et Webern
Dans un tableau de Piet Mondrian
Un poème de Gottfried Benn
un sourire de nègre travailleur immigré ?


Liberté où es-tu ?
Dans la nuit que nous croyons pays ami
Dans le serment d’amour
proféré entre quatre murs lépreux
dans la seringue bleue, la houle de l’océan,
Les nervures de la pierre à Carnac ?


Liberté où es-tu ?
dans le piano aux dents de chameau
Dans le tumulte du bordel andalou
Dans le fric qui roule sur les tapis verts
dans la seringue qui s’enfonce pour la troisième fois dans la veine malade
Dans le mégot de Jacques Prévert
Dans le noir cimetière de nos utopies ?


Liberté qui es-tu ?
Femme ou cormoran
Baleine bleue ou marbre cadavérique
Liberté qui es-tu ?
Soleil ou aigle
Maïs fier ou sombre fumier ?
– Je suis la blessure blessée
Le vent sans mémoire, l’urine
du buffle et du chien.
Je suis la femme lapidée qui se redresse encore sur ses membres martyrisés


Je suis la rage, la rage universelle contre les limites
La fleur, la Fleur d’acier,
La Fleur parmi les ruines.

 

© André LAUDE


André Laude (1936-1995)
Poète et journaliste français, André Laude est né à Paris le 3 mars 1936 où il est mort le 24 juin 1995, lors du 13ème Marché de la Poésie, place Saint-Sulpice.
On a écrit d’André Laude qu’il était un "soleil noir de la poésie". Noir d’une existence. Noir du refus anarchiste de se soumettre. Noir du désespoir qui a souvent accompagné son existence et qui a contribué à sa fin. Soleil de la révolte qu’il a toujours porté très haut. Soleil de l’éclairage qu’il a donné de l'oeuvre des autres : amis et compagnons trop méconnus, artistes emprisonnés et bâillonnés. Soleil des mots qu’il a aimés.
→ Association Les Amis d'André Laude
→ Sa biographie sur Wikipédia



Le prestige
Laurent ORSUCCI

y

Je suis pas Hugh Jackman
ni la gueule de Batman
mais, compris la magie
des pouvoirs assis.

En France les gilets jaunes
et monde vacille les trônes
sort la boîte à chapeaux,
les pangolins viraux.

Tous en cages, isolés
les peurs du gouverné
des médias propagés,
ça va bien les calmer !

Et puis faudra 'choisir'
si vous voulez sortir
vos bras, là nous offrir
et nous, nous enrichir.

Puis là, après tout ça
viendra l'heure, sonne le glas
fondre ton économie,
la guerre seule compromis.

Comme t'as toujours dit oui
son plateau t'est servi
que tu ne vois même pas,
la main 49:3.

C'est l'art de l'illusion
tes manifestations
retraites anticipons,
dans l'avancée des pions.

Conflits nous nourrissons
autant des quatre coins
annonce des bourgeons,
l'hiver prochaine saison.

Regarde bien ma main
celle de ton quotidien
toucher ton portefeuille,
l'automne de ton cache-oeil.

Bientôt dans ton école
Rentrée de mon armée
du lait mes aréoles,
que tu as demandé.

C'est l'art du magicien
de faire ces bons à rien
seize ans majorité,
bientôt incorporés
un tour bien combiné.

Un meurtre prémédité
dans l'œuvre d'apparences
que toujours l'on devance,
merci à vous d'aider.

Si jamais un dimanche
l'aveugle se réveillait
des cartes plein nos manches
partie, autre plan B.

Nous sommes maîtres prodiges
du plus grand des prestiges
les Hedwige porte voie,
desseins vous pensez choix.

                     Wingardium leviosa...
                                                               et
                                                                     Occulus réparo !

 

© Laurent ORSUCCI


Laurent Orsucci (1969-aujourd'hui)
Résidant à Brest depuis peu, Laurent Orsucci est aide-soignant, auteur et poète, engagé depuis une prise de conscience suite à la crise du Covid. Partenaire de plume de Gaëlle-Bernadette Lavisse depuis sa participation au Festival épistolaire en hommage à la nature. Deux écritures complices pour un même but.
Autres textes :
Pluton en Verseau
Club Dorlothée
La lettre
(avec Gaëlle-Bernadette Lavisse)
→ Sa page Facebook



Abîmes
SEDNA

y

L’écho des années sème à tour de bras
Sur les saisons, sa solitude en tas.
Bruissement neigeux sur la jachère,
Quand la flore agonise, prisonnière.

De ces vents qui tournoient tels des oiseaux
Sur le tumulte sans fin des cerveaux,
Naît au-dessus du monde un crépuscule
Qui enveloppe la lune incrédule.

