Au fil de l'eau
Laissez vous porter par les vagues de la poésie...



Le petit monde de l'humidité
Annie VITI

y

Une larme, une goutte,
Voilà l‘eau en déroute,
De tristesse elle ruisselle,
De fraîcheur elle excelle.
La vapeur a ses bouffées,
Toutes chaudes de retombées.
Sur les vitres elle glisse,
La condensation l‘excite.
La rosée les fait perler.


Pourrions nous les récolter ?
On aimerait breveter
Le collier de la rosée !!


Petites ou grosses sous la pluie,
Les gouttes nous font courir,
Ou bien ouvrir les parapluies,
A Cherbourg, on joue la comédie !!


Le vase s‘est bien habitué,
A celle qui le fait déborder.
Le lac paisible les reçoit,
Pour lui, ces ronds sont de l’émoi.
Béni -soit les gouttes du ciel,
Elles aiment rafraîchir la terre.
Et de quelles gouttes qu‘il soit,
Aucune d ‘elles ne se noie,
L‘évaporation s‘y emploie.


© Annie VITI


Annie Viti (1944-aujourd'hui)
Gribouilleuse à temps perdu et au gré de sa fantaisie, Annie Viti écrit juste pour le plaisir et le partage.
Autre texte :
Encore et toujours 
→ Sa page Facebook



Le lavoir
Albert MÉRAT

y

Une source descend de la roche brunie :
Les filles de Plomar viennent laver au bas
Aux coups vifs des battoirs se mêle le fracas
Que fait le flot, et c'est une forte harmonie.


Comme devant l'autel sur la dalle bénie,
A genoux sur le roc, les pieds nus et nu-bras,
Les filles aux yeux clairs ne vous regardent pas,
Et leur visage est pur comme la mer unie.


Bleuie en longs filets parmi les galets blancs,
La source fait un doux bruit de grelots tremblants
Que l'Océan bientôt étouffe sous sa lame ;


Et les femmes qui sont la grâce du tableau
Se penchent, laissant mordre au matin qui s'enflamme
Leurs beaux bras ruisselants de gouttelettes d'eau.


© Albert MÉRAT


Albert Mérat (1840-1909)
Poéte français, Albert Mérat a fait partie des poètes parnassiens, tout comme Théophile Gautier, José-Maria de Heredia, Théodore de Banville, Charles Baudelaire, Stéphane Mallarmé, François Coppée, Verlaine, Rimbaud. Il était loué par les poètes de son époque. Rimbaud le considérait comme visionnaire et en faisait, presque, l'égal de Verlaine, qui lui dédia son poème Jadis.
Autres textes :
Le bonheur 
Les parfums
→ Sa biographie sur Wikipédia



Déluge sur Berlin
Nathalie LAURO

y

Le vent se lève
On tremble tous
Les prévisions
N'étaient pourtant
Pas pour chez nous...
Pour bien plus loin

 

Ça finira
Dieu sait comment.

 

Juste un ruisseau...
Une rivière...
Puis ça jaillit
De toutes parts

 

Je cours, je cours
L'eau aux chevilles
Du cinquième on ne risque rien

 

De ma fenêtre je peux voir
L'inondation en contrebas
Le cœur serré je prie alors
Pour les passants encore dehors.

© Nathalie LAURO


Nathalie Lauro
Ecrivaine, poétesse et artiste numérique, Nathalie Lauro travaille à partir de ses photos shootings. Elle aime photographier les villes comme Berlin, Londres, Paris, Hambourg et Amsterdam mais sa spécialisation reste le sud, la Méditerranée, le soleil, les couleurs, les lumières et la Dolce Vita. Elle est par ailleurs présidente de l'association Luna Rossa.
Autres textes :
→ Cours d'eau tu chantes
→ Octobre sombre

→ Découvrir son dernier recueil
→ Site de l'association Luna Rossa
→ Son site : http://www.nathalielauro.com/



En forêt
Michel BUNEL

y

Il bruine ce matin, et mon âme est dolente
Ma rêverie m’entraîne au cœur de la forêt
Jusqu’à ce ruisselet qui dévale la pente
Où assoiffé je viens pour me désaltérer.

Il pleut et volontiers, je m’imagine mousse
Odorante, humus, et, pourquoi pas, champignon,
Girolle ou cèpe, qu’importe puisque je pousse,
Je finirai poêlé, ça n’est pas mes oignons.


Je marche doucement, à l’allure limace,
Gravissant la colline, abreuvé de vapeur,
Des bruits, des craquements, mais je n’en ai pas peur
Ici, je viens toujours dans un état de grâce .


Rien ne vient me troubler au cœur même du songe,
Pas même l’écureuil au glissement furtif
Ni la griffure d’un épineux arbustif,
L’accalmie tardant, mon rêve se prolonge.


Quand demain le soleil aura séché les feuilles
Revêtant ma parka, chaussant mes brodequins
Je prendrai dans ma poche, un couteau, un bouquin,
Un sac pour ramener tout ce que je recueille.


Et j’irai retrouver au plus tôt cet espace,
Cet air vif et puissant emplissant mes poumons,
L’intimité des arbres qui peuplent ces monts,
Y dérangeant sans doute un auguste rapace.


© Michel BUNEL


Michel Bunel (1952-aujourd'hui)
Depuis toujours, Michel Bunel écrit des poèmes, mais il lui a fallu arriver à 70 ans pour oser en publier. Auparavant, il s'est contenté de les collecter dans des cahiers puis de les poster sur des groupes de poésie, sur Yahoo Groupes, puis sur Facebook. Son écriture doit beaucoup à Georges Brassens - qu'il a aimé chanter - pour l'humour, la provocation ou la dérision, pour la versification aussi.
Autres textes :
→ Fifi
→ Insurgé
→ Sa page Facebook



Le Lignon à Jaujac
Jean-Charles PAILLET

y

Une pluie soudaine
et voici la promesse d’une rivière
sautillante de fraîcheur
au cœur d’un été
souffle court
proche de l’évanouissement


Dans sa mémoire
coule le bleu des montagnes
et une part de mystère
jusqu’aux fontaines assoiffées
d’un proche village


