Le chant de l'eau
(Lacs, fleuves & rivières)
Le ruisseau

Près du petit ruisseau
J’ai retrouvé mon âme
Près de ses filets d’eau
J’ai retrouvé ma flamme.
Autour de lui s’étendait
Des cascades ruisselantes
Comme des jeunes mariées
Elles pleuraient nonchalantes.
Leurs robes blanches s’écoulaient
Comme un jour de dimanche
Le petit ruisseau s’apaisait
Mais criait sa revanche.
Autour de lui séjournaient
Fiers comme des vainqueurs
Quelques rochers qui disaient
Ruisseau sèches tes pleurs.
Alors près du ruisseau
S’est livrée une alchimie
Il a quitté ses maux
Et chanté mes écrits.
Puis j’ai fait des ricochets
Allongée près des fleurs
Le petit ruisseau riait
Me comblait de bonheur.
Ce compagnon de fortune
Que j’avais rencontré
M’avait apporté la lune
Et son trousseau de clefs.
© Myriam CLOWEZ
Myriam Clowez (1961-aujourd'hui)
Retraitée du secteur sanitaire et social, Myriam Clowez a toujours aimé la poésie et c'est surtout à l'adolescence qu'elle a écrit de nombreux poèmes. Aujourd'hui, elle profite de son temps libre pour participer aux concours de poésies.
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Ruisseaux

Des brassées d’heures galopent en vain
Sur le dos des vagues en cabotage.
L’été semble fiévreux sur le chemin.
Seul, le coquelicot n’est pas otage.
S’inscrit déjà une aube en devenir
Par-delà l’horizon qui tend sa chaîne.
L’espoir a tellement peur de mourir
Qu’il met ses promesses en quarantaine.
Au nu du silence, un cortège impur
Jette au fossé les battements fragiles
De la terre et l’ombre devant le mur
Ricane avec sa troupe de vigiles.
Résonne le tocsin dans l’océan.
Qui veut bien l’entendre à part la crinière
De ce cheval de feu au vieux carcan.
Les mots se sont perdus au cimetière.
Quand les eaux s’usent contre le rocher
A entasser les jours et leurs fêlures,
Les lèvres gercées, tourne le sablier
Mais nos écorces restent écritures.
Et demain, les mains pleines de ruisseaux
Nous irons par le sentier apatride
Abreuver la banquise et les oiseaux,
Mon rêve lâchera sa chrysalide.
© SEDNA
Sedna
Résidant en Charente-Maritime, Sedna a toujours eu la passion des mots. Elle aime les rimes et travaille principalement avec le Traité de Sorgel en poésie classique. Elle aime la mer, le ciel qui sont ses sources d'inspiration permanente. La sauvegarde de notre planète est l'une de ses préoccupations.
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Son site : → http://www.cassiopee17.fr/
Au lit, les gars !...

Au sortir des bras d’un jour de labeur
Les pieds dans le sablon, Ah quel bonheur !
Le corps habillé seulement de l’ombre
Du bosquet qui espère une prude pénombre
Pour que les peupliers, las, pleurent à seaux
Leurs peines sous leurs accueillants arceaux,
Avec des cris d’indiens mis en déroute,
On plongeait nos corps chauds et harassés.
Lors, éclats de rire et gerbes de gouttes
Baignaient nos cent sueurs à décrasser.
Règne ici la paix d’une presqu’île,
Bras pratiquement mort aux flots tranquilles.
Puis, délassés, on faisait ricocher
Jusqu’à ces hauts fonds que crues font flancher,
Des galets lissés et lassés de l’eau claire
Comme les graviers qui fatiguent et galèrent
À courir vers une mer bien trop loin,
Cavale dont seuls les ciels sont témoins.
Cette berge concave de méandre
S’accentuait mais sans mie se défendre
Des attaques qu’ont berges s’inondant,
Des ravages des orages grondant.
Là, son onde nous fut toujours riante,
Et placide, et patiente, et scintillante.
Des lueurs s’accrochaient au bord du jour :
Sa lumière se perdait, à bout d’heures,
Dans une nuit qui venait toujours :
Le bonheur ne sait rester à demeure…
© Christian SATGÉ
Christian Satgé (1965-aujourd'hui)
Auteur prolifique, fabuliste et conteur éclectique, Christian Satgé est professeur d'histoire-géographie dans le département des Hautes-Pyrénées. Il a publié plusieurs recueils et plus d'une soixantaine de ses textes figurent dans Le Monde de Poetika. Son dernier recueil : Recadré paru chez 5 Sens Editions.
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Manteau de pluie