Derrière chaque morceau de béton,
La lande est nue sous la pollution,
Puis se transforme en un désert aride
Où l’oxygène devient trop timide.

Les sirènes s’enfuient des océans
Perdues dans l’abîme des ouragans.
Et court le monde dans cette souffrance
Pourra- t’il oublier sa déchéance.

Des hommes trop avides de pouvoir
Marchent bon train dans chaque grand couloir
Où flânent les monnaies souveraines,
Quand tout près, restent à briser des chaînes.

L’outre pleine de déserts au chevet
De sommets endimanchés sans projet,
Ils continuent à boucher chaque oreille
En remplissant leurs sacs de notre oseille.

La planète qui porte son fardeau
Est soumise à l’orgueil de son bourreau.
Quand au soir la vieille dame s’étonne,
Avec ses mots, le poète ronchonne.

 

© SEDNA


Sedna
Résidant en Charente-Maritime, Sedna a toujours eu la passion des mots. Elle aime les rimes et travaille principalement avec le Traité de Sorgel en poésie classique. Elle aime la mer, le ciel qui sont ses sources d'inspiration permanente. La sauvegarde de notre planète est l'une de ses préoccupations.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
Son site : → http://www.cassiopee17.fr/



Volcans de colère
Mokhtar EL AMRAOUI

y

Les poings dressés de la révolte
Sont ce que l’injustice toujours récolte
Ils avancent refusant fiers tout joug
Déployant leurs étendards unis debout
Bravant bourreaux tyrans et leurs valets
Qui de peur tremblent au fond de leurs palais
Les chants des insurgés sont des volcans de colère
Se soulevant contre haine mépris et misère
Ils revendiquent leur droit à la liberté et la dignité
Pour eux la justice et l’égalité sont nécessaires
Pour qu’une vie heureuse soit possible sur terre
Où règnera la paix entre frères et sœurs solidaires
Luttant insoumis pour s’émanciper de tous les calvaires

 

© Mokhtar EL AMRAOUI


Mokhtar El Amraoui (1955-aujourd'hui)
Poète d’expression française né à Mateur, en Tunisie, Mokhtar El Amraoui a enseigné la littérature et la civilisation françaises pendant plus de trois décennies, dans diverses villes de la Tunisie. Il est passionné de poésie depuis son enfance. Il a publié quatre recueils de poésie et plusieurs de ses poèmes ont été publiés sur Internet et en revues-papier.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Blog de l'auteur : https://mokhtarivesenpoemesetautresvoyages.blogspot.com/



Indigne-toi
Christian SATGÉ

y

 

© Christian SATGÉ


Christian Satgé (1965-aujourd'hui)
Auteur prolifique, fabuliste et conteur éclectique, Christian Satgé est professeur d'histoire-géographie dans le département des Hautes-Pyrénées. Il a publié plusieurs recueils et une quarantaine de ses textes figurent dans Le Monde de Poetika.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
Son blog : → https://lesrivagesdurimage.blogspot.com/

→ Sa page Facebook



Rébellion
Sylvie CROCHARD

y

Retraite à 64 ans,

Les Français ne sont pas contents

De leur sort :

Le gouvernement a tort.


Manifs endiablées,

Éboueurs insatisfaits,

C’est la révolte

Que l’on récolte.


Paris en pagaille,

La foule se tiraille.

Rien ne va plus là haut :

C’est la fin des haricots…


© Sylvie CROCHARD


Sylvie Crochard (1976-aujourd'hui)
Ouvrière en milieu protégé, Sylvie Crochard a publié plusieurs recueils. Passionnée de piano, elle s’inspire également de la musique dans ses poèmes.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
Sa page Facebook : → https://www.facebook.com/poetecrochard



Monsieur le Président
Yvan BUONOMO

y

Vous êtes jeune et beau, nous devenons vieillards.
On compte en petits sous, vous comptez en milliards.
La flamme de l’espoir, chez nous, elle vacille,
Vous, par votre fonction, vous pensez qu’elle brille !
Les ailes du pouvoir vous ont fait envoler,
Vers des cieux bien lointains à ne plus avoir pied ;
Eloigné du réel et du tout quotidien,
Souvenez-vous, qu’en bas, habitent des humains.
Pourquoi punissez-vous notre caste vieillesse ?
Pourtant elle a trimé toute sa vie durant !
Elle a sacrifié sa si belle jeunesse,
Cela fut bien trop tôt, dès l’âge de quinze ans ;
Des huit heures par jour, et six jours par semaine, 
Sans congés, ou si peu, nous passâmes ce temps,
A bâtir notre toit à s’en péter nos veines,
Pour être à l’abri aux vieux jours arrivant.