Nul besoin à cette eau pure
de chercher une autre pente
Sans un écart elle s’abandonne confiante
à un passage maintes fois éprouvés
parfaitement sûr et fiable
à l’image de la sagesse paysanne


Elle va par où passe le temps
noyant ici et là galets et rochers
imitant parfois de lointaines cascades
entraînant avec elle un fouillis
de terre de branches et de bruit


Plus loin face aux cieux
et aux limites de ses rives
cette eau limpide avide de couler
garde en son sein le secret espoir
de parcourir le monde à sa guise
un monde sans aucune frontière

Crédit photo : Jean-Charles PAILLET, Le Lignon à Jaujac

© Jean-Charles PAILLET

Jean-Charles Paillet
Jean-Charles Paillet est animé par l’instant présent et les belles valeurs qui élèvent le coeur et l’âme... Sa poésie se retrouve dans ses dessins, ses photographies et ses chansons. Sa rencontre avec Yves Broussard est un tournant dans sa vie de poète.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
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Marée noire
Claude DUSSERT

y

Quand la mer s’est parée d’un affreux manteau noir
Quand la plage incendiée est devenu mouroir
Quand l’oiseau mazouté a refermé ses ailes
J’ai pris la décision de me faire la belle.


Je me suis fait la belle aux confins illusoires
D’un été meurtrier plein de rêves et d’espoir
J’ai repeint, vite, vite, la mer en bleu et vert
Avant que ne reviennent les neiges de l’hiver.


Dans le soleil drapé d’un clair-obscur majeur
J’esquisse en filigrane un filet de blancheur
Avant d’être drossé comme un banal steamer
Balloté ivre et fou saoulé d’embruns amers.


Où vais-je jeter l’ancre ? Au nez des garde-côtes !
J’ai jeté mon stylo à encre dans les chiottes
Je vous pisse à la raie, faiseurs de marée noire
Mais je pisse de l’encre, mais je pisse de l’encre.


Je trempe alors mes doigts dans la mer fiouletée
Et j’arrache la plume d’un cormoran mort-né
Pour écrire mon dégoût en lettres majuscules
Au fronton de ma haine tournée en ridicule.


Dauphin c'en est assez, ne joue plus car j’enrage
Dauphin c’en est assez, montre-moi le passage
Que tous les cétacés empruntent de mémoire
Invente à ma raison des raisons de te croire.


J’ai pris ma décision, conscient de ce foutoir
Quand la plage dépotoir est devenue mouroir
Quand mon frère l’albatros a refermé ses ailes
J’ai pris la décision de me faire la belle.


© Claude DUSSERT


Claude Dussert (1947-aujourd'hui)
Poète, nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être membre de nombreuses associations. Il participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité à compte d’auteur cinq recueils de poésie et un recueil de nouvelles. Il a également remporté de nombreux prix de poésie.
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Allons rêver le vent
José DELATTRE

y

Au bord de l’océan…
Étendus sur la plage,
Nous sommes venus rêver,
Et le vent du grand large,

 

Et la brise marine  !
Nos corps, la peau saline,
Se frôlent jusqu’à s’aimer,
Jusqu’à devenir amants.

 

Laissons le vent gémir,
Et le flot murmurer,
Laissons la mer chanter,
Pour pouvoir devenir…

 

Amants d’éternité,
Notre amour quat’ saisons,
Pourra rêver le vent,
Aux vagues de l’océan.

 

Lutter face aux embruns  !
Tout le bonheur du monde,
Est dans l’inattendu,
Dans la recherche intense,
De nos bonheurs perdus,
Dans la quête insolente,

 

Du grand amour à deux,
Qu’on rêve dans le vent.

 

Rêver du vent des plaines,
Du bruit d’eau des fontaines,
Dans le chant des sirènes,
Se murmurer "je t’aime"

 

Au vent des alizés…
Vite hisser la grand voile,
Accrocher ses pensées,
À la nuit des étoiles  !

 

Viens, partons vers le Levant,
Allons rêver le vent  !
Viens, la mer nous appelle
Sa complainte est si belle
Vois, la grand voile se tend,
Sous la force du vent  !

 

Vite, montons à bord,
Partons toute voile dehors
Voguer au gré des flots
Nos deux cœurs en écho

 

Partir à l’aventure  !
Sur cette mer d’azur
Trouver une île perdue
Sur une mer inconnue
Et vivre en Robinsons,
L’amour et ses frissons  !

 

© José DELATTRE - 28/10/2017


José Delattre (1944-2021)
Epicurien de nature, amoureux de la faune et de la flore, de l'univers, de la vie et de l'amour, les poésies de José Delattre sont un délicieux voyage à découvrir ! Marié très jeune avec l’unique amour de sa vie, son « Image d’Epinal », ils ont ensemble fondé famille et cueilli chaque jour l’aube sacrée dans le jardin fleuri de leur amour sans faille … Outre son métier de dessinateur industriel, il a été acteur de théâtre dès l'âge de 8 ans, metteur en scène jusqu'à l'âge de 76 ans et écrivain poète, José a toujours été de la fête ! Il s'est toujours investi à fond dans tous les projets qu'il a lancés et a toujours fait preuve d'un sens inné de l'accueil peu importe l'âge et sans faire de différence !
Autres textes :
→ Poète dans l'âme
→ Printemps
Recueils publiés :
→ Mon image d'Epinal
→ D'aventures en aventures
Son blog (posthume) :
→ https://jose-delattre-poesies.blogspot.com/



Clapotis d'été
Elea LAUREEN

y

Comme hypnotisée
Je me régale à regarder
Rebondir de soupir
Ces bulles cristallines
Instantanées divines

 

Fraîcheur légère
D'un été d'enfer
Qui perlent en cadence
Et ricochent en séance

 

D'un joli clapotis
Murmure de non-dits
Souffle de cette nature
En doléance qui sature

 

Flic flac pleure l'eau
De ses satins regrets
Éclaboussant ma peau
En frissons raffinés

 

Souriant sous la pluie
Qui m'inonde de joie
Quand le rai de soleil
Traversant toutes ces perles

 

Sublima d'éclats
Le plus bel arc-en-ciel
Et mon sourire explosa
De ses plus jolies voyelles !