Une silhouette de pluie s’immisçait, presqu’invisible, dans l’atmosphère impalpable d’un matin transparent.
L’horizon étouffé la maintenait dans une bulle diaphane, d’où perçait à intervalles irréguliers une chanson portée par le vent froid des nuées boréales.
Le rythme saccadé de sa respiration gonflait un ballon rouge-coquelicot, qui monta peu à peu dans l’air humide d’une montagne de pluie, laquelle venait d’accoucher d’une souris cynique au souffle éolien.
Bientôt, toute forme de vie disparut dans cet espace en apnée.
S’ouvrît alors le chemin du néant.
© Pierre PAYSAC
Pierre Paysac (1948-aujourd'hui)
Fréquentant un atelier d'écriture depuis plus de dix ans, Pierre Paysac a publié son premier recueil, Errance, en 2021, aux éditions Persée. Son deuxième recueil est en cours d'édition. Il a par ailleurs participé au concours Poetika 2023 et l'un de ses textes a été remarqué par les membres du jury.
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La rivière

D’un bord à l’autre bord j’ai passé la rivière,
Suivant à pied le pont qui la franchit d’un jet
Et mêle dans les eaux son ombre et son reflet
Au fil bleui par le savon des lavandières.
J’ai marché dans le gué qui chante à sa manière.
Étoiles et cailloux sous mes pas le jonchaient.
J’allais vers le gazon, j’allais vers la forêt
Où le vent frissonnait dans sa robe légère.
J’ai nagé. J’ai passé, mieux vêtu par cette eau
Que par ma propre chair et par ma propre peau.
C’était hier. Déjà l’aube et le ciel s’épousent.
Et voici que mes yeux et mon corps sont pesants,
Il fait clair et j’ai soif et je cherche à présent
La fontaine qui chante au cœur d’une pelouse.
© Robert DESNOS
Extrait du recueil Contrée
Robert Desnos (1900-1945)
Autodidacte et rêvant de poésie, Robert Desnos fréquente les milieux littéraires très tôt et adhère au mouvement surréaliste en 1922. Engagé dans la Résistance, au sein du réseau AGIR, il sera arrêté puis déporté dans plusieurs camps avant de mourir du typhus au camp de Theresienstadt en Tchécoslovaquie.
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Poisson

Les poissons, les nageurs, les bateaux
Transforment l’eau.
L’eau est douce et ne bouge
Que pour ce qui la touche.
Le poisson avance
Comme un doigt dans un gant,
Le nageur danse lentement
Et la voile respire.
Mais l’eau douce bouge
Pour ce qui la touche.
Pour le poisson, pour le nageur, pour le bateau
Qu’elle porte
Et qu’elle emporte.
© Paul ÉLUARD
Paul Éluard (1895-1952)
Nom de plume d'Eugène Grindel, Paul Éluard est un poète français. Il adhère au dadaïsme et devient l'un des piliers du surréalisme. Obligé d'interrompre ses études à cause de la tuberculose, il séjourne en sanatorium où il rencontre une jeune russe qu'il prénomme Gala. Impressionné par sa forte personnalité, c'est d'elle qu'il tient son premier élan de poésie amoureuse. Il l'épouse début 1917. Malgré sa santé défaillante, il est mobilisé en 1914, puis publie ses premiers poèmes. Au lendemain de la Grande Guerre, il adhère au mouvement Dada puis s'engage dans celui du surréalisme. En 1928, il repart en sanatorium accompagné de Gala. C'est là qu'elle le quitte pour Salvador Dali. Autour d'un voyage autour du monde, il rencontre Maria Benz (Nusch) qui devient sa muse et lui inspirera ses plus beaux poèmes d'amour. Plongé dans le désespoir après le décès de Nusch en 1946, il rencontre Dominique qui devient sa dernière compagne et pour laquelle il écrit le recueil "le Phénix" consacré à la joie retrouvée. Il succombe à une crise cardiaque le 18 novembre 1952 et sera inhumé au Père Lachaise.
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Le Lac