Non ! On n’a rien volé !… Si ce n’est de nos ailes ! 
On avait des principes, on faisait son devoir, 
On ne quémandait pas aux belles demoiselles
"Ces caisses de l’état, ces faciles abreuvoirs."
Avec nos seules mains, et beaucoup de fierté
On travaillait très dur du matin jusqu’au soir ;
Oui ! C’était notre honneur, notre esprit du clocher,
Animé par un mot qui s’appelait "Espoir" : 
L’espoir pour nos vieux jours avant l’éternité,
De voir un coin de bleu, avant le grand trou noir.

Monsieur le Président, toute notre jeunesse
On paya la vignette pour aider nos aïeux,
Elle servait, déjà !… A renflouer des caisses, 
Cet argent disparu à "La barbe" des vieux !...

Solidarité ! Généreuse rengaine,
Que vous chantez à ceux qui travaillent, et peinent,
Et "Piquez notre argent" pour tous les endormis,
Qui eux ! N’hésitent pas à rester dans leur lit ;
Nous, nous avons vécu sans aide !… Mais promesses !!
En vrai chef de famille assumant son foyer,
Quand vous nous ponctionnez pour "La pauvre jeunesse"
Sur nos retraites acquises en toute honnêteté,
On s’insurge, Monsieur ! Plutôt, on se révolte !
Devant votre justice vraiment imméritée,
Car votre doigt pointé sur le lieu de récolte,
A désigné les vieux comme gens argentés.

Est-ce que vous savez ce qu’est une famille ?
Vous qui n’avez pas, et n’aurez pas d’enfant.
Nous, nous aspirions qu’à un moment tranquille,
Gagné par le travail, la sueur et le sang.
C’est drôle ! Hilarant ! C’est même pitoyable,
Quand un énarque dit : « C’est pour l’égalité »
Mais octroie des pensions de façon lamentable,
Aux vieux venus d’ailleurs, qui n’ont pas travaillé.
Elle est belle Monsieur ! La généreuse France,
Dans ses excès de zèle et de Fraternité !

Écoutant vos Ministres, on a froid dans le dos,
Ils clament que les vieux ont fait leur temps sur terre ; 
De Gaulle avait dit : « Les Français sont des veaux »
Ouvrez des abattoirs pour tous les volontaires,
Mais je vous le parie, ce sera un fiasco.
Et pas de bousculades au "Marin cimetière".
Nous préférerons nous rappeler d’un mot
Fuir et embarquer pour l’Ionienne Cythère"
 
Vos soumis maroquins, jurent et promettent,
Qu’il n’y aura jamais plus, de taxes, et d’impôts.
Mais le lendemain ils se trouvent très bêtes
A l’annonce subtile, d’augmentations de taux.
Vous devriez conseiller à tous vos bons Ministres,
De parler de cela, que les premiers Avril,
Leurs propos qui sont, des plus anthraconistres,
Feraient de bonnes blagues en ce jour puéril.

Vous rejetez les vieux, vous n’aimez pas la pierre,
Car votre patrimoine, vide d’immobilier,
Laissait bien présager de façon manœuvrière,
Que tout l’intransportable, vous le surtaxeriez ;
Même si pour donner "En même temps" le change
Oui ! Vous faites un cadeau ! "Mais qu’offrent les cités…" 
Il faut dans nos vieux jours bien plus que du courage,
Pour avoir sa maison, et vivre en son foyer.

L’action et la startup ont votre préférence,
C’est l’immatériel, l’invisible parfait, 
Si cela est pour vous l’avenir de la France,
Il n’est pas pour autant le bonheur des Français.
Vous vous trompez, Monsieur, car vous brisez des rêves,
Les esprits bâtisseurs, déjà désenchantés, 
Ont rangé les outils et mis la pierre en grève,
Et votre économie en est désaffectée.

Taxer ! Taxer ! Taxer ! Ce n’est pas du courage.
C’est même son contraire, et la facilité,
Nous sommes, il est vrai, de dociles otages,
Partir serait pour nous, trop de complexité !
Il vous faut de l’argent ?... Montrez votre puissance !
A tout politicien aux rentes cumulées,
Payez-en une seule ; Ce pas vers la décence, 
Serait déjà un signe de bonne volonté.

Avec tout le respect pour votre Présidence,
- Acquise sans ma voix - Aux prochaines élections,
Je rêve que les vieux de notre "Pauvre France" 
Oublient votre parti, et oublient votre nom.
Monsieur le Président, je vous prie d’agréer
Mes salutations prétendues distinguées.
Comme "auteur" de ceci je ne vais pas signer
Car nous sommes nombreux à nous dentifier.