 

© Elea LAUREEN


Elea Laureen
Inscrite depuis peu sur les réseaux sociaux, Elea Laureen a découvert l'opportunité d'y publier ses créations, la poésie étant pour elle une véritable thérapie. Elle a publié deux recueils : Comme une évidence et Mon vol d'hirondelle.
Autres textes :
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site

Ses blogs :
https://elealaureen-poiesis.com
https://elealaureen.webador.be/
https://www.facebook.com/Elea.Laureen/



Ballade de la carpe
Michel MIAILLE

y

Là, tout au fond de vos rivières,
Je vais de partout promener,
Dans les herbes ou les gravières
Où je me plais à lambiner.
J’aimerais aussi chantonner
Tous ces doux refrains de poète
Qui savent tant vous fasciner,
Hélas, je suis toujours muette.


Dans un torrent, loin des lumières,
Je cours souvent cabotiner
Près de mes plantes familières
Où chacun s’en vient pour flâner.
J’essaye souvent d’imaginer
Des poissons me contant fleurette
Tout en me faisant frissonner,
Hélas, je suis toujours muette.


Dans le cours des eaux printanières,
J’adore aussi m’abandonner
Dans des douceurs très singulières
Qui sauraient presque m’enchaîner.
Mais quand il est temps d’hiverner,
Au mois de la froideur secrète,
Je voudrais tant libertiner,
Hélas, je suis toujours muette.


Princes, vous rêvez d’un dîner
Avec ma chair dans votre assiette.
Pour ça, je voudrais vous damner,
Hélas, je suis toujours muette.


© Michel MIAILLE


Michel Miaille (1951-aujourd'hui)
Poète, auteur de sketches et de pièces de théâtre, Michel Miaille est retraité du Ministère de l'environnement et membre de la SACEM. Il a obtenu plusieurs prix de poésie, notamment avec des poèmes en langue provençale, et participe à des anthologies. Il a publié plusieurs recueils.
Autres textes :
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site



La goutte d'eau
Arnaud COMBET

y

Légère sur la vitre

Humide sur ta main

Eau qui s’infiltre

Vers toi vers demain


Fragrance mouillée

Limpide dans tes yeux

Une part de vérité

Qui crée un autre lieu


Vase qui déborde

De rien de si peu

L’âme se raccorde

Et livre son vœu


© Arnaud COMBET


Arnaud Combet (1972-aujourd'hui)
Proviseur de lycée à Figeac dans le Lot, Arnaud Combet a été pendant 12 ans professeur de Sciences Économiques et Sociales, avant de prendre la direction de plusieurs établissements scolaires (en Occitanie). Il a publié une biographie de David Ricardo (économiste écossais), un manuel scolaire et également participé à la rédaction d’un ouvrage collectif « Les grands Économistes » paru en 2012. Il écrit depuis toujours de la poésie, des textes, des chroniques et vient de terminer la rédaction son premier recueil de poèmes «  Poèmes des matins tôt ».
Autre texte : → Un autre chemin
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J'étais un petit ru...
Renée VIRLOGEUX BORON

y

J'étais un petit ru, né au hasard
Des ondulations de la terre
Et du ciel ombrageux.
Ils m'ont déposé là, certains de bien faire,
Sous les bruyères et les feuilles mortes.
Je me faufilais entre ronces, branchages,
Et pentes douces vers le village.
Je pensais grandir en toute liberté.
J'ai accepté les lavoirs au bonheur des dames,
Les abreuvoirs, les gués étroits.
J'étais heureux, mes berges joyeuses
Avec l'espoir d'une vie sans fin.
J'ai sauté de pierre en pierre,
Bousculé quelques herbes folles,
Nourri les prairies et champs voisins.
J'ai chanté avec les oiseaux
Aboyé avec les chevreuils,
Abreuvé le bétail, et les oies de passage.
Je rejoignais enfin la rivière
Heureux du travail accompli,
Les hommes n'ont rien compris
Ils ont démoli tous mes lavoirs,
Mes abreuvoirs, mes gués étroits,
Capté ma source, supprimé ma liberté
Je ne suis plus qu'un filet d'eau trouble.
J'étais un petit ru heureux.


© Renée VIRLOGEUX BORON


Renée Virlogeux Boron (1939-aujourd'hui)
Renée Virlogeux Boron s'adonne à la poésie pour son plaisir et écrit aussi des nouvelles. Elle travaille la terre aux Ateliers d'Art de Château-Thierry. Elle aime également peindre et a pris quelques cours de calligraphie. Elle a ouvert une petite bibliothèque dans sa commune qui compte 83 habitants. C'est avant tout le plaisir de se rencontrer, d'échanger et... de jouer aux cartes.
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La lavandière
Catherine DESTREPAN

y

Elle caresse l’eau de ses mains abimées
Par la soude et le froid ainsi que les années.
Dans l’antique lavoir, plus un bruit de battoir
Déchirant le silence où l’onde se repose.
Il flotte dans les airs ce petit quelque chose
Comme un chagrin caché dans un ancien mouchoir.


Au temps du passé là, elle était lavandière,
Du matin jusqu’au soir au bord de la rivière
Elle frottait les draps souillés tout en chantant.
Cette femme aux bras nus dans sa fine chemise
Dévoilait les courbes d’une belle insoumise
Dont le reflet ne s’enfuyait pas cependant.


En étrillant le linge, en y traquant la crasse
De l’homme ou l’animal qui y laissait sa trace
Elle pensait sans doute à la postérité
Où l’eau sa douce amie aurait le premier rôle.
Mais la soif du profit fit perdre le contrôle
De toute une société empreinte d’avidité.


D’un métier du passé qui la rendait heureuse
Le souvenir profond d’une humble blanchisseuse
S’épanche sur la rive où jadis elle venait.
Elle ne retrouve plus là dans ce flot verdâtre
L’âme de cet endroit que l’on tente d’abattre
Constatant tristement tout ce qu’elle craignait.


A présent la beauté d’antan semble une gueuse
Revêtue à dessein d’une robe visqueuse,
En surface de l’eau s’égarent détritus,
Cadavres de poissons qui cherchent une tombe.
Dur combat à mener avant que ne succombe
Le ruisseau cristallin et ses atours perdus !