C’est une mer, un Lac blême, maculé d’îles
Sombres, et pullulant de vastes crocodiles
Qui troublent l’eau sinistre et qui claquent des dents.
Quand la nuit morne exhale et déroule sa brume,
Un brusque tourbillon de moustiques stridents
Sort de la fange chaude et de l’herbe qui fume,
Et dans l’air alourdi vibre par millions ;
Tandis que, çà et là, panthères et lions,
À travers l’épaisseur de la broussaille noire,
Gorgés de chair vivante et le mufle sanglant,
À l’heure où le désert sommeille, viennent boire ;
Les unes en rasant la terre, et miaulant
De soif et de plaisir, et ceux-ci d’un pas lent,
Dédaigneux d’éveiller les reptiles voraces,
Ou d’entendre, parmi le fouillis des roseaux,
L’hippopotame obèse aux palpitants naseaux,
Qui se vautre et qui ronfle, et de ses pattes grasses
Mêle la vase infecte à l’écume des eaux.
Loin du bord, du milieu des roches erratiques,
Solitaire, dressant au ciel son large front,
Quelque vieux baobab, témoin des temps antiques,
Tord les muscles noueux de l’immuable tronc
Et prolonge l’informe ampleur de sa ramure
Qu’aucun vent furieux ne courbe ni ne rompt,
Mais qu’il emplit parfois d’un vague et long murmure.
Et sur le sol visqueux, hérissé de blocs lourds,
Saturé d’âcre arome et d’odeurs insalubres,
Sur cette mer livide et ces îles lugubres,
Sans relâche et sans fin, semble planer toujours
Un silence de mort fait de mille bruits sourds.
© Charles-Marie LECONTE DE LISLE
Extrait du recueil Derniers Poèmes
Charles-Marie Leconte de Lisle (1818-1894)
Leconte de Lisle est le nom de famille du poète qu'il adopte comme nom de plume, sans mentionner ses prénoms. Il est considéré comme le chef de fil du mouvement parnassien. Il passe son enfance à l'île de la Réunion et en Bretagne puis en 1845 il se fixe à Paris. Son œuvre est dominée par trois recueils de poésie, qui sont Poèmes antiques (1852), Poèmes barbares (1862) et Poèmes tragiques (1884).
Autre texte :
Dans le ciel clair
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Il pleut

Averse averse averse averse averse averse
Pluie ô pluie ô pluie ô ! ô pluie ô pluie ô pluie !
gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau
parapluie, ô parapluie ô paraverse ô !
paragouttes d’eau paragouttes d’eau de pluie
capuchons pèlerines et imperméables
que la pluie est humide et que l’eau mouille et mouille !
mouille l’eau mouille l’eau mouille l’eau
mouille l’eau et que c’est agréable agréable agréable
d’avoir les pieds mouillés et les cheveux humides
tout humides d’averse et de pluie et de gouttes
d’eau de pluie et d’averse et sans un paragoutte
pour protéger les pieds et les cheveux mouillés
qui ne vont plus friser qui ne vont plus friser
à cause de l’averse à cause de la pluie
à cause de l’averse et des gouttes de pluie
des gouttes d’eau de pluie et des gouttes d’averse
cheveux désarçonnés cheveux sans parapluie
© Raymond QUENEAU
Raymond Queneau (1903-1976)
Romancier, poète et dramaturge, Raymond Queneau est cofondateur du groupe littéraire Oulipo. En 1924, il rejoint le groupe des surréalistes et commence véritablement à écrire en 1930. En 1933, il publie son premier livre, "Chiendent", transposition en sa savante langue "néo-française" à la fois classique et ludique du "Discours de la méthode", immédiatement récompensé du premier Prix des Deux-Magots. Il entre en 1938 au comité de lecture des éditions Gallimard, chargé en particulier du domaine anglo-saxon, avant d'être nommé directeur du comité de lecture de la Nouvelle Revue Française (Nrf) en 1941. "Exercices de style", court récit racontant 99 fois la même histoire, de 99 façons différentes, publié en 1947, est son premier grand succès public. À la Libération, il fréquente Saint-Germain-des-Prés. Son poème Si tu t’imagines, mis en musique par Joseph Kosma, est un des succès de la chanteuse Juliette Gréco. D’autres textes sont interprétés par les Frères Jacques. En 1959 paraît Zazie dans le métro qui s'ouvre par l’expression « Doukipudonktan ! » Le succès de ce roman surprit Queneau lui-même et fit de lui un auteur populaire.
Du même auteur :
Pour un art poétique
La lune
Navigateur solitaire
La main à la plume
Bon dieu de bon dieu que j'ai envie
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J'étais un petit ru...