© Yvan BUONOMO


Yvan Buonomo (1946-)
Ancien joueur international de rugby (Béziers), Yvan Buonomo est un humaniste épicurien, grand amateur d’alexandrins et de taille de pierres, qui s’adonne depuis peu à la prose ("A la recherche du rugby perdu", aux Editions de la Mouette).
→ Sa biographie sur Wikipédia



Je proteste
Louis ARAGON


y

Je proteste, je proteste
Pour l’amour martyrisé
Pour les bouches sans baisers
Pour les corps décomposés
Pour l’échafaud, pour la peste
Je proteste

Pour la vie aussi qu’on eut
La mort dite naturelle
Avoir subi les querelles
Qui burinent et bourrèlent
Notre visage ingénu
Je proteste

Pour les os qui se brisèrent
Les femmes à cris accouchant
La sécheresse des champs
Et l’égorgement du chant
Pour la faim, pour la misère
Je proteste

Pour ce qu’on a fait de nous
Prenant tout pour de l’eau pure
Qui ne cherchions aventure
Que de la bonté future
Et qu’on a mis à genoux
Je proteste

Qu’on nous trompe, qu’on nous leurre
Nous donnant le mal pour bien
Celui qui n’en savait rien
Et qui le mal pour bien tient
N’est-ce pour le bien qu’il meurt
Je proteste

Au nom des choses meilleures
Prêtes à tout ce qu’on voudrait
A tout sacrifice prêt
Pauvres gens bêtes de trait
Qu’on bafoue et mène ailleurs
Je proteste


© Louis ARAGON


Louis Aragon (1897-1982)
Poète et romancier français, il participe au mouvement dadaïste et surréaliste aux côtés d'André Breton. En 1928, sa rencontre avec Elsa Triolet, l'amour de sa vie, lui inspirera de nombreux poèmes. Bon nombre de ses textes ont été mis en musique par Léo Ferré ou Jean Ferrat.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa biographie sur Wikipédia
→ Maison Elsa Triolet - Aragon



Je crie pour les enfants perdus
Alain BOSQUET


y

Je crie pour les enfants perdus.
J’écris.
Je crie pour la femme éventrée.
J’écris.
Je crie pour le soleil qu’on souille.
J’écris.
Je crie pour la ville qu’on brûle.
J’écris.
Je crie pour l’arbre assassiné.
J’écris.
Je crie pour le rêve sans fond.
J’écris.
Je crie pour la planète folle.
J’écris
de ne pouvoir crier.


© Alain BOSQUET


Alain Bosquet (1919-1998)
Poète français d'origine russe (de son vrai nom Anatole Bisk), Alain Bosquet a passé son enfance à Bruxelles. Il s'est engagé dans l'armée américaine en 1942 puis dans l'armée française. Installé définitivement à Paris en 1951, il a collaboré à Combat, au Monde, au Figaro et à plusieurs maisons d'édition. Romancier et poète, il a fondé la revue Nota Bene. Il est mort à Paris le 17 mars 1998.
Autres textes :
Le cirque

Les mois de l'année
→ Sa biographie sur Wikipédia



Bella ciao

y

Le matin, à peine levée
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
Le matin, à peine levée
À la rizière je dois aller
Et entre les insectes et les moustiques
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
Et entre les insectes et les moustiques
Un dur labeur je dois faire
Le chef debout avec son bâton
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
Le chef debout avec son bâton
Et nous courbées à travailler
O Bonne mère quel tourment
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
O Bonne mère quel tourment
Je t'invoque chaque jour
Et toutes les heures que nous passons ici
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
Et toutes les heures que nous passons ici
Nous perdons notre jeunesse
Mais un jour viendra que toutes autant que nous sommes
O bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao
Mais un jour viendra que toutes autant que nous sommes
Nous travaillerons en liberté.

 


Bella ciao
Bella ciao est un chant de révolte italien qui célèbre l'engagement dans le combat mené par les partisans, résistants pendant la Seconde Guerre mondiale opposés aux troupes allemandes alliées de la République sociale italienne fasciste, dans le cadre de la guerre civile italienne. Les paroles ont été écrites fin 1944 sur la musique d'une chanson populaire que chantaient au début du xxe siècle les mondine, ces saisonnières qui désherbaient les rizières de la plaine du Pô et repiquaient le riz, pour dénoncer leurs conditions de travail. Ce chant est devenu un hymne à la résistance dans le monde entier.
→ En savoir plus sur ce chant ( Wikipédia)



Magouille blues
François BÉRANGER

y

Tous les sept ans et même parfois avant
On a droit au grand carnaval
Au carnaval de la magouille
Au grand défilé des embrouilles
C'est tellement bidonnant
Que ça en devient consternant