Illustration : Les Lavandières, Tableau de Daniel RIDGWAY KNIGHT (1839-1924)


© Catherine DESTREPAN


Catherine Destrepan (1956-aujourd'hui)
Comptable, Catherine Destrepan a jonglé toute sa vie active avec les chiffres avant de s'intéresser de plus près à la poésie, qui occupe aujourd'hui une grande place dans ses activités culturelles. Elle prête également sa voix de contre-alto au sein de plusieurs ensembles vocaux.
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Odonate demoiselle
Sharian DAVIDIAN

y
Une odonate demoiselle 
Sur le fil de l'eau se trémousse 
Et sans gêne aucune retrousse 
Ses ailes fines de dentelle. 

Devant ce ballet, aux aguets,
Leurs lances crevant la surface, 
Admirent ce dîner qui passe
Tout un bataillon de brochets,

Soupirant comme des amants 
— Après l'étreinte et la passion,
Quand le cœur retrouve raison —
Que sépare le jour naissant.

La libellule est amoureuse !
Presque nue sur un nénuphar 
Dans sa robe bleue que chamarrent 
Ses ailes longues et soyeuses.

Émergeant de vagues de friches
Qui roulent, vertes, sur les bords
Où des roseaux racés arborent 
Leurs barbes de velours postiches,

Un berrichon, — une bourrique ! —
Pauvre moitié de canasson 
Assoiffée comme un échanson, 
Observe ce bal sans musique. 


© Sharian DAVIDIAN


Sharian Davidian (1983-aujourd'hui)
Sharian Davidian vit et travaille à Bruxelles. Historien de l'art et journaliste de formation, il est poète et auteur pour la jeunesse aux éditions Beurre Salé (France).
Autres textes :
→ Aldébarans
→ Le baribal
→ Zeke Midas

→ Sa page Facebook



Au fil de l'eau
Gaëlle-Bernadette LAVISSE

y

Ecumes de mes mots
Lianes du temps
Emportées par le vent
Lune d’argent
Veille sur l’enfant
Poète en sommeil
Que tout émerveille
Liens tissés
A la source s’abreuver
Brillent les étoiles d’or
Reflet miroir sur l’eau jouant un quatuor
Au fil de l’eau
Défilent mes rêves
Balbutiement de sève
Celui cité plus haut
Parfum d’écumes de mes mots

 

© Gaëlle-Bernadette LAVISSE


Gaëlle-Bernadette Lavisse (1974-aujourd'hui)
Résidant dans le Pas-de-Calais, Gaëlle-Bernadette Lavisse est écrivaine-biographe, auteure et poète, militante et engagée. Elle anime des ateliers d'écriture depuis plusieurs années. Elle a organisé le Festival des lettres d'amour et d'amitié d'ici et d'ailleurs  depuis 2018, avec anthologie publiée à chaque fin de festival. Cette année, elle a lancé le Festival épistolaire en hommage à la nature qui fera également l'objet d'une anthologie, où il y a eu plus de 500 lettres, poèmes, et témoignages, deux collèges ont participé, ainsi que trois écoles primaires et maternelles, deux associations, et de nombreux particuliers de partout en France et dans le Monde. La catégorie Art Postal sur le thème de la nature, a remporté lui aussi un vif succès, avec prochainement des expositions dans les réseaux médiathèques du Pas de Calais.
Autres textes sur le site :
Fragile société d'aujourd'hui
Souris à la solitude...
La lettre (avec Laurent Orsucci)
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L'être de l'eau
Laurent ORSUCCI

y

J'ai parcouru bien des mondes depuis ma naissance, sous bien des formes.
Sur terre, mon origine reste incertaine, peut-être THEIA....ou pas, mais fille de GAÏA !
J'ai parcouru tant d'espèces depuis l'océan primordial.... de corps.
Et pourtant, je suis toujours restée la même, quel que soit mon état physique.
Amante, aimante, berceau de vie.
Une fois, j'avoue avoir tout submergé dans un déluge biblique.
Je suis Vie, je suis Mort.
Vivifiante, douce et câline au sein de vos palais.
Certains me respirent et vivent en mon seing, ou tout comme vous grâce à moi.
On m’absorbe pour être et parfois l'on s'y noie.
Est-ce là, la raison de votre jalousie, ne pas être encore plus proche de moi ?
Est-ce là, la raison de votre maltraitance ? !
Pourtant, je ne laisse aucun d'entre vous indifférent.
On se bat même pour moi !
Je suis l'essence-ciel, mémoire intemporelle du cycle de vie.
J'ai traversé toutes les ères !
Tout y est, là, stocké dans mes calottes.
Le bon comme le mauvais !
A chaque fois j'étais là.
De la naissance des premiers nés de GAÏA, du fruit de leurs amours sur la terre de Pangée, devenue pour vous continents.
De vos rêves d'infinis merveilleux, bâtisseurs de cités.
De vos cauchemars fratricides destructeurs, jusqu'aux camps de la mort j'étais là.
Je suis la mémoire du vivant, passé ou présent.
Des espèces... animales, végétales... des hommes.
L'indispensable élément !
Et demain ?
Que suis-je pour vous devenue... ?
 Si ce n'est la réserve naturelle de vos immondices.
Une déchetterie à mer ouverte, symbole de mépris et de bêtise.
Un septième continent !
En me traitant de la sorte, vous détruisez l'œuvre de l'existence.
Mes doux pôles se dispersant dans l'océan comme les larmes dans la pluie.
Un courant qui ralentit, que mes épaules ne pourront soutenir bien longtemps.
Avant que mon état physique, las de vous, ne se déchaîne et ne finisse dans une froideur des plus glaciale pareille au regard Méduse que vous me portez.
Persée, qui opposera le bouclier d'Athéna à telle folie ?
Que vous soyez suicidaires soit.
Mais qui vous donne le droit de détruire ce monde ?
Le reste du vivant....... mes autres enfants.
Est-ce donc cela votre destinée ?
Vous, les prétendus gardiens !
Êtres "civilisés " détruisant le présent qui leur a été offert, dans le meurtre prémédité d'une mère nourricière.
Alors, je vous implore une dernière fois, même si une déesse fondamentale n'a pas à le faire.
Mais pour le reste du vivant, et un peu pour vous aussi... Que voulez-vous c'est ma nature.
Cessez toute cette folie !
Et surtout, oui surtout....
Ne me mettez pas en colère.