J'étais un petit ru, né au hasard
Des ondulations de la terre
Et du ciel ombrageux.
Ils m'ont déposé là, certains de bien faire,
Sous les bruyères et les feuilles mortes.
Je me faufilais entre ronces, branchages,
Et pentes douces vers le village.
Je pensais grandir en toute liberté.
J'ai accepté les lavoirs au bonheur des dames,
Les abreuvoirs, les gués étroits.
J'étais heureux, mes berges joyeuses
Avec l'espoir d'une vie sans fin.
J'ai sauté de pierre en pierre,
Bousculé quelques herbes folles,
Nourri les prairies et champs voisins.
J'ai chanté avec les oiseaux
Aboyé avec les chevreuils,
Abreuvé le bétail, et les oies de passage.
Je rejoignais enfin la rivière
Heureux du travail accompli,
Les hommes n'ont rien compris
Ils ont démoli tous mes lavoirs,
Mes abreuvoirs, mes gués étroits,
Capté ma source, supprimé ma liberté
Je ne suis plus qu'un filet d'eau trouble.
J'étais un petit ru heureux.
© Renée BORON
Renée Boron (1939-aujourd'hui)
Renée Virlogeux Boron s'adonne à la poésie pour son plaisir et écrit aussi des nouvelles. Elle travaille la terre aux Ateliers d'Art de Château-Thierry.
Elle aime également peindre et a pris quelques cours de calligraphie. Elle a ouvert une petite bibliothèque dans sa commune qui compte 83 habitants. C'est avant tout le plaisir de se rencontrer, d'échanger et... de jouer aux cartes.
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La petite rivière

La petite rivière, bleue
Si peu que le ciel ait d'azur,
D'ici fait encore une lieue,
Puis verse au fleuve son flot pur.
Plus grande, elle serait moins douce,
Elle n'aurait pas la lenteur
Qui dans les herbes mène et pousse
Son cours délicat et chanteur.
Elle n'aurait pas de prairies
Plus vertes si près de la main,
Non plus que ces berges fleuries
Où marque à peine le chemin.
Ni le silence si paisible,
Ni parmi les plantes des eaux
L'étroit chenal presque invisible
Entre les joncs et les roseaux.
Et le moulin qui sort des branches
N'aurait pas à bruire ailleurs
Plus d'eau dans ses palettes blanches,
Ni plus de mousses et de fleurs.
La petite rivière est gaie
Ou mélancolique, suivant
Qu'un oiseau chante dans la haie
Ou qu'il pleut et qu'il fait du vent.
Selon l'heure, joyeuse ou triste,
Couleur du soir ou du matin,
Comme une charmeuse elle insiste,
Lorsque l'œil la perd au lointain,
Derrière le saule incolore
Ou le vert des grands peupliers,
A montrer une fois encore
Ses caprices inoubliés.
© Albert MÉRAT
Extrait du recueil Le Parnasse contemporain, III (1876)
Albert Mérat (1840-1909)
Poéte français, Albert Mérat a fait partie des poètes parnassiens, tout comme Théophile Gautier, José-Maria de Heredia, Théodore de Banville, Charles Baudelaire, Stéphane Mallarmé, François Coppée, Verlaine, Rimbaud. Il était loué par les poètes de son époque. Rimbaud le considérait comme visionnaire et en faisait, presque, l'égal de Verlaine, qui lui dédia son poème Jadis.
Autres textes :
Le ciel
Le lavoir
Le bonheur
Les parfums
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