Le candidat de l'Ordre Moral
Avec sa gueule à faire châtrer tous les mâles
Il nous parle sans rigoler
De vieilles vertus desséchées
Travail, Famille, Patrie, ça va changer
Le Père la pudeur va nous réformer
Il nous dit dans son programme d'acier
Que les mâles doivent se retirer
Lui, il a quand même dérapé
Trois ou quatre fois dans sa moitié
Il est vrai qu' c'était pour engendrer
Des bons Français à l'âme bien trempée

Les autres grands qui s'opposent
Viennent tous du même clan
Et c'est d'autant plus marrant
De les voir se casser les dents
En s'envoyant dans le nez
Toutes leurs turpitudes passées
Avant qu' l'un d'eux soit Président
Avant qu'il en prenne pour sept ans
Ces messieurs à image sociale
Essaient de nous r'monter le moral
Ils iraient même, qui l'aurait crû,
Jusqu'à nous montrer leur cul

Ils n'ont jamais autant de cœur
Que quand il leur faut beaucoup d'électeurs
Quand le jour J sera passé
Finis les serments, finis les baisers
Finies les bonnes résolutions
On r'deviendra tous des pauv' cons
En attendant, ils veulent nous faire croire à
Des arguments de bazar
Français, Françaises, soyez réalistes
Gaffe aux socialo-communistes
C'est là qu'est le plus grand danger
Pour notre vieux pays traumatisé

Moi, pour vous dire la vérité
Je suis plutôt pour le danger
La seule chose qui m'inquiète
C'est le mec qui s' trouve à leur tête
Car plusieurs fois par le passé
Il a sa veste retournée
Les seuls qui soient vraiment sympas
Qui soient un peu comme vous et moi
Je n' parle pas du royaliste
Ni bien entendu du fasciste
C'est ceux qu'auront au bout du compte
Deux ou trois pour cent des voix, pourquoi ?

Il est vrai que deux ou trois pour cent
Ça fait quand même pas mal de gens
Pas mal de gens qui s'ront fichés
Et qui un jour vont s' retrouver
Dans un stade militairement gardé
Où on pourra toujours chanter

 

© François BÉRANGER


François Béranger (1937-2003)
Auteur-compositeur-interprète libertaire français qui connaît une forte notoriété dans les années 1970 grâce à des textes dans la pure tradition du "protest song", symbole de l’après Mai 68. Des générations ont vibré sur Natacha, Alternative, Les Mots terribles, Magouille blues ou Mamadou m’a dit. Aujourd’hui, Hubert-Félix Thiéfaine ou Sanseverino reprennent volontiers des chansons de son répertoire.
Autres textes :
Manifeste
Le vieux
→ Sa biographie sur Wikipédia
→ Ecouter sur YouTube



Aux atroces impunis
Jean-Marc LA FRENIÈRE

y

À ceux qui pansent le cercueil quand c’est le cœur qui saigne,
À ceux qui pensent comme on dépense en vendant notre peau,
À ceux qui cousent nos paupières avec le fil du discours,
À ceux qui cousent des drapeaux et décousent les nids,
À ceux qui noient l’amour dans le cours de la Bourse,
À ceux qui se saoulent à l’égout des égos,
À ceux qui transforment l’espoir en loterie monétaire,
Les jardins d’enfants en fabriques à soldats,
Et le chant des cigales en grillon du foyer,
Aux prophètes du Texas qui se prennent pour Dieu,
Aux vendeurs de pilules, de prières et de bombes,
Aux atroces impunis adorant le veau d’or,
Aux empêcheurs de vivre, aux bourreaux qu’on encense,
Aux saccageurs de rêves, aux pilleurs de tombeaux,
Qui renversent les pôles sans inverser les rôles,
Aux signeurs de décrets, aux saigneurs d’abattoir,
Aux seigneurs des finances, des églises et des stades,
À eux qui sèment la tempête sans connaître le vent,
À ceux qui comptent la mer à tant le grain de sel,
Et vendent les châteaux à tant le grain de sable,
Aux flics, aux banquiers, aux notables,
À ceux qui font leur beurre avec la loi,
À la racaille qui nous juge,
Aux assassins qui nous gouvernent,
je ne dis pas je vous hais
mais je vous souhaite le malheur.