© Laurent ORSUCCI


Laurent Orsucci (1969-aujourd'hui)
Résidant à Brest depuis peu, Laurent Orsucci est aide-soignant, auteur et poète, engagé depuis une prise de conscience suite à la crise du Covid. Partenaire de plume (et d'humour !) de Gaëlle-Bernadette Lavisse depuis sa participation au Festival épistolaire en hommage à la nature. Deux écritures complices pour un même but.
Autres textes :
Tout à fait Thierry !
Le prestige
Pluton en Verseau
Club Dorlothée
La lettre
(avec Gaëlle-Bernadette Lavisse)
→ Sa page Facebook



Cours d'eau tu chantes
Nathalie LAURO

y

Cours d’eau, tu chantes la Provence, 

               Comme le soleil et le vent,

                    Com’ les oiseaux,

                         Com’ les enfants.

 

Cours d’eau, tu chantes la Provence, 

               Entre le thym, le romarin,

                    Tu chantes fort,

                         Tu chantes bien.

 

Cours d’eau, tu chantes la Provence, 

               Parmi les rochers, les genêts,

                    J'aime sentir

                         Ton air très frais.

 

Cours d’eau, tu chantes la Provence, 

               Cours d'eau, tu vis, comme tu danses...

                         Avec toujours

                         Même élégance.


Extrait du recueil Petites douceurs camarguaises, Association Poétique Luna Rossa, 2022

Illustration : © Nathalie LAURO

© Nathalie LAURO


Nathalie Lauro
Ecrivaine, poétesse et artiste numérique, Nathalie Lauro travaille à partir de ses photos shootings. Elle aime photographier les villes comme Berlin, Londres, Paris, Hambourg et Amsterdam mais sa spécialisation reste le sud, la Méditerranée, le soleil, les couleurs, les lumières et la Dolce Vita. Elle est par ailleurs présidente de l'association Luna Rossa.
Autre texte : → Octobre sombre
→ Découvrir son dernier recueil
→ Site de l'association Luna Rossa
→ Son site : http://www.nathalielauro.com/



Jeux d'eau
Annick PIPAUD

y

Gerbes d'eau, coulée d'âmes sur la terre.
Le tonnerre de vie éclate
en faisceaux brûlants et puissants.

Les ombres grises et rouges
strient les profondeurs
de zébrures discontinues.

Le spectre de la pluie
nourrit nos illusions.
la planète martyre agonise.

Son souffle s'affaiblit.
De la clepsydre s'écoule
inexorablement
cette alliance de lave et de cendres.


© Annick PIPAUD


Annick Pipaud
Professeur de mathématiques à la retraite mais artiste dans l'âme (peinture, photo, poésie...), Annick Pipaud écrit depuis son plus jeune âge. Elle a participé à plusieurs festivals de poésie.
Autre texte :
→ Le goéland



Aldébarans
Sharian DAVIDIAN

y
Des cascades tombent, charmantes,
Dans des bassins dont les eaux chantent
— Oh ! Ces eaux aux reflets d'étain ! —
De mélancoliques refrains ;

Des arbres secs aux feuilles rouges
Et dont pas un rameau ne bouge 
Caressent de leurs longs doigts fins 
Les trèfles verts, sur le chemin ;

Dorés, des rayons se fracassent 
Sur un frêle ruisseau qui passe
Et qui s'égare en gémissant 
Entre des rochers bleus et blancs.

Leurs troncs tordus comme des serres,
Les ajoncs poussent dans les pierres,
Et leurs pétales éclatants
Sont de petits aldébarans.


Texte écrit à Kenmare, Irlande, 5 mai 2023.

Illustration Sharian DAVIDIAN


© Sharian DAVIDIAN


Sharian Davidian (1983-aujourd'hui)
Sharian Davidian vit et travaille à Bruxelles. Historien de l'art et journaliste de formation, il est poète et auteur pour la jeunesse aux éditions Beurre Salé (France).
Autres textes :
→ Odonate demoiselle
→ Le baribal
→ Zeke Midas

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Les fleuves
Philippe PAUTHONIER

y

Les fleuves naissent au creux d'un vallon
En perçant la mousse entre deux touffes d'ajonc.
Rus montagnards aux eaux si cristallines,
Sur les pentes verdoyantes, ils cheminent.

Ils jouent à saute - mouton avec les rochers,
Enfants turbulents, folles chevauchées,
Et dans le soleil, des gerbes d'étincelles,
Gouttelettes irisées couleurs arc-en-ciel.

Ils serpentent de clairières en prairies,
Ignorent encore tout de la vie.
Ils se marient avec d'autres ondes,
Deviennent plus forts, veulent changer le monde.

Ils traversent bourgades et villages
Et perdent leur impétuosité avec l'âge.
Les hommes les exploitent, les souillent,
De leur transparente beauté les dépouillent.

Ils comprennent qu'ils glissent vers l'océan,
Inexorablement avec la fuite du temps.
Ô maudite gravitation universelle,
Avec ses conséquences les plus cruelles !

Ils appréhendent de disparaître dans la mer,
D'être noyés dans ce maritime univers.
Ils freinent leurs courses avec des stratagèmes :
Majestueux méandres à la lenteur extrême...

Mais, on n'inverse jamais le cours des rivières,
Et, de guerre lasse, ils se jettent dans la mer.
Se retrouvent-ils au paradis ou en enfer,
Avec les dauphins nagent-ils de concert ?