 


© Jean-Marc LA FRENIERE


Jean-Marc La Frenière (1948-2023)
Né au Québec dans la vallée du Richelieu, Jean-Marc La Frenière, poète de rue, a distribué sa poésie par l’intermédiaire des itinérants. Puis sur Internet, il a participé à des groupes d'écriture collective puis a publié dans des revues.
Du même auteur :
Chienne de vie

Son blog :
→ http://lafreniere.over-blog.net/



Le chant des partisans
Anna MARLY


y

Ami entends-tu
Le vol noir des corbeaux
Sur nos plaines.
Ami entends-tu
Les cris sourds du pays
Qu'on enchaîne,
Ohé partisans
Ouvriers et paysans
C'est l'alarme !
Ce soir l'ennemi
Connaîtra le prix du sang
Et des larmes…
Montez de la mine,
Descendez des collines,
Camarades.
Sortez de la paille
Les fusils, la mitraille,
Les grenades.
Ohé ! les tueurs
A la balle et au couteau
Tuez vite!
Ohé ! saboteurs
Attention à ton fardeau…
Dynamite…
C'est nous qui brisons
Les barreaux des prisons
Pour nos frères.
La haine à nos trousses
Et la faim qui nous pousse,
La misère.
Il y a des pays
Où les gens au creux des lits
Font des rêves.
Ici, nous vois-tu
Nous on marche et nous on tue
Nous on crève…
Ici, chacun sait
Ce qu'il veut, ce qu'il fait
Quand il passe
Ami, si tu tombes,
Un ami sort de l'ombre
A ta place.
Demain du sang noir
Séchera au grand soleil
Sur les routes.
Chantez compagnons,
Dans la nuit, la liberté
Nous écoute…
Ami, entends-tu
Les cris sourds du pays qu'on Enchaîne !…
Ami, entends-tu
Le vol noir des corbeaux sur nos Plaines.


© Anna MARLY


Anna Marly (1917-2006)
Chanteuse et guitariste française d'origine russe, compositrice du Chant des Partisans, dont les paroles françaises sont dues à Maurice Druon et Joseph Kessel. Elle est également l'auteure de La Complainte du Partisan popularisée par Leonard Cohen.
→ Sa biographie sur Wikipédia



Cap'tain Zombi
René DEPESTRE

y

Je suis Cap’tain Zombi
Je bois par les oreilles
J’entends avec les dix doigts
J’ai une langue qui voit tout
Un odorat-radar qui capte
Les ondes du cœur humain
Et un toucher qui perçoit
À distance les odeurs
Quant à mon sixième sens
C’est un détecteur de morts
Je sais où sont enterrés
Nos millions de cadavres
Je suis comptable de leurs os
Je suis comptable de leur sang
Je suis peuplé de cadavres
Peuplé de râles d’agonies
Je suis une marée de plaies
De cris de pus de caillots
Je broute les pâturages
De millions de morts miens
Je suis berger d’épouvante
Je garde un troupeau d’os noirs
Ce sont mes moutons mes bœufs
Mes porcs mes chèvres mes tigres
Mes flèches et mes lances
Mes laves et mes cyclones
Toute une artillerie noire
À perte de vue qui hurle
Au cimetière de mon âme !
 

Écoutez monde blanc
Les salves de nos morts
Écoutez ma voix de zombi
En l’honneur de nos morts
Écoutez monde blanc
Mon typhon de bêtes fauves
Mon sang déchirant ma tristesse
Sur tous les chemins du monde
Écoutez monde blanc !

 

Le sang nègre ouvre ses vannes
La cale des négriers
Déverse dans la mer
L’écume de nos misères
Les plantations de coton
De café de canne à sucre
Les rails du Congo-Océan
Les abattoirs de Chicago
Les champs de maïs d’indigo
Les centrales sucrières
Les soutes de vos navires
Les compagnies minière
Les chantiers de vos empires
Les usines les mines l’enfer
De nos muscles sur la terre
C’est l’ écume de la sueur noire
Qui descend ce soir à la mer !

 

Écoutez monde blanc
Mon rugissement de zombi
Écoutez mon silence de mer
O chant désolé de nos morts
Tu es mon destin mon Afrique
Mon sang versé mon cœur épique
Le pouls marin de ma parole
Mon bois-d’ébène mon corossol
Le cri des arbres morts en moi
L’écho de leur sève dans ma voix
Ma race tel un long sanglot
Qui cherche ma gorge et mes eaux
Qui cherche en moi le bras de mer
Où l’Afrique arrache son cœur
Écoutez monde amer monde blanc
Mon chant d’agonie ma vie ce chant
Qui marie en mon corps le vent
Et la vague, le ciel et l’enfer !

 

© René DEPESTRE


René Depestre (1926-aujourd'hui)
Poète, romancier et essayiste haïtien, René Depestre publie en 1945 son premier recueil de Poèmes, Étincelles. Activiste politique, il doit quitter Haïti après l'arrivée au pouvoir d'un régime militaire. Il s'installe à Paris et y suit des cours à la Sorbonne. Il rejoint Cuba en 1959 et soutient le nouveau régime de Fidel Castro, puis déçu par l'orientation de la révolution notamment après l’affaire du poète cubain Heberto Padilla en 1971, René Depestre décide de quitter l’île en 1978. Installé à Lézignan-Corbières dans les années 1980, il poursuit son oeuvre d'écrivain-poète et reçoit le prix Renaudot en 1988.
Autre texte :
Est-ce-vrai ?
→ Biographie détaillée sur Wikipédia



Épigrammes
Ernesto CARDENAL

y

J’ai distribué des feuilles clandestines,
crié « Vive la liberté ! » en pleine rue,
défié les policiers armés.
J’ai pris part à la rébellion d’Avril :
mais je pâlis quand je passe devant chez toi
et ton seul regard me fait trembler.

 

© Ernesto CARDENAL


Ernesto Cardenal (1925-2020)
Prêtre catholique, théologien, poète et homme politique nicaraguayen, Ernesto Cardenal est quelque temps moine trappiste. Il devient une figure importante du Nicaragua, dont il est ministre de la Culture de 1979 à 1987. Sous l’influence de Pablo Neruda, il écrit des poèmes au rythme élégiaque d’une grande prolixité dans la métaphore. Vers 1950, il s’enthousiasme pour l’histoire centraméricaine et écrit sur des sujets épiques ou historiques. Dans les années 1970, il est le représentant principal du courant poétique extérioriste.
→ Sa biographie sur Wikipédia



Sans la nommer
Georges MOUSTAKI


y

Je voudrais, sans la nommer, Vous parler d'elle Comme d'une bien-aimée, D'une infidèle, Une fille bien vivante Qui se réveille A des lendemains qui chantent Sous le soleil.

 

C'est elle que l'on matraque, Que l'on poursuit que l'on traque. C'est elle qui se soulève, Qui souffre et se met en grève. C'est elle qu'on emprisonne, Qu'on trahit qu'on abandonne, Qui nous donne envie de vivre, Qui donne envie de la suivre Jusqu'au bout, jusqu'au bout.

 

Je voudrais, sans la nommer, Lui rendre hommage, Jolie fleur du mois de mai Ou fruit sauvage, Une plante bien plantée Sur ses deux jambes Et qui trame en liberté Ou bon lui semble.

 

C'est elle que l'on matraque, Que l'on poursuit que l'on traque. C'est elle qui se soulève, Qui souffre et se met en grève. C'est elle qu'on emprisonne, Qu'on trahit qu'on abandonne, Qui nous donne envie de vivre, Qui donne envie de la suivre Jusqu'au bout, jusqu'au bout.

 

Je voudrais, sans la nommer, Vous parler d'elle. Bien-aimée ou mal aimée, Elle est fidèle Et si vous voulez Que je vous la présente, On l'appelle Revolution permanente

 

C'est elle que l'on matraque, Que l'on poursuit que l'on traque. C'est elle qui se soulève, Qui souffre et se met en grève. C'est elle qu'on emprisonne, Qu'on trahit qu'on abandonne, Qui nous donne envie de vivre, Qui donne envie de la suivre Jusqu'au bout, jusqu'au bout Jusqu'au bout, jusqu'au bout Jusqu'au bout, jusqu'au bout Jusqu'au bout

 

© Georges MOUSTAKI


Georges Moustaki (1934-2013)
Auteur-compositeur-interprète naturalisé français, Georges Moustaki est né en Egypte à Alexandrie. Ses parents Nessim et Sarah sont grecs et originaires de l'île de Corfou. Il passe son enfance dans un environnement multiculturel. Inscrit dans une institution française, il se passionne pour la littérature et la musique. Il rejoint Paris à l'âge de 18 ans et fréquente les cabarets. Il rencontre plusieurs artistes dont Henri Salvador et Georges Brassens. En 1958, il rencontre Edith Piaf et lui écrit son plus grand succès Milord. Il compose également pour Yves Montand, Barbara, Dalida et Serge Reggiani. En 1969, il enregistre Le Métèque qui lance sa carrière de chanteur. Infatigable voyageur, il rencontrera les grands noms de la musique brésilienne et ses compositions s'inspireront de ses voyages et des différentes cultures qu'il côtoie.Très prolifique, Georges Moustaki est l'auteur de plus d'une vingtaine d'albums et a également composé des musiques de films. Il meurt à Nice le 23 mai 2013 d'un emphysème pulmonaire. Il repose au cimetière du Père-Lachaise.
Autre texte :
Ma liberté

→ Sa biographie sur Wikipédia



Le mur de Berlin
Ebrahim HUSSEIN

y
J'avais fait un rêve
C'était bien un rêve
Ils avaient pris le nom des travailleurs
Pour construire un royaume
Qui n'avait ni principes, ni regard ni narines