© Philippe PAUTHONIER


Philippe Pauthonier
Après une carrière d'ingénieur, Philippe Pauthonier partage aujourd'hui sa vie entre la France et la Pologne, pays de son épouse. Cet élan entre deux pays, deux cultures et ses longs séjours dans la sérénité de la campagne polonaise, loin du monde et de son agitation, sont propices à sa créativité littéraire. Depuis sa retraite, il s'investit dans plusieurs associations oeuvrant au profit des Aveugles et Malvoyants. Mordu d'astronomie, il apprécie la communauté scientifique qui sait élargir le débat avec une réflexion globale, liant la science à une approche métaphysique et théologique. Philippe Pauthonier a publié dix recueils et reçu plus de 130 distinctions dans des concours de poésie.
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Mer-Mère
Mokhtar EL AMRAOUI

y

Ecumes, lait de mer !
Mer-Mère !
Qu'elle allaite nos rêves et nos voyages !

Qu'elle nous prenne,
Poissons ailés de nos souvenirs,
De nos belles errances,
De nos transes confondues,
Dans les tourbillons de nos danses,
Sur la fièvre des vagues qui nous enfantent,
Dans nos migrations.
Qu'elle nous apprenne à nous raconter,
A nous rencontrer,
A nous prendre,
A nous surprendre,
A nous suspendre
Dans les profondeurs de nos rêves
Qui nous disent toutes ces houles
Qui nous bercent
Et toutes ces îles qui nous dansent
Jusqu'aux rivages des étoiles lactées
Qui s'allument d'un feu premier nourricier.
Qu'il enflamme nos âmes
En lames d'espérances !

 

© Mokhtar EL AMRAOUI


Mokhtar El Amraoui (1955-aujourd'hui)
Poète d’expression française né à Mateur, en Tunisie, Mokhtar El Amraoui a enseigné la littérature et la civilisation françaises pendant plus de trois décennies, dans diverses villes de la Tunisie. Il est passionné de poésie depuis son enfance. Il a publié quatre recueils de poésie et plusieurs de ses poèmes ont été publiés sur Internet et en revues-papier.
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Clapotis
Linda CARA-JACOBI

y

Vague mauve pointillée,
Rive lascive d'alizés,
Ce crachat blanc perlé
Perle ton torse d'été
D'un crachin, sel lamé.

 

L'appel d'une calanque,
Charivari de pieuvres
Entraîne dans son grand fleuve
Les fanions qui balancent.

 

Effacée, engloutie,
La presqu'île de nos yeux,
Dans le plongeon aqueux
D'une baignade à l'envi.

 

Sable blanc sur ta croupe,
Des escales virevoltent,
Tu éprouves l'errance
Du phare qui se révolte.

 

Comme un radeau trop lourd,
Tu dérives jusqu'au sol
À ta prière est sourd,
Ce courant qui s'affole...

 

...Et la vague s'envole...

 

Du destin à venir
Toute la farce m'envahit,
Le hamac du hasard
Tangue ses embruns de vie.

 

Que les rêves nous emportent
De leurs sirènes de nuit,
Sémaphores de l'ennui
Quand les eaux se dérobent.


© Linda CARA-JACOBI


Linda Cara-Jacobi (1973-aujourd'hui)
Linda Cara-Jacobi est d'origine multi-culturelle, de parents et grands-parents hongrois, anglais, roumains et tchèques. Après des études de Lettres, passionnée d'art, elle quitte sa Suisse natale pour se rendre dans une école à Milan où elle se spécialise en stylisme. De retour à Genève, elle continue de créer pour des commandes privées, et revient désormais à ses premières amours de plume et d'encrier. Ses plages de joie sont les longues balades matinales en forêt, la salade de chèvre chaud et les crêpes à la confiture d'abricot, la musique électro, new wave ou rock, le cinéma indépendant, la photo, les courants artistiques et architecturaux Art Nouveau et Art Déco.
Autres textes :
Les rêves fous
Le jardin des murmures



De rus en rues
Christian SATGÉ

y

 

© Christian SATGÉ


Christian Satgé (1965-aujourd'hui)
Auteur prolifique, fabuliste et conteur éclectique, Christian Satgé est professeur d'histoire-géographie dans le département des Hautes-Pyrénées. Il a publié plusieurs recueils et une quarantaine de ses textes figurent dans Le Monde de Poetika.
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La pourpre salicaire
Etienne BUSQUETS

y

Une eau cavalière chevauche la chaussée…
Tumultueuse et fière, elle qui bondissait,
Comme un fleuve d’Homère au cœur de l’Odyssée,
La voilà qui s’enfuit maintenant policée ;

 

La voilà qui descend le long de la rivière
En oubliant l’amont qui la vit courroucée ;
La voilà qui taquine à l’îlot caressé,
La ligne et le goujon du pêcheur solitaire,

 

Puis qui dorlote au loin la pourpre salicaire,
En ondulant ses hampes de fleurs hérissées…


© Etienne BUSQUETS

Etienne Busquets
Poète fénassol d'origine catalane (village de Lafenasse dans le Tarn), il est sociétaire des Amis de Jean Cocteau et membre des Poètes sans Frontières de Vital Heurtebize à Orange. Il a remporté plusieurs prix de poésie et collabore dans plusieurs revues et anthologies.
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Deux barques sur l'étang
Roland MUHLMEYER

y

Deux barques sur l’étang, étourdies ou folles,
des forêts de sapins cognent dans ma tête,
sphaigne d’écume ou hêtraies de montagne ?
Tortueuses aux doigts noueux.
Le vent se lève,
oh ! Ce n’est si peu de choses.
Un rocher émerge, un ange sourit au portail,
eau triste et profonde :
trois bouleaux y veillent.

 

Sentier pavé,
tes pas sonnent sur cet étang
comme un glas en retard sur la note fa.
Ô sentier lassé,
ton échine cingle mes bras nus.
Ô sentiers, ou plutôt, routes tumultueuses.

 

Mon compagnon blanc,
mon inséparable silène,
sentier tumultueux.
Deux barques dorment, retour,
Et pourtant solitaire.


© Roland MUHLMEYER


Roland Muhlmeyer
Roland Muhlmeyer est guitariste classique de formation. Il apprend le chant lyrique, deux matières qu'aujourd'hui encore il enseigne. Il se spécialise par ailleurs dans le chant grégorien, qu'il a également enseigné. Il a écrit des poèmes dans sa jeunesse qui ont paru dans quelques publications. Après un long repos poétique, il s'est remis à écrire. Il a le souci du rythme, des couleurs, des mots dans ses textes qu'il traite comme une partition de musique contemporaine.
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La mer poule : nature indomptable
Sylvie CROCHARD

y

Tel un serpent, la mer crache son venin
Elle s’enrage en un tour de main.
Impossible de la domestiquer :
La mer est naturellement compliquée.
Qui voudrait la dompter ?