J'avais fait un rêve
C'était bien un rêve
En un rien de temps
Le mur tomba
Ce mur sans principes, sans cou, sans dignité

J'avais fait un rêve
C'était bien un rêve
Ce n'était qu'un mur- une machine à tuer
Rouge de la couleur
Du sang des enfants qu'il avait tués

Joie
Il y eut de la joie
A voir des murs liés à des murs
des murs faire tomber des murs
Qui n'avaient ni principes, ni humanité

Des murs
Qui n'étaient que des murs, des machines à tuer
Il y eut de la joie
De la dignité
Sensible et savante

 

Ukuta wa Berlin

Nilivyoota
Ndivo ilivyo kuwa
Jina la mfanya kazi, walichukuwa
Kujenga ufalme wao
Uso msingi, macho wala pua
Nilivyoota
Ndivo ilivokuwa
Muda haukuchukuwa
Ukuta ulianguka
Haukuwa na msingi, kiuno au muruwa
Nilivyoota
Ndivo ilivokuwa
Ulikuwa ukuta tu - mashine ya kuua
Rangi yake nyekundu
Ni damu ya vijana ilivyowaua
Furaha
Furaha ilikuwa

Kuona kuta zilizoshikana na kuta
Kuta kuinangukia kuta
Zisizo msingi, zisizo muruwa
Kuta
Zilikuwa kuta tu, mashine za kuua
Furaha kujuwa
Kuna muunngwana
Mwenye hisi mwenye kujua

 

 

© Ebrahim HUSSEIN

Ebrahim Hussein (1943-aujourd'hui)
Dramaturge et poète tanzanien, Ebrahim Hussein a écrit sa première pièce, Kinjeketile en 1969, en langue swahili, et basée sur la vie de Kinjikitile Ngwale, un chef de la rébellion Maji Maji. Elle est considérée comme "un monument du théâtre tanzanien". Poète en langue swahili, il n'a pas publié de recueil, seulement quelques textes publiés dans divers ouvrages.
→ Sa biographie sur Wikipédia (en anglais)






m

Votre poème ici
Envie de rejoindre l'anthologie virtuelle permanente ? N'hésitez pas à m'envoyer vos textes avec une mini biographie (facultatif mais conseillé !).
Voir les détails ici.
Courriel : poetika17(arobase)gmail.com
-------------
Nota : les textes publiés sur cette page ont fait l'objet d'une demande par courriel à leurs auteurs respectifs (sauf bien entendu aux poètes disparus et certains auteurs-compositeurs-interprètes), ou bien ils sont envoyés spontanément par les auteurs publiés. Et sauf mention spéciale, toutes les images proviennent de pixabay.com.
------------
Le Monde de Poetika
Site & Revue de poésie en ligne
N° ISSN : 2802-1797

→ Textes sur cette page
Quand France rime avec violence de Jacky Couralet
Sainte-Soline de Philippe Salort
Insurgé de Michel Bunel
Tout à fait Thierry ! de Laurent Orsucci
Vox populi de Catherine Destrepan
Gill’&Jaune ? de Alhas Fonean
Résistance de Renée Virlogeux Boron
J'ai obéi de Philip Kie
Oser la résistance de Jean-Charles Paillet
Mouvement perpétuel de Didier Colpin
Pluton en Verseau de Laurent Orsucci
Tirade de la Covid 19 de Claude Dussert
Fragile société d'aujourd'hui de Gaëlle-Bernadette Lavisse
Liberté, où es-tu ? de André Laude
Le prestige de Laurent Orsucci
Abîmes de Sedna
Volcans de colère de Mokhtar El Amraoui
Indigne-toi de Christian Satgé
Rébellion de Sylvie Crochard
Monsieur le Président de Yvan Buonomo
Je proteste de Louis Aragon
Je crie pour les enfants perdus de Alain Bosquet
Bella ciao
Magouille blues de François Béranger
Aux atroces impunis de Jean-Marc La Frenière
Le chant des partisans de Anna Marly
Capt'ain Zombi de René Depestre
Epigrammes de Ernesto Cardenal
Sans la nommer de Georges Moustaki
Le mur de Berlin de Ebrahim Hussein

Sur le même thème
Le chant des prostituées de Grisélidis Réal
Paris Mai de Claude Nougaro
Marron de Claudine Hillard
Le déserteur de Boris Vian
Décadence de Maguy de Coster
Douze de Alexandre Blok
Chanson de cirque de Louise Michel
Je dis NON de Paul Valet
Errebelde Naiz de Nadia Padilha
Je suis un insurgé de Vik Thor