Elle a inspiré toute sorte de gens,
Des poètes, écrivains, photographes, peintres,
Tous l’art et la science aimant
Portant un œil curieux
Sur cette grande immensité bleue.


La mer est craintive, elle a la chair de poule
Quand elle est jaune poussin
Elle avance au rythme de la houle
Et se retire là bas au loin
À marée basse.


Elle couve sa progéniture
Et en fait une sorte de culture
Elle regorge de fruits de mers
D’huîtres marinières.
Et de poissons à foison.


La mer nous inspire mais nous rebute à la fois
Encore faut-il savoir nager pour l’aimer de surcroit
S’il l’on veut pouvoir rester en vie
Même si l’on est un nageur ou plongeur aguerri.
Parfois les courants nous surprennent.


La mer a ses humeurs, tout comme l’être humain
Tantôt elle semble triste et pleurante
Tantôt elle est gaie et entraînante.
Auprès d’elle on se sent généralement bien.
Les enfants adorent patauger sur ses rivages.


Féminine, la mer est toujours coquette.
Le matin elle semble s’apprêter
Comme une jolie poupée iodée
Elle est quelque peu dévergondée
Et se met à nue.


Schizophrène, bipolaire ou maniaco-dépressive,
La mer souffre de ses maux
Et est empreinte de chagrin, lascive.
Elle est fébrile et fiévreuse.
Elle tremble et vient s’échouer sur le rivage.


Lorsqu’il y a des intempéries
La mer tombe du ciel et abonde
S‘abattent vent et pluie
Le tonnerre gronde
La tempête s’annonce.


La mer, parfois sacrée,
Ne nous lassera jamais.
Elle joue à pile ou face
Elle enfouit des cités.
Et à jamais les efface.

 

© Sylvie CROCHARD


Sylvie Crochard (1976-aujourd'hui)
Ouvrière en milieu protégé, Sylvie Crochard a publié plusieurs recueils. Passionnée de piano, elle s’inspire également de la musique dans ses poèmes.
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Sa page Facebook : → https://www.facebook.com/poetecrochard



La source
Edmond VANDERCAMMEN

y
Voici jaillir tes simples eaux,
Extase encore des ténèbres ;
Au pied d’un saule une fenêtre…
Et c’est la mer et ses vaisseaux.

L’anguille qui déjà repart
Promène un songe dans l’espace ;
Jusqu’aux frontières des Sargasses,
Elle aimera dans ton miroir.

Tu roules les saisons du cœur,
Belle avalanche des vallées,
Neige lascive délivrée
Des hauts sommets de ton bonheur.

Tu viens de plus loin que le vent,
Que l’ombre et ses troupeaux nomades ;
Mais tu sais bien que ta croisade
Est vanité sur l’océan.

Au pied d’un saule, ô simples eaux,
Rêvez quand même de vaisseaux.

© Edmond VANDERCAMMEN

Edmond Vandercammen (1901-1980)
Peintre et poète belge d'expression française, Edmond Vandercammen a été marqué par son enfance paysanne, qui a fait de lui un terrien obstiné. Instituteur et professeur de français, il étudie ensuite à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles de 1921 à 1924. Il participe activement à l'avant-garde belge durant une quinzaine d'années. Il abandonne la peinture à la fin des années 1930 pour se consacrer à la poésie et sera l'un des meilleurs traducteurs de la poésie hispanique. Il est élu membre de l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique en 1952 et remporte le Grand Prix International de poésie en 1977.
→ Sa biographie sur Wikipédia



Les cocotiers
Alcide BARET

y

Sous la brise du large, au déclin du soleil,
Les cocotiers géants bercent leurs chevelures ;
Leurs palmes doucement vibrent au soir vermeil
Ainsi qu’en haut des mâts de chantantes voilures.


Le refrain de la mer, à leur chanson, pareil
Glisse sur le rivage aux blanches dentelures
Un soupir doux et frais qui hante le sommeil
Des sables endormis à l’ombre des ramures…


Mais qu’elle est, tout à coup, cette voix dans la nuit
Qui livre ses accents au murmure des palmes
Et qui semble, à la mer, dire un profond ennui ?


Est-ce de l’au-delà un faible écho qui meurt
Avec la blanche lame au pied des rives calmes
Ou la tristesse en moi qui fait pleurer mon cœur ?


© Alcide BARET


Alcide Baret (1914-1959)
Poète et écrivain réunionnais, Alcide Baret était instituteur à la Rivière Saint-Louis. Il obtient plusieurs prix de poésie et fréquente les poètes de l'île. Il est fondateur de la revue Trait d'union, et édite son premier recueil Primes accords en 1949. Il devient membre de l'Académie de la Réunion et fait partie de la Société des poètes français à Paris. Ne survivant pas au décès brutal de son épouse, il décède à l'âge de 45 ans et laisse une oeuvre poétique inachevée.
Site qui lui est consacré :
→ http://baret.alcide.monsite-orange.fr/



Poisson
Paul ÉLUARD

y

Les poissons, les nageurs, les bateaux
Transforment l’eau.
L’eau est douce et ne bouge
Que pour ce qui la touche.

Le poisson avance
Comme un doigt dans un gant,
Le nageur danse lentement
Et la voile respire.

Mais l’eau douce bouge
Pour ce qui la touche.
Pour le poisson, pour le nageur, pour le bateau
Qu’elle porte
Et qu’elle emporte.


© Paul ÉLUARD


Paul Éluard (1895-1952)
Nom de plume d'Eugène Grindel, Paul Éluard est un poète français. Il adhère au dadaïsme et devient l'un des piliers du surréalisme. Obligé d'interrompre ses études à cause de la tuberculose, il séjourne en sanatorium où il rencontre une jeune russe qu'il prénomme Gala. Impressionné par sa forte personnalité, c'est d'elle qu'il tient son premier élan de poésie amoureuse. Il l'épouse début 1917. Malgré sa santé défaillante, il est mobilisé en 1914, puis publie ses premiers poèmes. Au lendemain de la Grande Guerre, il adhère au mouvement Dada puis s'engage dans celui du surréalisme. En 1928, il repart en sanatorium accompagné de Gala. C'est là qu'elle le quitte pour Salvador Dali. Autour d'un voyage autour du monde, il rencontre Maria Benz (Nusch) qui devient sa muse et lui inspirera ses plus beaux poèmes d'amour. Plongé dans le désespoir après le décès de Nusch en 1946, il rencontre Dominique qui devient sa dernière compagne et pour laquelle il écrit le recueil "le Phénix" consacré à la joie retrouvée. Il succombe à une crise cardiaque le 18 novembre 1952 et sera inhumé au Père Lachaise.
→ Voir la liste de tous ses textes sur le site
→ Sa biographie sur Wikipédia



La rivière endormie
Claude ROY

y
Dans son sommeil glissant l’eau se suscite un songe
un chuchotis de joncs de roseaux d’herbes lentes
et ne sait jamais bien dans son dormant mélange
où le bougeant de l’eau cède au calme des plantes

La rivière engourdie par l’odeur de la menthe
dans les draps de son lit se retourne et se coule
Mêlant ses mortes eaux à sa chanson coulante
elle est celle qu’elle est surprise d’être une autre

L’eau qui dort se réveille absente de son flot
écarte de ses bras les lianes qui la lient
déjouant la verdure et l’incessant complot
qu’ourdissent dans son flux les algues alanguies

© Claude ROY

Claude Roy (1915-1997)
Poète, journaliste et écrivain français, il écrit ses premiers poèmes lorsqu'il est fait prisonnier en juin 1940. Il s'engage alors dans la Résistance puis commence à publier des récits de voyages. Il ne cesse de publier des romans, des témoignages sur ses nombreux voyages, des descriptions critiques, des essais sur l'art et sur les artistes, dont beaucoup sont ses amis, des livres pour enfants et des poèmes, car la poésie est au cœur de toute son écriture. Elle en est le fil conducteur, et c'est à travers elle que la littérature prend toute sa place pour donner un sens à son existence inquiète et à des engagements souvent déçus.
Autres textes :
Un chevreuil rencontré
L'enfant qui a la tête en l'air
Mademoiselle Sans Souci
Le chat blanc
→ Sa biographie sur Wikipédia



Le regard du marin
Jean-Marc CHAPELET

y

Un envol de mouettes sous un ciel cabotin
Lentement disparait dans la nacre et la pluie
Sur un rocher blessé d’un mistral arrogant
Un marin noie ses larmes parmi les flots mutins


Comme la vague vive frappe les galets bleus
Son âme s’épouvante à l’orée de la nuit
Une plume crayeuse se brise sur son bras
Des mouettes se plaignent au lieudit « les baigneuses »


Regardez le marin sur son filet ridé
Les algues pirouettent enivrées par la houle
Les poissons picaresques dansent au nez du vent
Regardez le marin son œil bleu qui se saoule


Vers l’horizon lointain un bateau se dessine
Toutes voiles dehors bercées par le zéphyr
En torsades mêlées de bruns et de lumière
Une mouette mord une mèche de miel


Regardez le marin son regard s’est éteint
Regardez le marin son regard s’illumine


© Jean-Marc CHAPELET


Jean-Marc Chapelet (1960-aujourd'hui)
Originaire de Saint-Martin-d'Hères (Isère), Jean-Marc Chapelet peint et écrit depuis l’adolescence. Il a travaillé dans un hôpital où il a occupé des fonctions d’infirmier, d’art thérapeute et de cadre. Fraîchement retraité, il se consacre à l’écriture, à la peinture et au théâtre. En 1986, il a créé, avec son frère, une association théâtrale « Théâtre de l’Asphodèle » à Saint-Martin-d’Hères.



Bois flotté
Jean-Claude PAILLOUS

y

Aux sables en repos que la marée délaisse
Vient mourir sur la grève une pièce de bois,
Venue peut-être là de la nef d’un grand roi
Comme d’un frêle esquif accablé de vieillesse.


Que tu sois d’un vaisseau de tant et tant de pièces
Ou du pauvre canot d’un vieux pêcheur d’anchois,
Que la poudre ou l’écueil aient eu raison de toi,
Diras-tu les émois de ta prime jeunesse ?


Déjà le flot grondeur sous les vents revenus
Recouvrait les sables des grands espaces nus
Lorsqu’une faible voix déclarait en substance :


- Sachez que je ne fus coque d’aucun vaisseau,
Mais qu’à ces reliquats jadis pendaient des os,
Dit le morceau de bois, - ainsi, je fus potence.


© Jean-Claude PAILLOUS


Jean-Claude Paillous (1945-aujourd'hui)
Originaire d'Albi, ce Toulousain d'adoption est devenu sur le tard un passionné de littérature et a commencé à écrire des nouvelles et de la poésie. Il participe à des ateliers d'écriture et a créé plusieurs blogs à thèmes variés comme la nature et la randonnée, la musique ou encore la photo.
Son blog :
→ La chanson grise






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Le petit monde de l'humidité de Annie Viti
Le lavoir de Albert Mérat
Déluge sur Berlin de Nathalie Lauro
En forêt de Michel Bunel
Le Lignon à Jaujac de Jean-Charles Paillet
Marée noire de Claude Dussert
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→ Citations autour du thème

Les verres d'eau ont les mêmes passions que les océans.
Victor HUGO


L'eau est ruisseau, rivière et fleuve, coléreuse ou tendre , vivifiante ou mortelle, elle hante nos esprits de son impérieuse présence. Elle nous fait enfants de la terre, du soleil et de l'air. Elle nous fait enfants du cosmos, des forces telluriques et des brumes épaisses, enfants des océans et de leur houle puissante. L'eau est nous-même et nous sommes l'eau même.
Pierre RABHI


Sans eau, le désert n'est qu'une tombe.
Mildred CABLE


L'eau parle sans cesse et jamais ne se répète.
Octavio PAZ